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Biographies
Pierre Joseph FERCOQ de
KERLEAU
Un républicain authentique
et sincère.
On ne peut parcourir les dossiers des archives
relatives à la Révolution de la région de Callac sans
rencontrer un personnage hors du commun, fin politique,
ambitieux en diable, un protagoniste protéiforme, un ardent
défenseur des nouvelles lois républicaines, j'ai cité Pierre
Joseph FERCOQ. Le patronyme est fréquent dans la région, il
provient d'une famille de notaires et tabellions locaux mais
également à la cinquième génération d'une famille écossaise du
nom de FLOYD qui fit souche dans la région après " la
Conspiration des Poudres " en
1605.
Archives Nationales. F 1 b
II (Côtes-du-Nord). Photo Archives Départementales des
Yvelines.
Cette affiche est
antérieure à la désignation des membres du directoire du
département.
Parmi les élus, on relève
dix-huit avocats, un procureur, cinq négociants, quatre
propriétaires, trois cultivateurs, deux curés dits
" recteurs ".
Nous voyons ainsi que Pierre Joseph
Fercoq dit l'aîné accompagne Kersalic Hamon et Le Bail,
tous trois
avocats et Yves Derrien, de Trébrivan, l'un des trois
administrateurs cultivateurs du
département.
Administrateur du
département en costume.
Il cumule les fonctions : Sous l'Ancien
Régime, il est successivement notaire, puis au décès de son
père Gabriel Joseph en 1783, il reprend sa charge de notaire
royal et avocat au Parlement de Bretagne à Rennes en 1786.Puis
la même année, il est nommé premier juge civil criminel et
gruyer de la
Juridiction de Carnoët et de Kerjégu et il est le procureur de
Jean Charles Marie Fleuriot, chevalier
seigneur Comte de Langle pour s'occuper de ses terres. Très
attiré par les idées nouvelles comme son frère Jacques Marie
dit le Jeûne, également avocat, il est nommé procureur syndic
et administrateur de la commune de Botmel au début de
1790 ; Il s'affronte vivement avec le notaire
subdélégué Joseph Even
au sujet de la formation de la municipalité que le
premier voulait instaurer à Callac et le second à Botmel. Le
30 mars 1790, dans une lettre adressée aux responsables du
district, Jacques Marie Fercoq, son frère,
écrit :
" Une petite
ville enclavée dans une trêve de campagne mais n'ayant eu
jusqu'à présent aucune administration particulière a-t-elle le
droit de se séparer de sa trêve ou les trêviens peuvent-ils
exiger que les habitants de la ville se joignent à eux pour
former une municipalité communes ? "
Les habitants de Callac par
la voix de M° Joseph Even, Subdélégué
de l'Intendance, Procureur fiscal et déjà maire sous
l'Ancien Régime, rétorque qu'ils viennent de recevoir le 7
mars, une lettre de Monsieur Palasne de Champeaux, sénéchal de
St Brieuc et Député à l'Assemblée Nationale, lui indiquant que
la ville de Callac est érigée en canton du département de St
Brieuc. Mais Pierre Joseph Fercoq fit également intervenir ses
protections et les administrateurs du district de Rostrenen
désignèrent
Botmel comme municipalité.
En janvier 1793, débute la
1ère guerre de Vendée et la Convention organise une
levée en masse de 300 000 hommes. La municipalité de Botmel
effectue un appel aux volontaires qui veulent défendre la Patrie et parmi les
personnes qui répondent présents, citons les deux frères
Fercoq, Pierre Joseph dit l'aîné et Jacques Marie dit le
jeune, Jérôme Alexandre Guiot, Major de la garde nationale,
François Marie Borny qui laissera sa vie à Landau en Allemagne
à l'âge de 33 ans, et Jean Gillorain, receveur des Devoirs à
Callac et capitaine de la garde nationale. Ces volontaires
rejoignent la 6ème compagnie du 4ème
Bataillon des Côtes du Nord et se retrouvent dans l'armée des
Côtes de Brest commandée par le Général Canclaux. Ces bataillons de volontaires
ont laissé peu d'archives et il est difficile de suivre les
pérégrinations
pendant cette année. Pierre Joseph et ses compagnons
rejoignent Callac vers le milieu de d'avril 1793. Nous le
trouvons le 8 avril, procureur de la commune de Botmel, poste
qu'il tient depuis juillet 1790, à la séance du conseil
général de Botmel tenue à la maison commune de Callac sous la
présidence du maire Pierre Le Milbeau, avec Jean Yves Guillou,
Joseph Even et François Le Pourhiet comme officiers
municipaux, Maurice Daniel, Guillaume Le Barbier, Pierre le
Gac, François Lhélias, Jean Lallour, René Corgat, François Le
Masson, Yves Lhélias, Yves Le Deuff et Guillaume Rinquin comme
notables.
Ce
document, dans lequel est rapporté cette séance, constitue le
premier registre de délibération des séances du conseil
municipal parvenu jusqu'à nous. Ce registre de 130 feuillets
acheté par M° Joseph Even lors de la formation avortée de la
première municipalité de Callac, est resté vierge de toute
inscription entre février 1790 et avril 1793.
En 1794, entre la dictature de
Robespierre et la Réaction thermidorienne, Pierre Joseph est
agent national et
surveille attentivement les factions armées de chouans fort
nombreuses dans la région. C'est également l'époque des
processions nocturnes et dans le texte suivant qu'il adresse
au district de Guingamp, nous le voyons agir sous la crainte
d'un nouvelle Vendée.
"CALLAC le 28 Messidor
An II(16 juillet 1794)
L'agent national de la commune de Callac aux
administrateurs du District à Guingamp
Nos parages vont devenir une nouvelle
Vendée et le foyer s'en trouvera dans votre district. Depuis
quelques temps j'étais instruit qu'on chantait des vêpres à
Bulat, que les fonctionnaires publics de cette commune, bien
loin d'éclairer ses habitants semblaient les autoriser dans
leur fanatisme, en
permettant ces prières et que même le juge de Paix
faisait les fonctions de grand prêtre, en ouvrant la comédie
et en entonnant les vêpres. Depuis quelques jours, on ne se
borne plus à des prières, on a en recours aux voies
de pèlerinages et
ces moyens ont encore dégénérés en processions
nocturnes. Il n'est ni dimanches, ni fêtes qu'on ne voit à
Bulat et à Ste Anne( deux ci-devant chapelles de dévotion en
la commune de Pestivien) des milliers d'individus venus en
pèlerinages et qui à la manière sacerdotale s'ouvrent les
genoux à faire le tour de l'église. Des habitants des communes
de Bourbriac, St Adrien et communes avoisinantes ont du venir
processionnellement ces jours derniers dans ces deux
lieux.. Une lettre
a du descendre des cieux et tomber aux mains du maire de
Bourbriac ( ou autres officiers municipaux) dans la ci-devant
Chapelle de la Trinité en Lanrivain où on prétant qu'il soit à
la tête des fanatiques de sa commune et qui lui prédit qu'il
serait consumé par la foudre, s'il ne faisait des processions
pour demander leur conservation par l'intermédiaire de la
ci-devant Notre Dame de Bulat, celle de Ste Anne. Ces
processions ne se font pas bornées à Bulat et à Ste Anne,
elles ont la nuit dernière traversé une partie de la commune
de Callac et se sont rendues aux ci-devant chapelles de St
Michel et de St Servais où l'on a brisé la porte de la
première et pressé les fabriques de la seconde de leur livrer
les clefs. Je suis prévenu ce soir et demain qu'on doit les
continuer dans d'autres chapelles de ma commune, on m'a nommé
un individu de nos parages qui a du se trouver dans le nombre
de processionnaires. Je n'ai pu me faire nommer d'autre, je
vais cependant m'informer par toutes les voies possibles si on
ne connaîtrait pas d'autres citoyens. Faîtes attention à ce
que je vous dénonce, ne négligez pas mes avis ; tel fut
le commencement de la Vendée. Je ne saurais croire que des
cultivateurs seuls fussent capables de ces démarches, ils ont
certainement à leur tête des personnages qu'il serait
intéressant de connaître. Le mal n'est pas encore grand et je
crois qu'il sera facile à guérir si on lui applique le remède
dans sa naissance."
Pierre
.Joseph. Fercoq,Agent National
P.S. : Je vous préviens que demain au soir
la procession sera à la Chapelle Neuve en
Plougonver."
Le 26 frimaire de l'An IV (17
décembre 1796, Marie Hélène Guillemot, veuve de Gabriel Fercoq
et mère de Pierre Joseph, vient déclarer à la maison commune
que son fils Pierre Joseph, notaire, âgé de 32 ans au 20
brumaire dernier, qui partit avec les jeunes gens levés en
masse de cette commune pour combattre les Vendéens, est
maintenant capitaine de la 3ème compagnie du
1er bataillon des Côtes du Nord à Rennes.
C'est
au cours de ses pérégrinations que Pierre Joseph se
marie à Rennes le 8 ventôse An II(26 février 1794)avec Adélaïde Marie Jeanne Thibaudeau et le premier
enfant Edouard Jean Marie naît à Lannion le 8 octobre 1795. Un
deuxième enfant, Adélaïde Marie Rose naît également à
Lannion le 7 novembre 1796 et ses deux évènements sont
reportés sur le registre des naissances de Callac.
A son retour de campagne, il est
nommé Commissaire du Directoire, fonction qu'il occupera
jusqu'à sa démission comme il est indiqué dans le document
suivant adressé à la municipalité de Callac.
Nous sommes à la veille du coup d'Etat
du 18 brumaire, Bonaparte est au pouvoir et la 2ème
guerre des Chouans fait rage dans la région. Sent-il venir le
vent pour ainsi quitter le pays ? Est-t-il en
disgrâces ?
"Démission du citoyen
Pierre Joseph FERCOQ.
Je
soussigné Yves Marie LE GARS, huissier près du Tribunal Civil
du Département des Côtes du Nord, résidant au chef lieu de
canton de Callac dit département, Patente N°44.
A la requête de Pierre Joseph FERCOQ, homme de loi et
présent au lieu de Callac, commune et canton du même nom, ai
déclaré et dénoncé aux citoyens président et agents de Callac
au Département des Côtes du Nord et au citoyen Commissaire
près de cette administration, que le dit citoyen FERCOQ à
compter du troisième jour complémentaire de l'An six
( 19
septembre 1798)d'après
la déclaration qu'il fit ce jour à l'administration assemblée
au lieu de son français ? à la suite de son remplacement
dans les fonctions de Commissaire du Directoire qu'il exerçait
près de cette administration et l'installation du citoyen Jean Yves GUILLOU son
successeur qui se fit ce dit jour trois complémentaire
dernier, a entendu fixer son domicile en la cité et canton de
Nantes, section de l'unité au département de la Loire
Inférieure. "
En conséquence, le même FERCOQ, répétant sa déclaration
au présent, invite les citoyens administrateurs municipaux de
Callac à ne plus le considérer comme domicilié de ce canton,
mais bien de celui de Nantes, comme à ne plus l'employer dans
les charges publiques et donne toute la publicité légale à
présent dénoncée.
"
Fait savoir aux
dits administrateurs leur délivrant cette copie au partant à
la personne du dit citoyen La FARGUE lui enjoignant de donner
avis aux citoyens administrateurs municipaux du canton de
Callac en sa qualité de Secrétaire greffier, trouvé en son
domicile, ce jour douze vendémiaire An Sept de la République.
(
3 octobre 1798).
Yves
Marie LE GARS.
Huissier
Au citoyen
Jean Julien de
LAFARGUE, Secrétaire de l'Administration de
Callac.
Notes sur Pierre Joseph FERCOQ de Kerleau.
Dans l'article que
nous avions consacré
à ce personnage hors-norme dans le Cahier du Poher n°6
en juin 2001, nous étions resté à sa lettre de démission qu'il
avait adressée le 3 octobre 1798 à la municipalité de Callac.
Dans ce courrier, Pierre Joseph annonçait son intention de
quitter Callac pour la ville de Nantes sous la pression de son
épouse qui ne pouvait s'y faire dans la petite ville de
Callac. Elle désirait habiter une ville et se rapprocher
de ses propriétés qui étaient proches de Nantes.. Pierre
Joseph s'installe le 25 novembre 1799 à Nantes avec sa
famille, sa femme Adélaïde Marie Jeanne Thibaudeau, épousée
lors de son séjour à Rennes le 26 février 1794 et ses deux
enfants Édouard Jean Marie, 4 ans et Adélaïde Marie Rose, 3
ans, nés à Lannion. Trois autres enfants naîtront à Nantes
dont nous ne connaissons, ni les prénoms, ni les dates de
naissance. Il s'inscrit au barreau de Nantes en qualité
d'avoué et de jurisconsulte, dans une ville en pleine
expansion, ouverte sur le large, loin de la Bretagne
intérieure et de l'Argoat profond. La vie s'écoule, en
apparence sans heurt, mais un événement insolite intervient
vers la fin 1803, Pierre Joseph, toujours aussi remuant, entre
en conflit avec le
magistrat et commissaire du gouvernement Félix
Guillaume Gédouin pour un affaire de pièces notariales
altérées et soustraites au dossier. L'affaire prend des
proportions sérieuses et Pierre Joseph, sois-disant, menace de
duel Félix Gédouin, personnage d'envergure qui deviendra plus
tard , député au Corps Législatif de 1805 à 1810 et en 1811,
Procureur Impérial de Nantes. Bien sur le duel n'aura pas
lieu, mais Pierre Joseph en subit les conséquences, son étoile
pâlit dans le milieu de la judicature nantaise. En 1804, pour
sa défense, il fait paraître à Rennes chez la veuve Brute de
Rémur, éditeur, et non à Nantes, un libelle sous forme de
mémoire, dans lequel il expose ses différents avec le milieu
notarial nantais. Ce mémoire de 134 pages, in 8°, est
disponible à la Bibliothèque Municipale de Rennes sous la
référence : 7364FB.
Site BM
Rennes :
http://www.bm-rennes.fr/
L'histoire de
Pierre Joseph Fercoq, personnage qui a marqué de son empreinte
la période révolutionnaire callacoise, s'arrête le 19
septembre 1829 à l'âge de 68 ans, il décède à son domicile,
Haute Grande rue, 2e canton, à Nantes, veuf de son
épouse, Adélaïde Marie Jeanne Thibaudeau et en présence de son
médecin François Bergette.
J.Lohou -sept.2004-novembre 2016