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Lettre
du 3 octobre 1746, adressée par le recteur Mathias SOUBENS
au Prieur des Bénédictins de l’abbaye Royale de sainte
Croix de Quimperlé, qui se plaint de l’attitude du Subdélégué
de L’Intendance François Mathurin de Ploesquellec.
»
Monsieur et Cher Seigneur,
Le zèle que nous
avons tous remarqué en vous pour le bien d’une paroisse
qu’est plus la vôtre que la mienne, me fait profiter de
votre séjour à Rennes pour vous demander deux grâces.
- La première
est d’informer Monseigneur l’Intendant des vexations
qu’exerce en ce pays Monsieur de Ploesquellec, son subdélégué
à Callac. J’en ai déjà ébauché le portrait en répondant
à certains ordres que M. Le Sueur, son secrétaire,
m’avait envoyé mais tachez d’y donner le vernis. Vous
le connaissez de réputation. Vous pouvez compter que n’étant
plus Sénéchal, il se dédommagera par la subdélégation
des présents que vous lui avez fait perdre. Il semble même
vouloir se venger sur nous du tour que vous lui avez joué
en lui ôtant une partie de son autorité, car il se vante
de nous bien pincer au premier tirage de milice. Il peut
nous nuire en beaucoup d’autres occasions, et sans être
prophète, je puis assurer qu’il le fera si vous n’y
mettez ordre .
La seconde grâce non moins considérable
que la première est de présenter à Monseigneur l’Intendant
les corvées excessives dont cette paroisse est accablée,
car sans compter le sort auquel nous sommes sujets et qui
nous procure des frais infinis, nous avons toujours quelque
compagnie en quartier à Callac, à laquelle nous
fournissons lits et casernes. Souvent il y passe des troupes
pour aller ailleurs, et il nous faut les loger. C’est nous
qui charroyons pour ces gens de guerre jusqu’à des cinq
ou six lieues. Nous avons deux étalons royaux en
Plusquellec seul, qui coûtent beaucoup au paysans. Nous
avons été cette année par deux fois pendant quinze jours
chaque, travailler aux fortifications de Port-Louis. On nous
oblige même d’aller raccommoder les grands chemins jusque
aux portes de Carhaix, quoique nous ayons chez nous, comme
vous le savez vous même, un grand chemin très mauvais. Je
n’exagère pas en disant que cette corvée de Carhaix a
attiré seule en deux ans près de six cent livres, car mes
paroissiens dont quelques uns sont éloignés du chemin
qu’on répare d’environ six lieues, aiment mieux payer
des gens de Carhaix que de les charroyer eux-mêmes.
Vous rendriez un service signalé
à votre paroisse de Plusquellec si vous obtenez qu’elle
fut à l’avenir au moins quitte des gens de guerre, et que
les paroisses voisines, comme Carnoët, Plourach,
Maël-Pestivien, Duault qui viennent à nos marchés
de Callac, qui en profitent, nous aidassent pour les lits de
camp des casernes et charrois de troupes.
Votre serviteur
Mathias Soubens.