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L’affaire
de l’octroi de Callac en 1840
(Sources
complémentaires)
Préambule
L’affaire
de l’octroi de Callac au printemps de l’année 1840, qui
vit toute la population de cette petite ville se rebeller
contre une mesure édictée par une municipalité sourde aux
réclamations de ses administrés, a été publiée dans le
« Pays d’Argoat « Revue d’Histoire et d’Archéologie
des cantons d’Argoat au 1er semestre 1991.
Un document retrouvé récemment dans la série U des
Archives départementales des Côtes d’Armor, apporte une
nouvelle réflexion sur cet événement qui affligea
grandement les habitants de la petite ville et ceux des
alentours.
Situation économique du canton
Depuis
la Révolution, la petite cité de Callac avait vécu sous
une administration plutôt débonnaire, avec des magistrats
municipaux que l’on disait faibles et peu actifs. Une
gestion qui dans la crainte de s’aliéner les esprits
n’osait rien entreprendre, ni apporter d’amélioration
notable. Les impositions locales étaient pratiquement
inexistantes et les règlements de police quasiment
inconnus. L’esprit mercantile était dans tous les esprits
et Callac placé au milieu du canton se prêtait à la spéculation
et à l’industrie, ses habitants s’enrichissaient.
Plan de la place du Martroy en 1833(Cadastre AD22)
On distingue la halle avec la chapelle Ste
Catherine sur la droite,
la rue des Portes au Sud
et les trois rues du Tréguier, du Four et Jobic au Nord .
En
une vingtaine d’années, nombre d’habitations, autour de
la place, avaient été construites ou rénovées ; les
commerces étaient libres de toute entrave, les négoces de
beurre et bestiaux rapportaient gros. Beaucoup d’abus s’étaient
déclarés et la commune, se développant, était toujours
sans ressources et revenus. La municipalité n’arrivait
plus à subvenir à ses besoins grandissants.
La
halle était en ruines, les rues non pavées et pleines de
cloaques en hiver, il n’existait aucun édifice pour
recevoir une école. Le presbytère qu’occupait l’ancien
curé de 1820 à 1838, Placide Guillermic, maintenant à Bégard,
avait été négligé et délaissé. Un tableau bien sombre
d’une petite cité, dressé par une partie de la
population, qui était fortement opposée à la municipalité
en place.
Les municipalités précédentes.
De
1800 à 1840, six maires s’étaient succédés à la tête
de la municipalité et dans la gestion des affaires de la
cité, du Consulat de Bonaparte à la
Monarchie de Juillet de Louis Philippe en passant par
le Premier Empire de Napoléon 1er, la Monarchie
de Louis XVIII, sans oublier les Cent Jours de 1815.
·
Le premier maire cité en 1800 est le notaire
Jean Yves Guillou, originaire de Guingamp, qui arrive à
Callac en 1779 où il épouse une fille Le Gouez, il
participe aux premières municipalités en 1790, est nommé
maire en 1800. Il décède en 1811 et est remplacé par Jérôme
Alexandre Guiot.
·
Ce dernier, également
notaire, est célibataire, fort capable mais de faible
constitution ; c’est
un personnage haut en couleurs issu d’une famille
originaire de Champagne. En effet, son père Nicolas, Maréchal
des Logis au régiment
Royal-Cravates
ou Croates en garnison à Châtelaudren en 1750 épouse une
fille Vauchel de Callac, puis au décès de cette dernière
une demoiselle Yvonne Bossard de Belle-Isle-en-Terre dont il
aura 17 enfants. Cette famille va marquer l’histoire de
Callac jusqu’à la fin du 19e siècle en
donnant quatre maires à la commune et en s’alliant avec
toutes les lignées représentatives de la région. Par sa
branche maternelle, les Bossard, Jérôme Alexandre était
un petit-cousin du célèbre général Jean Victor Moreau.
Jean Victor MOREAU, (Morlaix 1763-Lahn 1813)
Général de la Révolution et du Consulat
Jérôme Alexandre, d’abord avocat, législateur, puis
procureur fiscal et major de la garde nationale,
il fut
le seul représentant de la municipalité à la Fête de la
Fédération à Paris le 12 juillet 1790 et la petite
histoire l’affirme, il revint à pied de Paris à Callac
en trois semaines. Élu
député des Côtes du Nord au Conseil des Cinq-Cents en
l’an VI et VII, il devint membre du Conseil général par
arrêté du 12 prairial de l’An VIII. Nommé maire par le
préfet Jean Pierre Boullé
en 1808, son mandat dura de cette date à 1814,
l’année de sa disparition, il avait 54 ans. Le sous-préfet
de Guingamp parlait de lui comme d’un magistrat instruit,
intègre, et qui jouissait d’une confiance et d’une
estime bien méritée.
·
Le troisième
maire nommé par le nouveau Préfet, le Comte de Goyon, en
1814 s‘appelle Joseph Laurent Even,
notaire, personnage
fort contesté compromis dans l’Affaire Georges (1804) et
protégé par son parent M. de Cadignan. Également issu
d’une famille de notaires, son père Joseph fut Subdélégué
de l’Intendance sous l’Ancien Régime et second maire de
Callac avant 1789, le premier étant Nicolas Guiot. Malgré
son acquittement en 1804 et son exil de 10 ans à Bar-sur
Aube, il traîna toujours derrière lui sa renommée de
chouan. Joseph Laurent maria sa première fille, Cécile en
1823 à François Antoine Vistorte( de Boisléon) de
Guingamp, arpenteur de profession et fils du Président du
Tribunal civil de Guingamp. Son mandat prit fin en février
1828, date de son décès et en septembre de la même année
sa fille Danielle Caroline se mariait avec Pierre François
Huon, un notaire de Lannion. Les descendants Huon ajoutèrent
à leur patronyme celui de leur aïeule Penanster, ce fut
l’origine des Huon de Penanster, famille répertoriée de
fausse noblesse.
·
Yves Pierre Benoît
Lafargue ou de Lafargue suivant l’époque était
l’adjoint du précédent maire, d’abord greffier puis
notaire, il était issu d’une famille originaire du Gers
dont l’ancêtre s’établit au village de Maroux vers
1660 comme marchand de bois. Nommé maire une première fois
en 1828, il en fut démis aux évènements de Juillet 1830
et remplacé par Charles Desjars, puis à nouveau désigné
jusqu’en 1837, date de son décès. Il était resté célibataire
malgré une promesse de mariage non concrétisée par
opposition avec Marie Françoise Le Bonhomme à Plusquellec
en 1799.
·
Charles Desjars,
ex-notaire et riche négociant de Callac, le plus imposé en
1839 de la commune de Plusquellec, était originaire de
Pestivien. Il entra au conseil municipal en 1814 sous le
maire Joseph Laurent Even et
était adjoint du précédent maire, Yves Pierre Benoît
Lafargue. Cette charge ne le passionnait pas outre mesure,
très pris par son négoce, il démissionna l’année
suivante en 1838.
·
En 1839, est nommé
maire François Marie Fercoq, un cultivateur aisé et
instruit né à Plusquellec au village de Kerdiriou. Il sera
le magistrat de Callac pendant cette révolte de l’octroi,
un peu sous l’influence de son adjoint Pierre Marie Joret.
Ce personnage, originaire de Guingamp et étranger au pays,
marchand de fer et fabricant de cidre, est un homme actif,
entreprenant, il attaque tous les abus et se fait ainsi de
nombreux ennemis parmi la population ; ce qui est vérifié
dans le rapport qui suit, sa personne et sa maison subiront
de graves attaques par la foule déchaînée lors de la révolte.
Raisons
et prétextes de la révolte
Comme on
peut le voir dans la description des six maires ci-dessus,
une brève étude montre
que quatre de
ces magistrats sont allogènes et deux indigènes, Even et
Fercoq, quatre sont notaires, un négociant, ex-notaire,
Desjars et un cultivateur, Fercoq. La majorité de ces
magistrats, éloignée des problèmes dans une période où
les populations paysannes sont
de toutes parts exaspérées par la misère, la cherté
des grains et des bestiaux, vivait enfermée dans leur
petite ville. Le résultat était facile à prévoir et le
peuple avait annoncé hautement son intention de résister
par tous les moyens.
L’attitude rigide de l’adjoint au maire, Pierre Marie
Joret, soutenu par le juge de Paix Arthur Vistorte, et
Charles Desjars, tous trois guingampais, afin d’appliquer
son projet de l’octroi avait suscité, dans la ville même,
une opposition vive et certaine.
On peut également se remettre en mémoire, la dualité qui
avait existé en 1790 lorsque une rivalité avait surgi
entre les deux municipalités, Callac et Botmel, l’une
conduite par les gens de judicature de Callac et l’autre
par les paysans de Botmel.
« Rapport
sur l’émeute de Callac.
L’an mil huit cent quarante,
ce jour trente avril à trois heures du soir.
Nous substitut du procureur du
Roi près le Tribunal de Guingamp, informé par lettre
extraordinaire du brigadier de la gendarmerie de Callac
qu’une émeute populaire régnait au centre du bourg de
Callac depuis ce matin, nous sommes transportés au dit lieu
en exécution de notre réquisitoire en date de ce jour et
après avoir prévenu Monsieur Le Juge d’Instruction ainsi
que le prescrit l’article 32 du code d’instruction
criminelle, nous sommes partis en la compagnie de Monsieur
le sous-Préfet de l’arrondissement de Guingamp prévenu
ainsi que nous par un gendarme d’ordonnance, et enfin de
Monsieur le Lieutenant de gendarmerie de l’arrondissement
et de gens d’armes Jourdat, Groby et Le Lagatu requis de
nous assister et de nous prêter main forte, s’il y a
lieu, pour l’exécution de nos ordonnances.
Arrivé au dit lieu de Callac,
nous nous sommes dirigés
en compagnie des personnes ci-dessus désignées, vers la
caserne de la gendarmerie où nous avons invité de se
rendre Monsieur Le Maire de la commune, qui
n’ayant pas été rencontré, n’a pu être entendu par
nous. S’est aussi trouvé dans ce cas Monsieur Le Juge de
Paix
du canton de Callac qui s’était aujourd’hui absenté
pour affaires, et bientôt est arrivé Monsieur Pierre Joret,
adjoint au maire de la commune de Callac. Nous avons prié
ces magistrats de nous faire connaître les scènes de la
journée et les causes qui l’avaient provoquée, et les
principaux moteurs de la sédition. Des différents
renseignements puisés par nous auprès des autorités
locales, il résulte que vers les six heures du matin un
rassemblement qui semblait d’abord inoffensif s’est formé
sur la place principale de
Place
du Martroy,
appelée ainsi jusqu’en 1890
puis devenu par la suite place des Halles.
Callac; que le but de cette agitation populaire n’était
autre que d’empêcher de planter aux diverses entrées de
la ville les poteaux que l’autorité municipale avait fait
faire pour limiter et désigner l’octroi autorisé par
ordonnance royale dont la mise en exécution avait été fixée
par diverses publications au premier mai dix huit cent
quarante, que l’intention bien arrêtée des agitateurs était
de s’opposer, autant que possible à l’érection de ces
poteaux ; qu’en effet vers sept heures et demie, deux
hommes s’étant présentés sur la place avec un des
poteaux qui devait être placé à Sainte Barbe(chapelle),
furent suivi par la foule qui se composait de 30 à 40
personnes, criant et vociférant et exigeant qu’on leur
livrât le poteau, ce qui fut exécuté ; le poteau fut
jeté sur la place, on en
détacha l’écriteau que l’on brisa et la foule
grossissant toujours et de plus en plus animée, se porta au
domicile du sieur Marc Fleuriot, menuisier, chez lequel se
trouvaient les autres poteaux ; on brisa les croisées,
on enfonça la porte et l’on s’en alla avec les poteaux
qui furent portés sur la place et brisé à coup de hache
entre dix et onze heures.
Ce furent à peu près à cette
heure que fut expédié le gendarme d’ordonnance chargé
de dénoncer le fait à l’autorité supérieure ; les
agents de la force publique et les autorités locales
jugeant toute résistance impossible en présence d’une
foule de plusieurs centaines de personnes, laissèrent cette
irritation suivre son cours. Dans la crainte de plus grands
malheurs et dans l’espérance que cette effervescence
n’aurait que peu de durée. Cependant vers onze heures,
une bande se porta chez Alexandre Montfort, peintre, au
domicile duquel se trouvaient les enseignes du bureau de
l’octroi qui furent aussi enlevés de vive force, à peu
près à la même heure, une autre bande se dirigea vers la
maison de Monsieur Le Maire à deux kilomètres du bourg, en
criant qu’il fallait que ce magistrat se présentât
mort ou vif. On ne trouva point le maire et on se
retira paisiblement. Toute la soirée se passa sans trouble,
autre que les cris de rassemblements séditieux auxquels on
n’opposa aucune résistance.
Cependant depuis sept heures du
matin, on n’avait mis en branle les cloches de Callac et
celles de Botmel, ce qui faisait craindre l’irruption des
habitants des communes rurales environnantes et l’on vit
effectivement pendant toute la journée arriver des paysans
par bandes de 8 ou 10, la plupart sans armes. Entendant
sonner le tocsin et voyant que l’on ne cessait pas, les
gendarmes intervinrent pour éloigner les personnes qui
mettaient les cloches en branle ; mais à peine
avaient-ils tourné le dos que les agitateurs revenaient à
la charge et quand ils ne pouvaient monter par l’église,
ils le faisaient au moyen d’une échelle. Cet état de
chose dura jusqu’à notre arrivée et nous avons pu juger
nous même que la sédition régnait toujours, quoique le
nombre des émeutiers eut diminué ; car pendant que
nous étions occupés à la caserne de gendarmerie à
recueillir les faits ci-dessus consignés, nous avons
entendu le tocsin et sous les fenêtres de l’appartement où
nous étions passaient à chaque instant des troupes qui
vociféraient et manifestaient des intentions hostiles.
Après nous être concerté,
tant avec Monsieur Le sous-préfet qu’avec Messieurs
Pierre Joret et Arthur Vistorte, adjoint au maire et juge de
paix, nous avons cru nécessaire de ne faire aucune démonstration
à la foule irritée et nous nous sommes retirés chez le
sieur Chéné, aubergiste.
Les cris de l’émeute, les
bruits des bâtons, des fragments de bois et de pierres
l’on nous lançait de toute part, tout indiquait que les
esprits ne se calmaient point jusqu’à deux heures du
matin, les cris des perturbateurs parcourant la ville et
sonnait toujours le tocsin par intervalle, ne nous ont pas
permis de prendre du repos. De deux heures à quatre heures
du matin, le calme paraissait renaître ; mais ce n’était
que pour recommencer les scènes de la veille, car à six
heures du matin l’émeute était en pleine activité et
les abords de la ville gardée soigneusement par des gens
apostés.
A sept heures, nous nous sommes
transporté chez Monsieur le Juge de paix en compagnie de
Monsieur le sous-préfet et nous avons invité le sieur
Alexandre Le Roux,
à nous prêter son ministère, la situation du greffe du
tribunal de Guingamp ne nous ayant pas permis de mener avec
nous un greffier. Le sieur Le Roux a déféré à notre
invitation et après avoir préalablement prêté entre nos
mains le serment requis par la loi, il a, sous notre dictée,
dressé le présent procès-verbal qui a été rapporté en
présence des personnes sus désignés, lesquelles ont signé,
fors Monsieur le sous-préfet qui a adressé sur cette
affaire un rapport spécial à qui de droit.
A
sept heures, nous avons pu remarquer que la plupart des
campagnards mêlés aux rebelles étaient dans une attitude
hostile et armés de lourds bâtons et de fourches en fer.
Nous nous sommes mêlé aux groupes, nous avons cherché par
nos exhortations réitérées, à éclairer ces malheureux
et à les ramener dans la ligne du devoir. Monsieur le
sous-préfet s’est présenté à diverses reprises, revêtu
de son écharpe dans tous les lieux où l’irritation
paraissait la plus intense, haranguant les groupes en breton
et leur exposant chaleureusement les devoirs de bons
citoyens et les conséquences funestes de toute désobéissance
à la loi.
A toutes ces observations, ils ont constamment répondu
qu’ils n’obéiraient point à l’ordonnance relative à
l’octroi, parce que le droit d’octroi leur avait été
imposé qu’à l’aide de moyens subreptices. A cet
instant, nous avons aperçu dans la foule M. le maire qui de
son côté a fait de vains efforts pour apaiser le tumulte
qui allait toujours croissant. A neuf heures moins le quart,
les exigences de l’émeute se sont formulées plus
nettement ; on s’est rapproché de nous avec
agitation et plusieurs personnes nous ont déclaré que, si
nous ne signions pas à l’instant même, l’acte
d’abolition des droits d’octroi, ils étaient déterminés
à se porter à des violences extrêmes, que de grands
malheurs allaient arriver et qu’ils allaient mettre le feu
aux quatre coins de la ville.
Alors, Monsieur le sous-préfet a positivement déclaré
que l’émeute pouvait attenter aux jours des magistrats ;
mais que rien ne pouvait le faire dévier de la ligne de
leur devoir. L’effervescence n’a fait qu’augmenter et
bien qu’aucune voie de fait n’ait été exercée contre
la personne des magistrats qui étaient seulement l’objet
de démonstrations très hostiles, il était évident que
ces hommes acharnés étaient déterminés à en venir à
leur fin car ils se sont rués d’abord sur la maison de
monsieur Joret, adjoint au maire et en ont brisé les
carreaux et fracassé les volets, ensuite sur les gendarmes
dont la contenance énergique les exaspérait.
Deux des gendarmes ont été
poursuivis avec le plus d’insistance et même blessé,
l’un d’entre eux très grièvement à la tête ;
ainsi que nous l’avons remarqué, c’est le gendarme
Delanoé.
Il était alors neuf heures et demi environ et c’est à la
suite de cette scène que la foule s’est rejetée vers la
maison de Monsieur le Juge de paix dans laquelle nous
venions d’entrer et ont, à diverses reprises brisé les
carreaux et lancé de grosses pierres dans l’intérieur de
la maison.
Nous devons ajouter que M. le Lieutenant de
Gendarmerie nous a constamment protégé autant qu’il a dépendu
de lui et que voyant leurs camarades blessés et la caserne
sur le point d’être envahie, deux des gendarmes se sont
retournés vers la foule et ont mis en joue celui qui
paraissait l’auteur des blessures en le menaçant, au nom
de la loi, de faire feu s’il avançait avec ses complices
qui tentaient de s’emparer de la caserne. En ce moment
quelques conseillers municipaux ayant réclamé la réunion
du conseil comme une mesure urgente et la seule qui put
amener quelque quelque calme, M. le sous-préfet a autorisé
cette assemblée en faisant observer qu’il refusait d’y
assister et de signer la délibération.
Profitant d’un instant de
calme amené par cette réunion, chacune des autorités
d’est mêlé de nouveau aux divers groupes dans le but de
leur faire comprendre qu’il n’y avait que les voies légales
et régulières qui pussent amener le redressement des
griefs, s’il en existait et que toute violence ne pouvait
amener qu’un résultat contraire à leurs véritables intérêts.
Qu’au surplus le conseil allait manifester son opinion, et
qu’il fallait l’attendre tranquillement.
Tous les membres du conseil, à l’exception de
messieurs Quénec’hdu Pierre et Joseph, Fulgence Kersauson
et deux conseillers décédés, s’étant trouvé au lieu
de délibération, au bout d’une heure le résultat a été
connu et a produit sur la multitude des effets favorables au
rétablissement de l’ordre. Mais les turbulents s’étant
aperçu que M. Pierre Joret n’était pas au commencement
de la séance, se sont précipités vers sa maison qu’ils
ont cernée, y ont fait plusieurs dégradations ainsi
qu’au jardin qu’ils ont escaladé et l’ont réclamé
pour apposer sa signature à la délibération, ce qui a eu
lieu. M. le Maire et M. le Juge de Paix ayant reçu de la
foule la promesse qu’il ne serait fait aucun mal. M. le
sous-Préfet et M. le Maire ont fait dégager la porte de sa
maison pour lui en faciliter une sortie et l’on a entendu
des cris de joie, mêlé toute fois de menaces et de gestes
hostiles.
A peine le vœu
du conseil municipal a-t-il été manifesté, que les
habitants des communes rurales voisines se sont retirés et
trois quarts d’heure après, l’état des esprits était
satisfaisant. Le restant de la foule s’est apprêté à
allumer un feu de joie sur la place et sur la prière, à
lui faite, de mettre le feu aux fagots, s’y est
formellement refusé, disant qu la fête du Roi ne devait être
célébrée que dimanche et observant qu’on devait
s’abstenir de brûler les fragments des poteaux de
l’octroi déposés sur la place, ce que la foule a obtempéré
à la suite et comme de coutume les danses du premier mai
ont eu lieu sous les halles.
Dans cet état de choses et les esprits paraissant
enfin revenus à l’idée de devoir, nous nous sommes retirés
à la caserne de la gendarmerie à l’effet de rédiger le
présent procès verbal.
Parmi les faits qui ont signalé cette triste journée,
nous avons omis de constater que le sieur Courtois, notaire, étant
poursuivit par la foule, a été l’objet de voies de fait
très grave et que le sieur Daniel père, menuisier, étant
intervenu pour le protéger, a reçu à la tête une pierre
dont il a été blessé et qui a produit une effusion de
sang.
Les
citoyens de Callac, en général, ont fait de bienveillants
efforts pour ramener les
esprits en leur donnant l’exemple de calme et de la modération.
Et attendu qu’il nous serait impossible de désigner
précisément les provocateurs de ces désordres auxquels
ont pris part plus de 600 personnes et que tout les moyens
de répression serait actuellement impossible, nous avons
clos le présent sous nos seings et ceux de toutes les
personnes qui ont assisté à sa rédaction.
Fait et Clos à Callac à la caserne de gendarmerie,
ce jour premier mai mil huit cent quarante à deux heures du
soir.
Signent :
Alexandre Le Roux, François Marie Fercoq, Limon, Lt,
Arthur Vistorte, Barbier, Aulio, Bernhart, brigadier, Pierre
Joret, Tallbot, A. Lutz, Belin, Jourdat, Roullier.
Note
en marge du document :
« Le Procureur du Roi a
invité la gendarmerie à signaler, le plutôt possible au
Parquet, les noms de ceux qui se sont rendus coupables des délits
et crimes commis dans les deux jours d’émeute, et à
tarder à requérir des mandats et une information jusqu’à
décision de l’administration en ce qui touche le déploiement
des forces nécessaires dans l’état. »
Signé : Limon, Lieutenant
Joseph Lohou (mars 2005)
Notes
: Cet article a fait l'objet d'une parution dans le Cahier
du Poher N° 14 de juin 2005, pages 3 à 9.
Sources.
AD22- série 2 U- art. 614
Annexe n°1
État
de Services du sieur Pierre Jean DELANOÉ
Le sieur Pierre
Jean DELANOÉ, fils de Pierre et de Marie BOURGAULT, né
le 12 février 1787 à Hillion ( Côtes-du-Nord).
Taille :
1,710 m, cheveux et sourcils châtains, yeux bleus, front
haut, nez long, bouche moyenne, menton rond, visage ovale,
marqué de petite vérole.
Détails
des services
Entré au service comme conscrit, soldat au 11è bataillon
bis du Train d’Artillerie, passé au 3è Bataillon
de la même arme rentrant de prison de Russie, en novembre
1814, brigadier du 12 mai 1815, licencié le 26 septembre
de la même année.
Admis
gendarme à cheval le 19 octobre 1818 par ordre du
Ministre du 13 même mois.
Total
à ce jour : 30 ans et 19 jours.
Campagnes
et blessures
A
fait la campagne des années 1807-1808 à Hambourg, en
Prusse en 1809, en Russie en 1812 où il fut fait
prisonnier ; rentré en France en 1814, 1815 au
blocus de Strasbourg.
Titres
et Décorations
Chevalier
de l’Ordre Royal de la Légion d’Honneur par
ordonnance du 31 mai 1840 pour prendre rang à dater du même
jour. (N° d’ordre 133 23)
Procès verbal de Réception de la nomination de
Pierre Delanoé.