Callac-de-Bretagne

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L'affaire de l'octroi de Callac  

" Je ne puis m'empêcher de craindre que les hommes n'arrivent à ce point de regarder toute théorie nouvelle comme un péril, toute innovation comme un trouble fâcheux, tout un progrès social comme un premier pas vers une révolution, et qu'il refusent entièrement de se mouvoir de peur qu'on ne les entraîne "...

                                                La faiblesse des démocraties. Alexis de Tocqueville(1805-1859).

 

Droit dans la tradition paysanne, rebelle à tout nouvel impôt, l'histoire de l'émeute de Callac le 30 avril et le 1er mai 1840 semble aujourd'hui bien oubliée.

Et pourtant, il y a à peine 150 ans, elle souleva l'émoi de toute une région. Une émeute, en pleine monarchie de Juillet, sous Louis-Philippe et son ministre François Guizot, à l'époque du suffrage censitaire. On pourrait croire que la ré­pression brutale avait disparu avec l'Ancien Régime, s'il n'y avait, pour nous rappeler à l'ordre, ce sociodrame de Callac, qui jeta l'épouvante dans cette pe­tite ville. On sonne le tocsin, des villages voisins arrivent des foules de paysans bien décidés à faire front.

Est-ce une Jacquerie, telle que l'a décrit Boris Porchnev dans son ouvrage Les soulèvements populaires en France(1). On se trompe d'époque. Laissons plutôt le soin au commentateur, journaliste(2) de son état, nous décrire, non sans parti pris, ces événements:  

La place du Martray

 

"Depuis longtemps les revenus municipaux de la commune de Callac avaient été reconnus insuffisants pour faire face à ses besoins. L'autorité administrative supérieure regardait l'établissement d'un droit d'octroi comme le moyen le plus convenable de lui procurer les ressources nécessaires. le conseil municipal avait sous l'administration de Mr Desjars(3), alors son maire, pris plusieurs délibérations favorables à cet établissement. Mais elles étaient restées sans exécution par suite de l'opposition qu'elles rencontraient dans l'opinion personnelle de Mr Desjars. Ce dernier ayant donné sa démission, Mr Fercoq fut nommé maire et Mr Joret, 1er adjoint avec mission spéciale de s'occuper activement de la création de l'octroi.

Le 9 février 1839, le conseil municipal prit, à la simple majorité, une délibération favorable à cette innovation ;  la minorité y fit une opposition animée.

  Le 11 novembre 1839, une 2éme délibération prise à l'unanimité moins une voix, arrête le projet de tarif.

Le 8 mars 1840, intervint l'Ordonnan­ce Royale autorisant l'établissement d'octroi et des tarifs. Ces divers actes ­furent rendus public par l'impres­sion et l'affiche. La mise à exécution de cette ordonnance et le commande­ment de la perception furent fixés au 1er mai 1840.

Le 30 avril 1840, vers six heures du matin, Mr Joret, le 1er adjoint, se rendit chez le menuisier Flouriot pour y vérifier si les poteaux destinés à établir les limites de l'octroi étaient confectionnées. En sortant de son atelier, il trouva plusieurs femmes qui lui manifestèrent leur mécon­tentement de la création de cette nouvelle taxe et chercha vainement à leur prouver que leurs alarmes étaient sans fondement. Vers sept heures et demie du matin, le menuisier Flouriot et le peintre Montfort sortirent de l'atelier portant l'un des poteaux destinés à être placés sur la route de Callac à Botmel ; aus­sitôt un rassemblement de 50 à 60 per­sonnes, la plupart du sexe féminin, suivit leurs pas en murmurant. Ils étaient prêts d'atteindre le point où le poteau devait être planté, lorsque plusieurs membres du groupe hostile leur enlevèrent ce poteau et le rapportèrent avec des clameurs de triomphe sur la place publique de Callac, en face de la maison de l'adjoint Joret ;  puis, une partie du rassemblement se porta successivement dans les ateliers de Flouriot et de Montfort y enleva de force les autres poteaux et les enseignes de l'octroi qui y étaient déposés, puis vint les réunir sur la place au premier qui y avait été transporté et les brisa avec fureur à coups de hache. Bientôt quelques perturbateurs s'introduisant dans la chapelle Ste Catherine(6) et y sonnèrent le tocsin à diverses reprises, malgré les injonctions de la gendarmerie, sous les ordres du brigadier Henri Bernard et accompagné des gendarmes François Aullic, Anthoine Walbott et Mathurin Routier, trop faible en nombre pour opposer une résistance efficace à la foule animée.

  Cependant vers midi, le calme parut rétabli ; mais on appris qu'une estafette avait été envoyée par l'autorité à Guingamp afin d'informer le Sous ­Préfet et le procureur du Roi de cette ville des événements qui venaient de se passer ; et de nombreuses allées et venues chez des personnes connues pour leur vive opposition à l'établissement de l'octroi, annoncèrent que l'on se con­certait pour résister d'une manière sérieuse aux forces qui pouvaient sur­venir de l'extérieur pour assurer le lendemain l'exécution des actes de l'autorité publique.

Vers sept heures du soir, les rassemblements commencèrent à se reformer ; des sentinelles furent placées par les perturbateurs dans les voisinages des points où les poteaux devaient être placés, avec la consigne de donner l'alarme si l'autorité tentait de les y faire planter pendant la nuit. Vers neuf heures du soir, M. le Sous Préfet, le substitut du procureur du Roi et le Lieutenant de gendarmerie de Guingamp, Louis Barbier, accompagné du Juge de Paix de Callac, M. Vistorte et de six gendarmes de la brigade de Guingamp, arrivèrent après avoir pris la précaution de descendre de voiture avant d'entrer dans le bourg. Ils furent néanmoins reconnus par un groupe et des pierres, des morceaux de bois vinrent rouler à leur pieds et leurs annoncèrent les intentions hostiles de la foule rassemblée.

Ils se rendirent immédiatement à la caserne de gendarmerie pour délibérer sur les mesures à prendre, et jugèrent prudent d'attendre au lendemain pour arrêter un parti. Lorsque dix heures sonnèrent, un des perturbateurs s'écria que le moment de sonner le tocsin était arrivé, et aussitôt le rassemblement se porta vers la chapelle Ste Catherine dont les portes furent ouvertes, et le tocsin sonna à partir de cet instant, toute la nuit et pendant une partie de la matinée. Trois cabarets tenus par trois des plus ardents acteurs de la sédition, restèrent ouverts pendant cette même nuit et ne cessèrent d'être remplis de perturbateurs qui s'abreuvèrent à discrétion de vin et spiritueux. Le 1er mai au point du jour, deux des cabaretiers se rendirent avec deux autres habitants du bourg à Botmel, à l'église paroissiale, bâtie sur le sommet d'un coteau, s'emparèrent des clés de l'église et sonnèrent le tocsin pour avertir les populations avoisinantes de venir se joindre à celle du bourg.

Bientôt, les paysans des environs arrivèrent en foule, armés de bâtons, de fourches, de tranches. Vers quatre heures du matin, Mr Joret l'adjoint s'étant rendu à la maison commune pour y placer le drapeau tricolore, à l'occasion de la fête du Roi, passa au milieu d'un groupe et fut bousculé et pris à partie. Vers la même heure, toute les autorités étaient réunies dans la maison du Juge de Paix, M. Vistorte, située sur la place de Callac ; les groupes devenaient de plus en plus nombreux. Puis, vers six heures le Sous­ Préfet, qui parle l'idiome breton, et le substitut du Procureur du Roi parcoururent ces groupes, leur adressant de paternelles exhortations et les invitèrent vainement à se disperser. Ils persistèrent à manifester la ferme résolution de s'opposer à l'établissement de l'octroi. Alors le Sous-Préfet dépêcha une estafette à St Brieuc pour y réclamer l'envoi immédiat de forces militaires. A la nouvelle qui circula du départ de cette estafette, les rassemblements se grossirent rapidement et s'élevèrent à 1500 personnes environ. L'effervescence populaire devint de plus en plus vive et bruyante. L'agitation s'accrut et le Sous-Préfet ainsi que Mr le Substitut se réfugièrent sur le perron de la maison de Mr Vistorte, Juge de Paix. La foule les entourèrent et exigèrent la réunion du conseil municipal pour voter l'abolition de l'octroi. Le Sous Préfet tenta encore de les apaiser arguant de respecter l'Ordonnance Royale qui l'avait établi et sur l'impuissance du conseil municipal à révoquer celle-ci.

 

Les perturbateurs ne devenaient que plus exaltés et plus impétueux. Les gendarmes devinrent l'objet d'agressions simultanées, et sept d' entre eux furent frappés à coup de bâtons et de pierres. Le gendarme Delanoé(7), terrassé par un coup de bâton qui fit jaillir le sang d'une plaie grave à la tête, frappé à terre avec une cruauté féroce, parvint à rejoindre l'auberge où il était logé et fut poursuivi jusque dans l'escalier de sa chambre et ne fut sauvé que grâce à l'interven­tion des aubergistes. Une partie des gendarmes s'étaient réfugiée vers la caserne et menacèrent de faire feu sur leurs poursuivants. Au même moment, la maison de Mr Joret était assiégée, ses vitres brisées à coup de pierres, un des perturbateurs, armé d'un énorme pieu, monta sur le perron où se trouvait le Sous Préfet et lui déclara d'un ton véhément «Que si sous une demie heure, l'octroi n'était pas aboli, le feu serait mis aux quatre coins de Callac ".

Les autorités rentrèrent dans la maison de Mr Vistorte dont la porte fut fermée. La foule voulut forcer cette porte, des pierres pesantes furent lancées dans la croisée de cette maison. Plusieurs vitres furent brisées et l'un de ces projectiles faillit atteindre la fille de Mr Vistorte. Alors plusieurs habitants notables de Callac, dont Mr Guiot(8) percepteur, entrèrent chez Mr le Juge de Paix et invitèrent Mr le Sous Préfet à céder aux vœux de la foule en réunissant le conseil municipal pour éviter les plus grands malheurs. En raison de la gravité des circonstances, Mr le Sous Préfet crut devoir autoriser verbalement la réunion du conseil municipal, il déclara qu'il n'assisterait pas à cette séance et ne revêtirait pas la délibération de sa signature.

Les membres du conseil municipal au nombre de neuf seulement, se réunire à la maison commune, l'un d'eux, Mr Vistorte, juge de paix, en traversant la place fut injurié et menacé. La séance fut perturbée, des perturbateurs entrèrent dans la salle du conseil et refusèrent d'en sortir, assistèrent à la délibération, armés de bâtons et la menace à la bouche. Le sieur Guiot, percepteur, étranger au conseil, y fut présent et dicta la délibération qui arrêta la réélection du conseil en totalité et demande l'annulation de l'arrêté qui a créé les octrois et la révision du règlement de police qui sont reconnus pour être la cause du désordre présent.

Sur la remarque que le conseil municipal n'est pas au complet, plusieurs perturbateurs partirent à la recherche des conseillers manquants et non présents. Lecture de la délibération ayant été donné à la foule, celle-ci exigea à grands cris que Mr Joret qui n'était pas venu à la séance, fut forcé de se présenter et d'y apposer sa signature.

Le maire, ayant reçu la promesse que Mr Joret ne serait pas l'objet de leur violence, se décida à se rendre chez Mr Joret. Mais il trouva sa maison occupée par la foule. Il apprit que M.Joret et sa famille s'étaient réfugiés dans la maison voisine en escaladant le mur du jardin contigu et avaient ainsi échappé à la rage des assaillants. Il trouva Mr Joret et l'amena au conseil. Au moment où ils montaient l'escalier de la maison commune, ils reçurent chacun un coup de bâton. M. Joret, tout en protestant contre la violence à laquelle il était contraint de céder, signe l'acte. Puis deux autres conseillers requis de force également, Pierre Derrien et Maurice Le Barbier, signèrent.

Une seconde lecture fut faite à la foule qui poussa les cris de «Vive le Roi» . se dispersa. Bientôt elle voulut célébrer  son triomphe par un feu de joie à l'aide des poteaux de l'octroi, brisés la veille et invita le Sous- Préfet à l'honneur de l'allumer. Mais le Sous- Préfet les détourna de ce projet et la décida à attendre le dimanche suivant, jour fixé pour la célébration de la fête du Roi.

Elle se borna à se livrer aux danses, qui dans ce pays, consacrent chaque année le retour du mois de mai.

M. le Sous- Préfet et M. le Substitut rentrèrent à Guingamp pour y attendre l'arrivée des secours demandés à Sain Brieuc."

 

Suite de l'Affaire

  Dans la nuit du 3 au 4 mai 1840, la ville de Callac fut cernée par un détachement de troupe d'environ 400 hommes en provenance des garnisons de St Brieuc de Guingamp et de Morlaix, commandé par le Maréchal de Camp, commandant le département, assisté du capitaine, commandant la gendarmerie.

Personne ne put entrer dans la ville qu'avec l'autorisation de Mr le Préfet de Côtes-du-Nord.

Dix neuf mandats d'amener ont été immédiatement décernés contre les individus qui avaient pris la part la plus active à l'émeute et dix huit personnes ont été arrêtés sur le champ et dirigés sous bonne escorte vers Guingamp. La délibération prise par la terreur par l'administration municipale dans la journée du 1er  mai a été annulée. Les poteaux de l'octroi, brisés par la foule sont rétablis et toute les précautions sont prises pour qu' aujourd'hui, jour de marché, force reste à la loi.

  Commentaires extraits du dossier de justice(9)

  Les 25 accusés dans l'émeute de Callac du 30 avril et du 1er  mai 1840 traduits devant les Assises des Côtes-du-Nord du 3ème trimestre, ont tous été acquittés le 30 juillet 1840.

Et cela, malgré l'éloquent réquisitoire du Ministère Public, qui demandait la culpabilité certaine de plusieurs d'entre eux et notamment celle de Jacques Magoariec, comme ayant manqué délit (?) le gendarme Delanoé de la brigade de Belle-Isle.

Cet acquittement est très fâcheux, pour ne pas dire plus, en ce qu'il paraîtrait constant que la majorité des jurés en trouvant les prévenus non coupables, aurait eu pour but de prouver que le peuple est opposé aux droits d'octroi.

Il est à présumer que pour toute autre cause, il y aurait eu des condamnations. Sur les dix-huit accusés, dans cette même affaire, traduit en police correctionnelle, treize ont été condamnés le 3 juillet par le tribunal de Guingamp, à un mois de prison et dix francs d'amende, deux à quinze jours de prison et dix francs d'amende, un à seize francs d'amende et un acquitté.

  Déclaration du préfet des Côtes-du-Nord aux habitants de Callac(10)

  "A la demande de la commune, une Ordonnance Royale a autorisé l'établissement d'un octroi à Callac ; cet octroi sera rétabli.

La délibération prise le 1er mai par le Conseil Municipal sous la menace des plus violents excès, est nulle.

L'émeute ne triomphera pas, elle n'a rien à demander, rien à obtenir.

De l'émeute, il ne peut naître que des désastres.

L'émeute ne triomphera jamais; car si des bataillons étaient insuffisants elle rencontrerait une armée.

Depuis dix ans que je vous appartiens, pas un seul jour, pas un seul instant de désordre, j'en étais fier pour ce département.

Et voilà que Callac vient de sonner le tocsin de la révolte contre un droit légalement établi et sollicité.

Les magistrats de l'arrondissement sont accourus et n'ont pas été écoutés.

  Des concitoyens que vous aimez et qui vous sont montrés hommes de cœur et de dévouement ont été l'objet d'atroces menaces. La propriété a été menacée. Quel est donc l'aveuglement qui a entraîné à de si criminels excès une partie de votre population? Il faut qu'elle ait été méchamment abusée.

  Le droit sera perçu aujourd'hui même, que chacun de vous calcule ce qu'il aura à payer et qu'il compare cette charge avec celle dont il se croyait menacé.

  BRETONS, si vous avez le cœur droit et l'esprit juste, vous aurez bientôt apprécié la valeur des mensonges par lesquels on vous a excités.

  Ayez confiance dans la voix de votre magistrat devenu Breton lui-même depuis dix ans qu'il est avec vous. Soyez calmes.

Si je pouvais m'adresser à vous comme à un seul homme, vous me répondriez en engageant votre foi et la force publique se retirerait aussitôt.

  Nous ne le pouvons, ni vous, ni moi; il faut qu'elle reste encore. Faîtes, du moins, dans votre intérêt propre, dans l'intérêt de tout le pays qui a besoin de sécurité, et pour l'honneur de Callac, que cette occupation militaire puisse cesser bientôt.

  A Callac le 6 mai 1840

Le Préfet: THIEULLEN

  Rapport circonstancier de la Ve légion de gendarmerie en date du 6juin 1840(11)

Notions sur les faits

Le 30 Avril et le 1er Mai 1840, une émeute a eu lieu dans la commune de Callac à l'occasion du placement des poteaux pour la perception d'un octroi légalement établi. Le rapport de monsieur le Lieutenant de gendarmerie du 2 Mai mentionnant la belle conduite de la gendarmerie et constatant que les autorités qui étaient accourues sur le rapport du brigadier de Callac accompagnés de Monsieur le Lieutenant de gendarmerie et de quelques gendarmes pour rétablir l'ordre ont été obligés de se retirer, n'étant pas en force pour l' exécution de la loi.

Le 6 mai, rapport de Monsieur le Capitaine annonçant que le 4 mai, Monsieur le Préfet et Monsieur le Général commandant le département sont arrivés à Callac avec des forces importantes, qu'on est entré dans cette ville sans résistance, que force est resté à la loi, sans aucun malheur à déplorer; que le 6 mai, jour de marché de Callac, les poteaux ont été remplacés et les droits perçus sans murmures; que la cour royale de Rennes ayant évoqué l'affaire, ce même jour est arrivé Monsieur le Premier avocat général, un conseiller et le greffier de la cour.

Les autorités supérieures réunies à Callac ont témoigné leur entière satisfaction à Monsieur le Capitaine, commandant la gendarmerie, sur le bon service de la gendarmerie dans cette circonstance.

Le nombre des arrestations, par suite de l'instruction, a été de 32, il y a eu 10 mises en liberté. Des mandats d'arrêts ont été délivrés contre deux individus qui n'ont pu être arrêtés.

  La Chambre d'Accusation de Rennes a déjà pronommé(?) les individus qui doivent être jugés en police correctionnelle au Tribunal de Guingamp, ainsi que deux qui doivent être jugés en juillet aux Assises de Côtes-du-Nord.

  Observations du Colonel JOUVE, chef de la 5e Légion.

  Les troubles dont les détails sont donnés ci-dessus et l'ont été par des rapports spéciaux, ont donné l'occasion aux autorités et principalement à le gendarmerie, de se distinguer par leur zèle, la prudence et toute l'intelligence. Aussi Monsieur le Ministre de la Guerre a-t-il bien voulu reconnaître la belle conduite de plusieurs sous-officiers et gendarmes en faisant accorder à l'un la croix de la Légion d'Honneur et à d'autres des gratifications.

  La bonne issue ou plutôt la répression sévère qui a suivi ces évènements a été imposé aux populations qui menaçaient aussi de se mettre en rébellions contre les lois et à troubler l'ordre public.

 

A Rennes le 6 juin 1840

 

Signé : JOUVE

 

Listes des citoyens de Callac arrêtés et emprisonnés en mai 1840(12)

 

Prénoms

Noms

Professions

Jeanne Renée

Corgat

Marchande

Marie Claude

Le Guerre

Aubergiste (Duault)

Fanny

Le Gallou

Aubergiste

Gabriel

Le Philippe

Marchand

Julien

Le Borgne

Maçon (Duault)

Jean Marie

Le Pape

Meunier

François

Le Morvan

Cultivateur (Scrignac)

Julien

Huitorel

Ancien

Marie Louise

Caignard

aubergiste

Jacques

Le Roux

Fournier

Joseph

Le Goff

Aubergiste

Pierre

Le Roux

tailleur

Bertrand

Richaud

Officier de santé

François

Le Graet

Boucher

Françoise

Le Graet

Bouchère

François

Le Bihan

Menuisier

François

Le Borgne

Maçon

Jacques

Magoariec

laboureur

Cécile

Nédélec

Ménagère

Nicolas

Le Dantec

Tisserand

François Marie

Rinquin

Laboureur

Jean

Le Caignard

Laboureur

Jean

Le Bricon

Laboureur

Bertrand

Le Ruven

Laboureur

Yves

Le Gouge

Charpentier

Marie Jeanne

Le Graet

bouchère

Guillaume

Huitorel

Aubergiste

Louis

Champagné

Tailleur d'habits(Plusquellec)

Madeleine

Richault

Aubergiste

Marie Anne

Derrien

Tisserande

Marie Yvonne

Le Sauze

Aubergiste

Marie Anne

Le Sauze

Aubergiste

Louise

Le Turquis

Domestique

Marie Françoise

Le Stangalen

Ménagère

Marie Yvonne

Le Fessant

Lingère

Jeanne

Le Graet

Mendiante

Hervé

Le Coz

Laboureur

Guillaume

Prigent

Manœuvre(Maël-Pestivien)

Yves

Le Roux

Cordonnier

Emile

Daniel

Cordonnier(Rennes)

Yves

Le Deuff

Journalier(Tréguier)

Hervé

Le Guilloux

Laboureur

Louis

Le Bonhomme

Aubergiste

Jean

Le Caignard

Laboureur

Louis

Le Bon

laboureur

Claude

Le Bastard

Ménagère

François

Le Ruven

Laboureur

Joseph

Le Bon

Maquignon

(?)

La Piété

Bouchère

Pierre Louis

Guiot

Percepteur

Jean

Coulouarn

Laboureur(Carnoët)

Guillemette

Dourgam

Laboureur

Corentine

Le Bastard

Ménagère

Jean

Le Bastard

Aubergiste

  Annulation de la délibération du 1er mai (13)  

Affiche placardée à Callac le 9 mai 1840

Texte de l'affiche :

"A l'occasion de l'établissement d'un droit d'octroi légalement demandé et obtenu par, la commune de Callac, des désordres graves ont éclaté dans ce chef-lieu de canton. Le tocsin de la révolte a sonné !

Des forces imposantes y sont arrivées de divers points dans la nuit du 3 au 4 mai. Le préfet, le maréchal de camp commandant le département,  le sous-préfet de Guingamp, le substitut du procureur du roi, le juge d'instruction, le capitaine de la gendarmerie y arrivaient en même temps.     

Toute l'agglomération de Callac fut aussitôt occupée et cernée. Deux heures après, en vertu des mandats d'amener délivrés 19 des principaux coupables étaient arrêtés. ­Interrogés le même jour, le lendemain ils étaient écroués dans la prison de Guingamp.

    L'émeute était alors suspendue, car elle avait cru à son triomphe. Le mercredi 6 mai,  jour du marché de Callac, en présence d'une foule nombreuse. la loi si déplorablement outragée,  recevait une publique réparation et ressaisissait toute sa puis­sance. Les poteaux-limites étaient placés, et l'octroi définitivement constitué.   

Nous n'avons pas eu même à nous affliger d'un murmure, et lorsque le préfet et le sous-­préfet ont lu successivement en français, et en' breton la proclamation suivante,  dont plusieurs exemplaires ont été ensuite affichés, un cri général et trois fois répété a répondu au cri de" Vive le Roi "!

La population avait été indignement trompée par les bruits les plus mensongers. Elle ­le sait actuellement  Elle déplore les excès commis. Et ses magistrats se plaisent à déclarer qu'ils ont foi en elle.    Cependant l'information va se poursuivre activement. La cour royale a évoqué l'affaire. Dès le 6 au matin, M. le procureur général, un conseiller et le greffier en chef étaient arrivés à Callac où ils resteront probablement plusieurs jours, et déjà de nouvelles arrestations sont   opérées.           

Si des rumeurs contraires à cet exposé venaient à se répandre, elles seraient fausses, et l'œuvre de cette malveillance dont les manœuvres sont toujours calculées de manière à faire des victimes en se tenant à l'abri. L'ordre est affermi à Callac et dans toutes les communes voisines. - Force est demeurée à la loi, en face de tous. Aucune espèce de conces­sion n'a été faite à l'émeute.  L'octroi est établi et le droit perçu. Les arrestations ont été opérées sans résistance. La justice seule a désormais à intervenir.

Et les passions politiques sont tellement étrangères à ces excès, que le dimanche 3 mai, jour consacré à la célébration de la fête du Roi, les habitants allumaient un feu de joie sur la place publique de Callac.                  .     .                  '.

       Le préfet et le général commandant le département sont rentrés à Saint-Brieuc, après avoir pris toutes les dispositions nécessaires.          .           .

                           La troupe, notre belle gendarmerie, des cavaliers du train, soumis à de rudes fatigues ont été comme toujours admirables de discipline et de dévouement, et la population a dû être fortement frappée de l'habile direction par laquelle cette force armée était pour ainsi dire comme mêlée au milieu .d'elle, alors même qu'elle demeurait constamment maîtresse des 1 positions et gardait tout et partout.  

 

Voici la proclamation du préfet Thieullen en langue bretonne.
Le traducteur ne nous est pas connu mais son breton est
un peu primaire, parsemé de termes  proches du français.
Un texte  qui ne ferait pas l'unanimité parmi les élèves contemporains
d'une classe de "Diwan" !
(AD22- cote 1M art.334)


  Vu les lois des 21 mars et 18 juillet 1837 sur l'organisation et l'administration municipales.

Considérant que la réunion du conseil n'a pas eu lieu, en vertu d'une autorisation officielle précisant et limitant l'objet de la délibération; qu'elle n'a été verbalement consentie qu'en vue d'opposer à l'effervescence populaire le concours unanime des plus notables citoyens que l'élection avait préposés à la garde des lois...

Considérant que la délibération intervenue a été imposée par la révolte, odieusement armée contre les lois, et qu'elle ne présente aucun caractère légal; que des membres du conseil ont été, pour ainsi dire, arraché de leur domicile; et violemment contraint d'y donner leur signature, que le vote a été recueilli, ou plutôt dicté en présence et sous les menaces d'une foule furieuse, qui avait envahi la salle des séances, et qu'ainsi a été formellement violé l'article 29 de la loi du 18 juillet 1837 sus visée.

  Le conseil de préfecture entendu, arrête:

Art. 1er  La délibération du conseil municipal du 1er  mai 1840 est déclarée nulle.

  Art. 2: Le présent arrêté sera transcrit sur le registre des délibérations de la commune.

  Art. 3: M. le s/préfet de Guingamp et M. le maire de Callac sont chargés de l'exécution du présent.

  En préfecture à St Brieuc le 9 mai 1840. Signé.. Thieulle

Pour le maire de Callac  L'adjoint- délégué.. P.M. Joret

 

Joseph LOHOU.

Mise à jour(16 février 2010)

 

 

Cet article est paru dans la revue "Pays d'Argoat" n° 15 du  1er semestre 1991.

 

NOTES et Bibliographies

 

1-Boris Porchnev, Les soulèvements populaires en France de 1623 à 1648.

Ecole pratique des Hautes Etudes, Paris, 1963.

2- Journaux: Le Français de l'Ouest. bibliothèque municipale de Saint-Brieuc, cote : Per60, premier journal politique de Saint-Brieuc (1840); les comptes rendus de cette affaire ont été publiés dans les n° 7, 11, 19, 24, 28, 29, 30, 31 entre le samedi 9 mai et le samedi 1er août 1840.

 Le Publicateur des Côtes-du-Nord, bibliothèque municipale de Saint ­Brieuc, cote: Per 58. Les articles de ces journaux sont publiés in extenso sans correction.

3- Charles Desjars (Pestivien, 1773), notaire et négociant, fils de René et d'Anne Hervé, nommé maire de Callac le 19/10/1830 en remplacement de M. Pierre- Benoît Delafargue, dont les idées sont contraires au gouvernement.

4-François-Marie Fercoq, cultivateur, nommé maire le 17/02/1839 en remplacement de M. Charles Desjars, démissionnaire.

5-Pierre-Marie Joret (Guingamp-° 1780), marchand de fers et fabricant de cidre, nommé premier adjoint/08/1837, sous le mandat de M. Desjars.

6- La chapelle Sainte-Catherine était située sur la place Martray devenue par la suite place du Centre.

(notice du Syndicat d'initiative de Callac, Dr Edmond Rébillé).

7 Le gendarme Delanoé (Hillion, 1787), blessé gravement au cours de l'émeute, fut décoré plus tard de la croix de chevalier de la Légion d'honneur.

(Procès-verbal de réception n°l3 323 du 10/06/1840. Caran, dossier LH 701.)

8- M. Pierre- Laurent Guiot (Botmel, 1778), ex-percepteur et marchand de vin, fils de Nicolas et de Marie Yvonne Bossard. Les Guiot, originaires de Chalons en Champagne, sont arrivés à Callac en 1750 (Nicolas Guiot, ex-maréchal des logis 1X Demoiselle Louise Vauchel à Botmel 13/01/1750 et 2X Marie Yvonne Bossard à Belle-Isle –en-Terre 20 novembre 1755).

9 Dossier de justice, Archives nationales. Caran, cote: bb/18/1383 microfilm-n°255 ;

Archives départementales Saint-Brieuc, cote: 2U614, Assises des Côtes-du-Nord.

10 Déclaration du préfet des Côtes-du-Nord parue dans les journaux locaux. Elle fut affichée à la maison commune de Callac.

11- Dossier de police, ministère de l'Intérieur, Archives nationales. Caran, cote: Fn /3974, année 1840.

12- Dossier de police, op.cit. note 11

13 Registre des délibérations du conseil municipal

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