Callac-de-Bretagne

Page Retour

        Un récit plein d'humour où l'on mesure la puissance d'un grand seigneur qui ne veut pas avoir de surprise lorsqu'il se rend à Carhaix pour ses affaires. On sourit lorsque le texte parle de paille fraîche, de feu de charbon sans fumée ou bien de vaisselle de bois de fresne(frêne).
Quelques remarques également sur les menus : oignons, pain de froment, choux, navets et moutarde, viande de porc avec sauce verte poivré, chapons et gelines ou gelinottes, vin et fromage à volonté, vraiment un menu suffisant pour rassasier une compagnie de cavaliers affamés.

                             






                                       LE DEVOIR DE MANGER

                              OU UNE TABLE BIEN PRÉPARÉE

 

 

            Reconnaissance faite le 17 de février de l'an 1554 par Jean Raoul, seigneur de Kerviou et de  Kerjacob et voyer[1] de Kerahès(Carhaix) et demeurant au manoir de Kerviou au profit de Noble et Puissant  François de Quelen, seigneur de Quelen, du Vieux Chastel, de Plounévez-Quintin, de Quistivien et Kerasnou, sçavoir d'un devoir de manger que le dit Jean Raoul devait au sire de Quelen, lui et 24 chevaliers ou autres lieutenants pour les dits chevaliers auxquels le dit manger devait valoir dîner entre Noël et Caresme prenant en la ville de Kerahès dans une belle salle convenable où il y aurait une cheminée et un beau feu de charbon sans fumée, la dite salle suffisamment jonchée de paille, devait le dit seigneur de Kerviou, voyer aller  hors de la maison    avec une torche de cire suffisamment allumée, recevoir les dits chevaliers et les conduire toujours avec la dite torche jusque dans la salle où il devait leur donner à laver et à essuyer  leurs mains dans de la toile blanche, tenant toujours la torche allumée, plus il devait leur servir à manger sur de belles tables hautes abrichées de blanches toiles et nappes comme appartenant  aux chevaliers.

 

            Plus, il devait mettre du sel et des oignons sur les dites tables adoublées de cire allumée en  suffisance devant chacun d'eux. Plus, il devait donner du bon pain de froment suffisant pour les chevaliers et du meilleur vin qui serait en taverne noueux bouteillé. Plus, trois mets de cuisine suffisant pour chaque chevalier, sçavoir: un mets pour chaque écuelle de porc salé avec des choux ou des navets et de la moutarde, un autre mets pour chaque écuelle de chair fraîche de porc avec une sauce verte poivré et pour autre mets un chapon ou geline lardée couronnée pour chaque écuelle et des oignons blancs suffisamment sur chaque table avec le rôti.

 

            Plus, les dits chevaliers devaient être servis en vaisselle neuve de fresne et il devait être donné du fromage suffisamment en chaque écuelle.

      Le dit voyer ne pouvant changer les mets, ni les desservir de dessus les tables sans le congé du sieur de Quelen ou de son commis, ni mesme ôter les tables, à la sortie desquelles il devait leur donner à laver avec de la toile blanche et après qu'ils auraient lavé, donner à boire à chaque personne, la torche de cire allumée et les reconduire avec la torche allumée jusqu’à la rue et s'il manquait à quelques-uns uns de tous ces  points, chaque faute par lui commis était amendable de quinze livres.

 

            Cet acte reçu par les notaires de Kerahès et à la suite est l'acceptation faite de la reconnaissance le onze de février de l'an 1569 par Noble Homme Guillaume de Brandin, procureur de Noble et Puissant René de Quelen, seigneur de Kerocran et curateur de Noble et Puissante Demoiselle Louise de Quelen, dame du Vieux Chastel, de Quelen, Quistivien , reçu en faveur de Noble Homme Jean Raoul, seigneur de Kerviou auquel le dit tuteur remet le devoir de manger pour l'année courante, le dit acte reçu par les notaires et à la suite est une mention faite par Grégoire de Quelen au mois d'août 1623 portant que le Baron du Vieux Chastel lui avait envoyé la copie.

 

Copie en papier informe mais curieuse du 17 février 1554.

Sources.
Bibliothèque Nationale. Titres de Quelen-Vieuxchastel.Carré d'Hozier cote 520.

                                                                  J.Lohou(février 2006-24.octobre 2012)

 

  Notes.
[1]  Voyer - Officier chargé, autrefois, de la police des chemins et des rues. Les agents de l'autorité royale qui ont la charge de la justice et des impôts ont un rôle ingrat, qu'ils rendent encore plus ingrat par leur brutalité et par leurs excès. Les forestiers et les voyers sont la terreur du paysan (FARAL, Vie temps st Louis, 1942, p. 92).



Dans un N°(?).. de la Société d'Émulation des Côtes-du-Nord,

 Monsieur Arthur de la Borderie apporte, au sujet de cet article, une forme d'écriture plus moderne qui enjolive légèrement le récit sans en modifier le fond...

Bonne lecture...







© Tous Droits Réservés (Joseph Lohou)