Callac-de-Bretagne

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Joseph Marie Le Bouedec.


Paris est encerclée par les troupes prussiennes. Le gouvernement s'est réfugié à Tours. Impossible de franchir les lignes ennemies qui contrôlent toutes les routes et les voies navigables. Seule solution pour garder le contact : utiliser les ballons et montgolfières. 69 engins de ce type s'envoleront de fin septembre 1870 à fin janvier 1871. Portant dans leurs nacelles du matériel mais aussi des missives relatives à l'administration et à la sécurité du territoire.
 Le 25 octobre, deux Bretons vont participer à ce premier pont aérien de l'histoire. lle s'agit du matelot Hervé Séné, recruté pour ses connaissances de la navigation, et le commandant Joseph-Marie Le Bouédec, qui a pour mission de prendre le commandement des troupes de province et de desserrer l'étau prussien. Ils prennent place dans la nacelle aux côtés du colonel Delapierre.
À 8 h 30, leur ballon, le » Montgolfier », s'élève au-dessus de la gare d'Orléans. Deux heures plus tard, les trois hommes tentent un atterrissage à l'approche de Verdun. Ils sont accueillis par des tirs de soldats prussiens et lâchent un maximum de lest pour échapper aux balles. Tout y passe, même certains sacs de courrier. Mais considérablement allégé, le ballon ne cesse de monter. « Nous avions l'impression que nos oreilles allaient éclater et croyions que notre dernière heure était venue », écrira plus tard le commandant Le Bouédec. « Nous avons la certitude que, ce jour-là, leur ballon a atteint entre 3.000 et 5.000 m d'altitude » précise David Alfort (ci-dessus, à gauche), président de la section Haut Rhin-Territoire de Belfort de l'Association des officiers de réserve de la Marine, en charge de l'organisation de la cérémonie de samedi.
Peu après midi, l'équipage réussit à poser son ballon en zone montagneuse. À proximité d'Heiligenberg, charmant petit village alsacien situé à 370 km de leur point de départ ! Il faut faire vite car les Prussiens ont repéré le ballon. Les habitants cachent la nacelle et la toile. Les trois occupants, eux, prennent la fuite, habillés en bûcherons pour passer inaperçus. Les Prussiens fouillent partout. Ils sont furieux et menacent de tuer le maire et de détruire le village. Le versement d'une rançon de 10:000 francs évitera ce désastre.
Retrouver des descendants : Séné, Le Bouédec et Delapierre traverseront les Vosges pour rejoindre les troupes françaises. Soit 160 km parcourus en seulement quatre jours.
Par la suite, Delapierre sera nommé général instructeur au camp de Saint-Omer. Le Bouédec se verra confier le commandement du tristement célèbre camp de Conlie, dans la Sarthe. Le matelot Séné, lui, rejoindra la seconde armée de la Loire comme aérostier.
« Nous avons pas mal d'éléments sur Le Bouédec, poursuit David Alfort. Nous savons qu'il est né le 5 janvier 1829 à Pontrieux (22), qu'il a habité à Plounévez-Moëdec (22). Il avait deux filles, toutes deux enseignantes : Jeanne-Yvonne Henriette et Marie-Thérèse qui s'est mariée à un certain Gustave Lacroix. Notre souhait le plus cher serait d'être un jour mis en contact avec des descendants ». Quant à Hervé Séné (ou Sané selon certains documents), l'Association des officiers de réserve n'a que très peu d'éléments sur lui. «À 90 %, on est sûr qu'il était breton. Car il appartenait au neuvième bataillon marin de Lorient à qui on avait confié la défense du fort de Bicêtre. Nous savons aussi qu'il a reçu la médaille militaire en 1871. Nous avons contacté la chancellerie de la Légion d'honneur. Elle nous a appris que les documents d'époque avaient été brûlés lors d'un incendie. En revanche, nous avons en notre possession une photo de lui ».
Les honneurs 143 ans après.
Samedi prochain, 143 ans après ce périple aérien mouvementé, les honneurs militaires seront rendus aux apprentis aérostiers dans le village d'Heiligenberg. Aux côtés des différentes délégations militaires, sera présent Philippe Foubert, le descendant d'Eugène Godard, le constructeur du solide » Montgolfier » qui a rallié Paris à l'Alsace à plus de 100 km/h de moyenne !

DIDIER DÉNIEL
Contact : David Alfort, tél. 06.85:73.40.35.


SOURCES.
"Le Télégramme" du 22 octobre 2013.