Callac-de-Bretagne

 

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L’église de Botmel  


Ruines de Botmel de nos jours


Dessin de Pierre Gérot pour le bulletin paroissial de 1914


Ruines de Botmel vers 1920


Armes des seigneurs de Ploesquellec
"D"argent à trois chevrons de gueules"
"Alias : Brisé d'un lambel d'azur"
Devise : "Autre ne vueil"


St Baumaël devant son ermitage
(Détail du vitrail de l'église de Callac)


Bulletin paroissial de Callac en 1914

 eglise
Dessin de Jean Guillotin en 1932


Photo récente des ruines de Botmel


Sculpture sur bois de Jo. Corio(1940)

 

           
A une époque difficile à déterminer, un saint anachorète, c’est à dire un religieux vivant seul dans un endroit retiré, du nom de Baumel construisit son ermitage à cet endroit. Il partageait son temps entre la prière, la méditation et l’évangélisation des habitants du pays. Un vitrail de l’église actuelle le montre en prière près de son ermitage. Il fit bâtir une petite chapelle où était honorée la Sainte Vierge. Plus tard, cette chapelle qui devait être modeste fut remplacée au XIVe siècle par un monument plus vaste dédié à la Vierge Marie, sous le vocable de Notre Dame de Bomel. On trouve déjà ce lieu sous le nom de Botnumel au IX° siècle, puis Bonvel en 1778 et Botmel enfin dans les registres paroissiaux. Celle-ci était depuis le Moyen-Age, une trêve ou fillette de la paroisse mère de Plusquellec. Autrefois église paroissiale, elle fut reconstruite en majeure partie aux XVII° et XVIII° siècles. L’abside fut édifié en 1628, la tour en 1633-1634 par Louis Le Goaziou, picoteur de pierres à Callac car elle menaçait ruine. En 1637, une visite effectuée par les autorités, constate en effet l'état général précaire de l'église et prenne la décision d'y apporter remède dans les plus brefs délais. C’est de cette époque que date le joli campanile qui la surmonte. Deux des chapelles donnant sur la longère nord furent édifiées en 1644 après expertise par Le Gonidec et Jehan Calvez, maîtres picoteurs. En 1664, la fabrique et le sénéchal de la Juridiction, invitent le Maître vitrier Pierre Desportes de Carhaix à une visite de l'église, ainsi qu'à une inspection des vitraux.   En 1734, sur les plans de l’architecte Duchemin, on construisit le transept. L’église comprenait à cette époque, une nef avec des bas-côtés de 9 travées, un clocher-mur, un transept et un chœur. Pendant la Révolution, l'église servit à la fabrication du salpêtre et subit par là-même, de nombreuses détériorations. C'est la raison pour laquelle qu'en 1826, le curé en place, Placide Guillermic adressa une lettre à l'évêque de Saint-Brieuc dans laquelle il demandait une subvention destinée à reconstruire les deux autels détruits lors des évènements de la Révolution. Vers 1863, il ne subsistait qu’une fenêtre du XIVsiècle L’église fut partiellement démolie vers les années 1880,  après la construction de celle de Callac, décidée le premier février 1868. et terminée en 1879. Il ne reste à l’heure actuelle que la tour et les trois arcades, classée monument historique et inscrite sur l'inventaire supplémentaire le 1er  Janvier 1927. Faisons donc le tour de ces ruines. Voici le porche surmontée d’une niche, où se trouvait autrefois la statue de Notre Dame de Botmel. 


Statue polychrome de Notre Dame de Botmel.
(Église St Laurent de Callac) 

Ce porche est flanqué d’accolades affectant la forme de colonnettes du plus gracieux effet ; au-dessus rampent des crochets délicatement fouillés, et en haut, juste en dessous de la niche, se trouve un joli fleuron. Ce porche d’un dessin sobre et hardi, est surmonté d’une balustrade au-dessous de laquelle on  remarque un grande pierre portant une inscription. A droite du porche se trouvent deux tourelles, l’une à hauteur de la balustrade, par où l’on accède sur cette dernière, l’autre, plus basse, dont on remarque le pignon surmonté d’un chien sculpté. Un escalier en colimaçon se trouve à l’intérieur de ces deux tourelles , il donne accès sur la balustrade d'où l'on jouit d'un merveilleux spectacle.                                                                                                         
  L’église de Botmel était d’un style sobre, à peine quelques pierres sculptées, gargouilles et autres figures, ce qui d’ailleurs n’enlevait rien à son charme. Des deux cloches qui se trouvaient autrefois dans la tour, l'une appelée "Charlotte" en l'honneur de sa marraine Charlotte de la Boissière et son parrain Allain Huon, sieur de Kermédan, baptisée en 1644, se trouve dans la tour de l'église de Callac. La seconde, se trouve également dans de l’église de Callac, où après 90 ans de service, elle fut descendue lors de l'électrification des cloches dans les années 1960. Cette petite cloche que l'on  sonnait la veille et le jour de la fête de Saint Laurent, d'ou son nom " Cloche de Saint Laurent, elle fut baptisée en 1434 et                                                                  
            Il en est de même de la statue de Notre  Dame de Botmel, très ancienne et très curieuse, qui se trouve dans l’église de Callac. Elle a les bras en croix et tout dans son attitude semble indiquer qu’elle s’élève. Autrefois lors des grands pardons, on revêtait cette statue d’habits somptueux : tunique blanche richement brodée avec un voile bleu piqué d'étoiles d'or. On entourait la niche de feuillages et de guirlandes de verdures. Voici par un témoin oculaire, l’abbé David, une description de cette église faite en 1863 dans le journal "Le Lannionnais".

 

 Description faite par l’abbé David en 1863 dans le journal « Le Lannionnais »

 

"L’église paroissiale de Callac ou Botmel dédiée à Notre Dame, n’offre à la curiosité de l’archéologue qu’un médiocre intérêt. Il n’y a pas grand luxe dans son architecture. Il n’y a plus d’attentats contre le principe de l’unité de style. On y voit partout nombres de reprises de travaux qui sont marquées par autant de violences faites à la vieille pierre pour lui tirer ses formes religieuses et son caractère de vétusté. A part une fenêtre du XIV° siècle, qu’on a conservée dans une des chapelles nord, toutes les fenêtres de cette église ont été si maltraitées dans leurs restaurations successives et y ont subi tant de travestissements, que les vestiges de l’ancien monument y sont devenus méconnaissables. Toutefois nous devons ici le dire, ce bâtiment pris dans son ensemble a encore bien plus la physionomie d’une église que la plupart de ces constructions modernes qui, bâties sur les modèles les plus techniques du grec pur et poussant à son comble le mépris pour l’art chrétien, n’ont même pas le mérite d’affecter les formes d’une église mixte comme celle de Callac.                                               

Ainsi, à Botmel, la grande nef du XVIème siècle ne manque pas d’une sorte d’élégance et le campanile lui-même atteste aussi que le picoteur de pierres callacois qui en dresse d’abord les plans et devis et qui, après cela le fit pyramider dans les airs, avait encore, en architecture religieuse, les idées moins saugrenues, que nombre d’architectes brevetés des temps modernes."

 

 Trop souvent passée sous silence par les historiens de l'art, la Renaissance bretonne des XVI° et XVII° siècles, une Renaissance décalée dans le temps par rapport au reste du royaume, est le plus éclatant témoignage de la relative prospérité commerciale de la Bretagne de cette époque. Les bretons , très pieux, ont désiré convertir une part de leurs bénéfices dans la pierre, pour la plus grande gloire de Dieu. Les archives laissent entrevoir l'extraordinaire essor d'une demande artistique qui se développe à partir du XVI° siècle. L'originalité ici, peut-être unique en France, est la structure presque exclusivement paroissiale de cette demande, qui exprime une identité culturelle authentique.

                         Le dimanche 22 octobre 1628, après la grand-messe, Messire Louis Guillaume(+Botmel 1645), recteur de la paroisse depuis déjà dix ans, attire l’attention de ses fidèles sur l'urgence qu'il y a de reconstruire le chœur de la chapelle Notre Dame de Botmel qui menace ruine. Il confie, comme c'est l'usage, la responsabilité de cette tâche au président du conseil de fabrique, Louis Le Gac du village de  Lesmais en la trêve de Botmel. Celui-ci, en accord avec les autres membres du conseil, passera contrat avec les hommes de l'art. Ce fut la première restauration connue depuis le XIV° siècle. Le grand chœur et l'abside furent remis en état, agrandis et améliorés suivant les plans et devis présentés dans l'acte passé chez Maître Gilles de la Boissière demeurant en la trêve de Botmel.

    

  Un acte notarié de 1633, nous révèle les détails de la réparation de la tour . Cet acte est passé entre  Olivier Le Saux, fabrique  de l’église de Botmel, demeurant à Kernestic en Botmel, et Louis Le Goaziou, picoteur de pierres demeurant en la ville de Callac. Le président de la fabrique, Olivier Le Saux était accompagné du recteur de la paroisse mère de Plusquellec Louis Guillaume, d'Alain Huon, sieur de Kermédan, Gilles de la Boissière, Louis Le Gac, René Morvan. Le recteur Louis Guillaume dit qu'il est urgent de procéder à la réparation de la tour avant que celle-ci ne s'écroule. Le marché est passé avec les ouvriers, lesquels promettent de refaire et d'augmenter la tour suivant le plan joint. Ils commenceront à travailler après la Toussaint prochaine et promettent de finir avant la St Jean 1634. La fabrique paiera pour ce travail la somme de 378 livres tournois, dix sommes de blé, cinq sommes de seigle et le surplus en grosse avoine et blé noir par moitié, ainsi que 200 livres de beurre. La fabrique s'engage également à leur fournir un atelier pour travailler et tailler les pierres, à fournir tous les matériaux, un échafaudage destiné à monter les pierres, ainsi qu'une charrette à homme. De plus, elle fournira le charbon, les soufflets et une enclume et les ouvriers logeront dans la maison de la fabrique. On voit dans ce contrat que les habitudes professionnelles ont bien changées en un peu plus de 350 ans. Les artisans n'apportaient sur le lieu de leur travail que leur propre savoir faire. Dix ans après ces travaux, les fonds de la fabrique étant à nouveau mis à flot, décident de modifier leur église en édifiant deux chapelles, l'une dédiée à saint Joseph et l'autre à saint Nicodème.

 

Le vingt janvier 1644, à la requête présentée par Messire Mathieu Le Roux, recteur de la paroisse de Plusquellec et successeur de Messire Louis Guillaume, décédé en 1635, Maître Jérôme Du Pontho, sieur de Coatleau et sénéchal de la Juridiction de Callac, donne l'autorisation d'agrandissement au conseil de fabrique. Un état des lieux est effectué ce jour en présence des  personnes citées. Le chœur ou chapelle de saint Sébastien ainsi que le chœur de saint Nicodème menacent  la solidité de l'ensemble de l'édifice. Il est donc prévu de procéder au rétablissement et à l'allongement de ces deux chapelles. Messire Mathieu Le Roux demande que la chapelle de Saint Sébastien soit, après modification, dédiée à Saint Joseph. Assisté de Jan Le Gonidec et de Jan Calvez, maîtres picoteurs de pierres de Callac, il est procédé à la mesure de cette chapelle qui jouxte le chœur de Notre-Dame. La largeur est de 10 pieds et la longueur de 6 pieds et demie, soit 3,30 m. sur 2,15m.Sur l'autel, trône un tableau en relief de Saint Sébastien, accompagné d'autres tableaux non répertoriés. La chapelle est  éclairée par un vitrail composé de trois soufflets ou éléments de vitrail en forme de cœurs ou de fers de lance de style gothique.

 

Dans la verrière supérieure se trouve les armes de la famille de Ploesquellec, fondateur de l'église au XVè siècle. Ces armes des Ploesquellec ou Plusquellec, sieurs de Kernormand, de Callac, de Bruillac, de Kerhuel, de Kerbiriou, de Vaugaillard, de Portzamparc, de Brélidy, de Boisriou, de Kergat, du Run, de Carpont, de Kerprovost sont "d'argent à trois chevrons de gueules " , c'est-à-dire dans un écu français moderne à fond blanc, chevronné de trois chevrons rouges et non verts comme nous le trouvons sur le bulletin municipal de la ville de Callac. Les deux autres soufflets représentent des images de dévotion dont le détail ne nous est pas parvenu et portant les noms des donateurs et bienfaiteurs du vitrail, également inconnus. Puis les visiteurs passent à l'inspection de la chapelle de Saint Nicodème qui se trouve à droite du coté de l'évangile et est la troisième chapelle de l'église Notre-Dame. Ils remarquent les murs qui menacent ruines et qu'il sera nécessaire de reconstruire. Sur l'autel à retable, identique à celui de saint Sébastien, l'image de saint Nicodème est entourée d'autres images pieuses toutes en relief. Au pignon, la chapelle est éclairée par une fenêtre à vitrail également composée de trois soufflets . Les armes des Sieurs de Ploesquellec figurent de la même façon sur la rose supérieure. L'acte prônal de 1628 fait mention que lors de la remise en état de ces vitraux, ils seront conforment aux vitraux primitifs avec les mêmes écussons. Les recommandations portent aussi sur l'amélioration de l'éclairement des chapelles et préconisent l'agrandissement des fenêtres ainsi que sur l'utilisation de verres blancs si cela s'avère nécessaire.  

En résumé, l'église de Botmel semble datée du début du XVI° siècle, l'abside de 1628, la tour des années 1633-1634, la chapelle nord de 1644, le transept de 1734. Ces ruines ont été inscrites sur l'inventaire supplémentaire le 22 janvier 1927.

 

Sources : 
Joseph Lohou- Petite histoire de Callac- 1995.  

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Les vitraux de l'Église de Botmel(1664)   

Visite de l'Église de Botmel en 1937.                                                           Joseph Lohou( 1995)
                                                                               

                                                                                                                                                         (Mise à jour : 19 octobre 2015-mai 2017)


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