Callac-de-Bretagne
 

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La Vente de Tabac à Callac en 1782


LE TABAC ET SES ORIGINES

Le tabac fait partie de la même famille que les pommes de terre et le poivre. C'est une plante annuelle herbacée (Nicotiana tabaccum) atteignant de 1,50 à 2 m de haut. Ses feuilles entières peuvent mesurer 80 cm de long sur 40 de large.

Le tabac est récolté puis il est disposé dans un séchoir très aéré. Les feuilles séchées sont réchauffées et assouplies par de la vapeur, puis mélangés et mouillés avant d'être hachés. Après hachage, le tabac blond est séché, puis saucé, ce qui le rend plus doux. Le tabac brun est torréfié et acquiert ainsi son goût définitif.

Il y a plus de trois millénaires les Indiens roulaient déjà des feuilles de tabac. Ils appelaient cet ensemble de feuilles Tabaco. Parallèlement, en Europe, fumer est une activité déjà existante : les Romains et les Grecs utilisaient des feuilles d'eucalyptus et de poirier.

Depuis plus de 2000 ans, les amérindiens utilisent le tabac dans les rituels religieux ou pour ses vertus médicinales (utilisé comme analgésique ou dans sa forme mâchée, contre les rages de dents).


Cueillette du tabac en Amérique centrale

Les données historiques attestent que c’est Christophe Colomb qui pour la première fois – en 1494 - offre à ces supérieures des feuilles de tabac séché. Les marins espagnols vont ramener la plante en Europe ou très vite, ses supposées propriétés médicales l’imposent comme traitement des maladies majeures (de la douleur jusqu’aux cancers).

En France, le tabac fut introduit par Jean Nicot, ambassadeur de Catherine de Médicis.


Jean Nicot

En 1571, le docteur espagnol Nicolas Monardes, écrit un livre sur l’histoire des plantes médicinales originaires du Nouveau Monde. Il soutient déjà que le tabac peut guérir 36 problèmes de santé.

En 1588, le premier promoteur connu du tabac, Thomas Haret, préconise l’usage du tabac fumé ou en prise nasale. Il est mort des suites d’un cancer du nez, imputable dans la lumière des connaissances actuelles à la prise de tabac.

Pendant le XVIIème siècle, le tabac est aussi estimé que l’or. Pourtant, déjà en 1610, sir Francis Bacon constate qu’il est si difficile de cesser le tabac. Les prémices de la dépendance !

En 1620, le Mayflower débarque ses passagers à Plymouth, dans le Nouveau Monde. Le tabac sera interdit dans les lieux publics, et ce pendant des décennies. Petite anecdote : dans les cours espagnoles et Portugaises les plants de tabac servaient pour décorer ! Ce n'est qu'au XIV° siècle que la plante commence à être fumée. Petit à petit son utilisation se propage.
Colbert impose un monopole sur la culture du tabac, les rentrées d'argent ne sont pas négligeables. En 1700, Lorillard créé la première compagnie du tabac, compagnie qui à l’heure actuelle est la plus ancienne au monde.
Pendant la Guerre d’Indépendance des Etats-Unis, 1776, le tabac sert comme monnaie d’échange pour l’achat des armes.

Le dépôt de Callac.

 Mademoiselle Louise Françoise LE MOYNE[1] est dépositaire du bureau de tabac en1782 où elle décède le 7 mars 1782. 
Elle était vraisemblablement célibataire et son frère aîné, l'écuyer Pierre Louis LE MOYNE  de saint Idunet en Châteaulin, se présente  à Callac le 7 avril 1782 pour recevoir l’héritage laissé par sa sœur  à son décès. Dans l'inventaire qui perdure deux jours entiers, le dépôt de tabac laissé par la défunte se monte à la somme de 225 £ & 12 sols. 


"Accompagné du commis juré de la Cour, Il se présente à l’appartement de sa sœur pour vérifier les scellés et de voir si les dernières tempêtes et orages du mois passé y ont causés des dégâts.
Il règle le boulanger Joseph LE GAC des quinze sous que lui devait Louise Françoise LE MOYNE pour le pain livré ; ainsi que seize sous à Julienne BANÉAT, veuve d’Yves LOBJOA, hôte de Callac pour une pinte de vin donné à son neveu, LE MOYNE de TALHOUÊT l’Aîné, employé aux Devoirs lorsqu’il vint le voir quelques jours avant son décès ; consentant que la bouteille de vin et son gobelet soient rendus à l’hôtesse.

Dans l’appartement de la décédée avec LE BOUÉDEC[2], il ouvre avec la clé la porte d’entrée et constate que rien n’a été dérangé. Ils ouvrent l’armoire où le linge est enfermé, le sieur LE MOYNE a fait tirer le linge sale et mouillé pour être lavé afin d’éviter le pourrissement et ayant fait mander Marie Henriette JULIEN pour le laver contre un salaire juste.
Dix draps de lits, seize chemises, quatre sous d’oreillers, un mouchoir, deux mauvaises coeffes, deux serviettes, un morceau de toile, deux mauvaises poches[3], un tapis blanc, une paire de bas de boutique, dix sept morceaux de mauvais torchons.

De tout quoi j’ai fait et conclure le présent  mon procès verbal sur les lieux, sous mon seing et celui du sieur LE MOYNE, le dit jour, mois et an que devant.


Le 12 avril 1782,


Inventaire fait par M° Mathurin Jean LE BOUÉDEC, commis juré au greffe.
Transporté en la maison de la défunte Louise Françoise LE MOYNE, ce jour à huit heures du matin du 12 avril 1782, s’est présenté son frère aîné, Écuyer Pierre Louis LE MOYNE demeurant d’ordinairement en la ville de Châteaulin, paroisse de St Idunet, et actuellement à Callac pour la suite de ses affaires.
Les deux estimateurs, Maître Hervé LE BONHOMME, notaire et Claude KERIVEL, marchand de Callac accompagnent le commis agréé.

Inventaire :

 

Une crémaillère de fer, un trépied, une mauvaise pelle, des petites pinces, les petits landiers avec la broche, une petite grille, deux petites marmites, deux écuelles de terre, une chopine de faïence, deux chaises de clisse et une de bois, deux fauteuils dont un en bois, une paire de sabot vert doublé de laine, une petite table à tréteau, une table de bois de chêne, une autre petite table, les petites balances de cuivre avec les poids, neuf bouteilles, une casserole et une cuiller à pot de bois, un réchaud et une cruche de terre, un petit soufflet, vingt trois assiettes, un chandelier de cuivre, le tout pour 592 livres et 5 sols, un quart de corde de bois dont on se sert actuellement pour faire du feu, une mauvaise manne, enfoncée et un pot de chambre, vingt six chemises de toile de lin, de plus dix autres chemises de lin, onze serviettes même toile, sept têtes d’oreillers, vingt draps de lit en toile, dix sept morceaux de mauvais torchon, une nappe, cinq mouchoirs de poche, un mauvais tablier d’étamine, une mauvaise jupe d’indienne brune, un juste d’indienne à fleur, neuf morceaux de différent grand corset de damas à fleur, un mouchoir de soie noir usée, un morceau d’indienne usé, un juste de coton, un mantelet d’étoffe noir, un vieux juste de coton bleu, un juste et une jupe brun, deux jupes de coton rayé rouge et bleu et une d’étoffe brun, deux mouchoirs, sept paires de bas de différentes qualités, autre mouchoir blanc à rays rouge, une camisole de nuit, deux mauvais entendements ?, cinq bonnets ronds, quatre petits bonnets de nuit et une paire de poche, une tête d’oreillers et un demi mouchoir, une paire de pantoufle, un tablier de coton noir, un juste ou apollon de damas, une jupe de taffetas vert, une cape de taffetas brun, un ballonnet de taffetas noir, dix bonnets ronds, un petit bonnet et une taie d’oreillers, deux mauvais tabliers de mousseline, une paire de fils blanc, trois mauvais bonnets et un entendement, trois mouchoirs de mousseline, quatre bonnets ronds, une cape de camelot sur soie brun, autre cape de camelot sur soie gris ciré, une boîte de carton avec quatre pelotes de fil, deux écheveaux de fil, deux couverts d’argent du poids de quarante huit livres, une paire de pendant d’oreille d’or, trois écriteaux, une paire de lunettes, un tapis blanc de laine, de l’argent tournoyé(livre thournois) trouvé sur une assiette renfermée dans le buffet la somme de quatorze livres et sept sous que j’ai remis au sieur LE MOYNE , trois torchons et une mauvaise serviette, deux poches de peau servant à porter le tabac en poudre, six livres de lard, deux sas, une mauvaise tabatière d’écaille avec son cercle d’argent.

Le 13 avril 1782, reprise de l’inventaire.

Ayant fait peser aux poids du Roy tout le tabac qui s’est trouvé en la maison de la dite Demoiselle LE MOYNE comme en faisant de débit, il s’est trouvé monter une somme de deux cent vingt cinq livres et douze sols.

Ce qui se monte en tout à une somme de 592 livres 7 sols  .
Pour salaire, Hervé LE BONHOMME reçoit trente sous et Claude KERIVEL vingt sous et ont signé.

Une grosse en date du 15 janvier 1773, Delle VAUCHEL de Callac à défunte Delle LE MOYNE.
Une obligation sous seing privé du 26 avril 1776, Hervé LE MOYNE pour soixante livres.
Une autre obligation du 16 octobre 1779, de Mathurin RENÉ sous l’autorité de M° Yves LE BON, son curateur, de treize livres à la Demoiselle LE MOYNE.
Deux procurations sous seing privé en date du 1er juin et 31 octobre 1781, lune consentie à la Delle LE MOYNE et l’autre à M° BEUBRY par l’écuyer Pierre Claude LE MOYNE de TALHOUET.
Cinq lettres adressées par le sieur de TALHOUET de Concarneau à la défunte Delle LE MOYNE en différentes dates.
Un petit cahier servant pour les voitures du tabac du 31 janvier dernier et du 28 février.
Et sur ce qu’il ne s’être trouvé d’autres meubles, ni effets à inventorier que ceux ci-dessus spécifiés, non plus que d’autres titres concernant la succession de la dite Demoiselle LE MOYNE.

Fait et arrêté sous mon seing et celui du sieur LE MOYNE ainsi que celui de Noble M° Gabriel Joseph FERCOQ, avocat de la Cour, le dit mois et an que devant sans interligne, le présent approuvé.
Signé : G. FERCOQ, LE MOYNE, LE BOUÉDEC, commis juré. »


 

 

 

 

Sources.

AD22 – série B- cote B 2028.                              
http://www.france-tabac.com


                                                                          Joseph Lohou(mars 2007)  
                                                                                                               (mise à jour nov.2007)

 

  Annexe 1.

 

District de Rostrenen- Tabac  en 1794.

 

 

Dénomination des marchandises

Distance de Rostrenen

Frais de transport

Prix du grossier

Prix du détail

Prix de la livre(poids)

Observations

En role(rouleau) pour fumer

15 lieues

3 £[4] par cent

197£8sols

217£2s.10d.

2£4s.6d.

Les prix ont été fixes d’après les prix de Morlaix d’où on continue de retirer(extraire) cette denrée.

En bouts pour râper

15

3

209£4s, 3d.

230£2s.9d.

2£6s.6d.

 

En poudre sec

15

3

221£9s.3d.

243£12s.3d.

2£8s.10d.

 

Haché ou Scaferlati[5]

15

3

221£9s.3d.

243£12s.3d.

2£8s.10d.

 

 

Arrêté par l’agent national provisoire près le district de Rostrenen, le 4 prairial an II(23 mai 1794) de la République Française, une et indivisible, signé François MARBAUD.

Vu et approuvé par nous administrateurs du Directoire du District de Rostrenen le 4 prairial An II(23 mai 1794) de la République Française, une et indivisible, signé : P. Le Bourhis.

sr, Boulaur, président, Le Roux.

Du dit jour 10 Prairial, l’An II(29 mai 1794) de la République Française , une et indivisible, séance permanente et publique du Conseil général de la commune de Botmel, tenue par Pierre LE MILBEAU, maire, Joseph EVEN, François LE POURHIET, Joseph LE JOLIFF, Yves L’HÉLIAS, Julien LE BRICON, officiers municipaux, Guillaume LE BARBIER, François L’HÉLIAS, Pierre LE GAC, Yves LE DEUFF, Maurice DANIEL, notables.

Présent : Pierre Joseph FERCOQ, agent national provisoire.


                                                                                    Joseph Lohou(nov.2007)

Sources
.

AD22- série L- cote 15 L 2. 
TLF- Trésor Langue Française.

 

 

 



[1] Famille LE MOYNE de TALHOUET, en 1718, la conspiration de Cellamare et Frères Bretons(Marquis de Pontcallec)- en 1748, au manoir de Barach en Ploërdut- François LE BIHAN x Jeanne LE MOYNE, fille de Vincent et Renée de PERRIE.

[2] BOUÉDEC(LE), Mathurin Jean, (Botmel 1738) x Louise THEPAULT, notaire royal de Kerguiniou en 1768.

[3] Poche, Grand sac de toile qui contient des céréales,

[4] Livre, monnaie, le franc équivalait à la livre en 1790

[5] Scaferlati, Tabac découpé en minces lanières à fumer en cigarettes ou dans la pipe

 

 

 
© Tous Droits Réservés (Joseph Lohou)