Callac-de-Bretagne

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Retable de Notre Dame de la Compassion Eglise de la Chapelle Neuve.


Je vais aborder un des mobiliers majeurs de notre patrimoine religieux de la communauté de paroisses de Callac. En effet, ce retable est digne que l'on s'attarde sur ses panneaux qui ont beaucoup de choses à nous révéler. Je vais, sur plusieurs numéros de « Mouez », tenter de vous démystifier ce retable. Tout d'abord, c'est quoi un retable ? C'est un panneau décoratif placé au-dessus de la table d'autel. Ce panneau comporte 11 tableaux sculptés, plus une statue dénommée : Piéta (appelée à la Chapelle Neuve : Notre Dame de la Compassion). Ces tableaux ont été, lors d'un profond remaniement à la fin du 19è ou au début du 20è siècle, redisposés dans un encadre¬ment néobaroque, par l'atelier lannionais Philippe Le Merrer[1]. Selon René Couffon[2], ces panneaux du 16° siècle ont été retrouvés dans la crypte et dans les combles de l'église.

Ils proviennent sans doute d'un atelier morlaisien[3], car certains personnages sculptés semblent de même facture que certains autres des églises de : Loc Envel, Locarn, Confort, Berhet ou Cléden Poher (29). Autrement dit, il se rapproche des autres retables par sa stylistique (étude du style, de la façon de faire..). Cet atelier était florissant entre 1500-1550, ce qui correspond à la période de la Renaissance en Bretagne. La Bretagne n'était pas, comme certains pourraient le penser, repliée sur elle-même. La flotte bretonne sillonnait les mers européennes, du nord au sud : de la Sicile à la Baltique.

 Les échanges commerciaux (toiles, blé noir, produits agricoles...) et artistiques étaient nombreux. Les sculpteurs, les peintres, les ébénistes... voyageaient beaucoup, puisant leur inspiration à diverses sources et les interpré¬taient et les adaptaient à leur manière. En fait, la Bretagne déjà à cette époque-là, jouait la carte de l'Europe et d'une certaine façon, avec la découverte du nouveau monde (1492) et l'échange de ces toiles avec l'Amérique du Sud, à la mondialisation. Sujet, oh combien d'actualité !

C'est quoi la Renaissance ?
Mouvement qui a ses origines en Italie. Mais c'est Louis XII qui l'importera en France (château de Meillant dans le Berry). Elle s'accompagna d'un ensemble de réformes religieuses. Elle se caractérise par :

•    l'apparition de nouveaux modes de diffusion de l'information, (invention de l'imprimerie par Gutenberg 1450)
•    la lecture scientifique des textes fondamentaux : l'humanisme.
•    la remise à l'honneur de la culture antique (littérature, arts, techniques),
•    le renouveau des échanges commerciaux : routes des épices, Canada (1534)...
•    les changements de représentation du monde.

Elle finit en France en 1610 à la mort d'Henri IV.

Qui sont les commanditaires de ce retable ?

Cette église fut construite par les seigneurs de Kerméno. Plusieurs fils Kerméno se firent moines à l'abbaye bénédictine de Sainte Croix de Quimperlé. L'un d'eux en fut même l'abbé. C'est l'abbé de sainte Croix qui nommait le chapelain desservant à la Chapelle Neuve. Ces prêtres étaient érudits, ils avaient pour mission de s'adresser à l'aristocratie qui commence à savoir lire. On passe du catéchisme oral du Moyen-âge à la découverte des textes bibliques, des livres d'heures ou bibles qui commencent à être imprimés.
Et dans ce foisonnement artistique de la Renaissance, la Bretagne n'était pas isolé.

ROLLAND Jean Paul (suite au prochain Mouez)

Notes.
[1}]Le Merrer Père (1823-1880) et fils de Lannion ; cette famille Le Merrer possédait, au XIXe siècle, un important atelier d'ébénisterie spécialisé dans l'art sacré. On lui doit de nombreuses productions à travers la Bretagne, remarquables par la finesse et l'expressivité de la statuaire

[2] René Couffon (1888-1973). Né à Lorient, cet architecte fut longtemps président de la Société d'Emulation des Côtes-du-Nord. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages dont Répertoire des églises des Côtes-du-Nord (3 volumes); Répertoire des églises du Finistère

[3] Cet enrichissement est dû au commerce de la toile nourrit la floraison de l'art religieux dans tout le Léon et à Morlaix. Morlaix à des ateliers d'artistes sculpteurs et bâtisseurs prestigieux comme celui de Jacques Lespagnol.