Callac-de-Bretagne

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Réseaux et mouvements de Résistance dans
les Côtes-du-Nord (1943-1944)

 

Réseaux de renseignements et réseaux d’évasion

 

Les premiers réseaux de renseignements sont mis sur pied dès 1940 en Bretagne. Certains recueillent déjà des aviateurs alliés comme un réseau nantais qui a une antenne à Lanvollon avec le père J-B. Legeay. A Bréhat, la famille Wilborts cherche le contact avec Londres et recueille des renseignements. Au bout de quelques mois, ces réseaux sont démantelés mais d’autres se reconstituent. Le groupe Barbé, à Lannion, qui cherche à faire du renseignement, est arrêté dès décembre 1940, son chef condamné à mort, meurt fusillé le 4 octobre 1941.

 

A partir de 1943, des agents travaillant pour les Anglais cherchent à évacuer par la Bretagne des aviateurs alliés. Après l’échec d’une première tentative en 1943, le réseau Shelburne fonctionne au début de 1944 par Saint-Brieuc, Guingamp et Plouha. En s’appuyant sur la résistance locale, il évacue 143 personnes par la plage Bonaparte à Plouha.

 

Les mouvements de Résistance

 

Les mouvements qui ont pour objectif de préparer et d’organiser la population contre l’occupant et le régime de Vichy naissent au cours de l’année 1943 dans les Côtes-du-Nord.

 

Lancé par le PCF en mai 1941, le Front National (F.N.) n’est formé qu’au début de 1943, en dépit de quelques tracts signalés antérieurement dans le département. Jean Devienne, alias François, instituteur, militant aux jeunesses socialistes dans le Nord avant-guerre, et Louis Pichouron, responsable communiste puis F.T.P. sont les premiers organisateurs du mouvement.

 

Principal mouvement organisé, le F.N. se développe rapidement dans l’ouest des Côtes-du-Nord ainsi que sa branche armée, les F.T.P. en 1943. En septembre 1943, Jean Devienne lance un journal clandestin, La France Combattante des Côtes-du-Nord, imprimé à Morlaix. Le journal appelle à la lutte « pour la libération nationale », à être réfractaire au S.T.O. tout en dénonçant les « Kollaborateurs » souvent nominalement. A l’automne 1943, le journal devient Le Patriote des Côtes-du-Nord, un mensuel dont environ dix numéros sont publiés avant la Libération. Il annonce en particulier les actions de lutte des F.T.P.

 

Au printemps 1943, le mouvement Libération-Nord dirigé par les socialistes est formé dans le département par des résistants briochins. Yves Lavoquer, un des chefs, est chargé d’organiser l’Armée secrète selon les directives de Londres. Pour échapper à l’arrestation, il doit changer de région en décembre 1943 et est remplacé par Adolphe Vallée. En février 1944, ce dernier et un autre fondateur du mouvement, A. Kerrien, sont arrêtés par la Gestapo. La direction de Libé-Nord est décapitée peu avant la Libération. Le mouvement est très affaibli d’autant plus que cette rafle empêche la fusion complète de ses combattants et de ceux de Défense de la France avec les F.T.P. au sein des Forces Françaises de l’Intérieur (F.F.I.).

 

En août 1943 s’est constitué un troisième mouvement, Défense de la France, à partir du journal clandestin du même nom. Animé par l’abbé Fleury et les Métairie de Saint-Brieuc, il recrute surtout dans les milieux démocrates-chrétiens et fusionne avec d’autres mouvements au sein de Mouvement de Libération Nationale (M.L.N.) au début de 1944. Défense de la France appelle à la lutte armée avant le débarquement.

 

Libé-Nord et Défense de la France avec l’O.C.M. ont jeté les bases du Comité Départemental de la Libération à la fin de 1943, organisme présidé par Henri Avril, notable radical-socialiste, ancien député (1919-1924), alors directeur de l’école primaire supérieure de Lamballe. Un homme issu du F.N., Yves Le Hégarat alias Marceau, est nommé chef départemental des Forces Françaises de l’Intérieur (F.F.I.) à la suite des arrestations du printemps 1944. Depuis plusieurs mois, les F.T.P. résistent avec des moyens limités mais avec efficacité.

 

Vers l’insurrection nationale (fin février – 6 juin 1944)

 

A la fin de 1943 et au début de 1944, la Résistance armée est en plein essor dans l’ouest du département grâce aux F.T.P. qui regroupent des jeunes qui veulent se battre mais sont réduits abusivement aux seuls communistes par les sources officielles. En février-mars 1944, 165 attentats sont officiellement recensés dont des attaques de mairies et de fermes pour nourrir les « hors-la-loi » (résistants et réfractaires au S.T.O. de plus en plus nombreux). L’épuration a commencé à la fin de 1943 avec les premières exécutions sommaires ainsi que la « bataille du rail » au début de 1944 avec en particulier l’action de la compagnie F.T.P. « La Marseillaise » dans la région de Trégrom-Plouaret.

 

Les premiers maquis repliés d’Ille-et-Vilaine dans la forêt de la Hunaudaye, et de Spézet (Finistère) dans la région de Paule-Plévin sont signalés à l’automne 1943. A la suite d’une bavure à Plévin, le zélé chef de la gendarmerie de Guingamp déclenche une rafle qui détruit le maquis et provoque plusieurs arrestations. Il porte des coups très durs aux premiers maquis mais l’action se poursuit. Les hommes de Jojo (G. Ollitrault) des maquis Tito dans la région de Maël-Pestivien attaquent directement les Allemands, provoquent des représailles sur les civils.

 

Les F.T.P. des Côtes-du-Nord ont bénéficié exceptionnellement de trois parachutages d’armes en mars 1944. Toutefois, les armes feront cruellement défaut, jusqu’en juillet 1944.

 

Au début de mai 1944, l’insurrection se généralise dans l’ouest du département avec la montée au maquis des F.T.P. pour échapper aux rafles de plus en plus massives et l’action d’autres groupes. Les maquis F.T.P. sont localisés dans la région de Maël-Carhaix, Callac, Saint-Nicolas-du-Pélem, à Squiffiec et Pommerit-Jaudy. Les actions de toute nature se multiplient comme à Lannion et à Dinan. A la veille du débarquement, 350 attentats ont été recensés dans les deux mois précédents, surtout grâce aux actions des F.T.P. : leur nombre a doublé depuis février-mars.

 

Le rôle de la Résistance dans la libération du département (6 juin – début août 1944)

 

Avec le débarquement, tous les résistants organisés prennent le maquis et mettent en œuvre les plans de sabotages élaborés à Londres pour paralyser les mouvements de troupes de la Wehrmacht. La base Samwest de parachutistes S.A.S. à Duault ayant été rapidement dispersée, les F.F.I. mettent en œuvre les plans prévus parfois en liaison avec les parachutistes restés dans la région comme dans les maquis de Corlay et de Plésidy-Saint-Connan.

 

Les résultats sont impressionnants, les armes tombent du ciel surtout en juillet. Les rapports de police sur les maquis se font volontairement plus vagues tout en grossissant le chiffre des F.F.I. qu’on peut estimer entre 12 000 et 15 000 à la Libération au début août. Les combats, embuscades, accrochages avec l’occupant qui attaque durement les maquis (de Pommerit-Jaudy, Paule-Plévin, Plésidy, etc.) sont de plus en plus fréquents. Les maquis F.T.P. Tito sont particulièrement actifs et très mobiles. La répression nazie est de plus en plus féroce à Plestan, Malaunay près de Guingamp, dans la forêt de Lorges, à Pleubian.

 

La déportation des prisonniers s’accélère d’où l’attaque de la prison de Saint-Brieuc le 1er août par le groupe F.N.-F.T.P. Pierre Le Gorrec, commandé par Max Le Bail pour libérer 33 détenus. Mais le harcèlement des F.F.I. prépare l’avance foudroyante des armées américaines en Bretagne dans la première quinzaine d’août 1944.

 

Source : Extrait de l’article "La Résistance et la Libération des Côtes-du-Nord ", Archives départementales des Côtes d’Armor, service éducatif, CDDP, 1986. Auteur : Christian Bougeard.