|
Callac-de-Bretagne |
|
Page
Retour
Apôtres du Porche sud de l'église de Saint Servais..
Ce
qui nous surprend lorsque l'on arrive devant l'église est ce haut
pignon, contreforté et sommé de pinacles, percé d'une porte. Ce
portail, donnant accès au porche, est en arc brisé surmonté d'une
pierre noirâtre qui, avant 1793 (terreur héraldique), portait les armes
d'une seigneurie. Au-dessus, un larmier la préservait de l'eau de
ruis¬sellement. Puis enfin, une petite fenêtre barreaudée (pour éviter
les vols) éclairait une salle que l'on nommerait aujourd'hui la mairie.
Cette avancée est libre d'accès et permet aux fidèles de pénétrer dans
la nef de l'église. Les rampants du pignon sont agrémentés de crochets
le tout coiffé par un fleuron ou chou frisé. On pourra remar¬quer que
le plafond est constitué d'une croisée d'ogives en granit.
L'accès
à la nef s'effectue par deux portes géminées après avoir monté trois
marches. Ces portes surmontées d'un arc en tiers point trilobé sont
incluses dans un autre arc diaphragme en tiers point également. Ces
arcs compor¬tent des voussures qui viennent reposer sur des chapiteaux
décorés de feuilles végétales ( ?). A gauche, à la base de la voussure
extérieure, je vois un éléphant en moment état, dont la trompe a été
cassée. Cette figurine me fait penser à la pierre de crossette de
l'église de Bulat où figure également un éléphant. Les piédroits sont
constitués de fines colonnettes. Cet arc diaphragme est également
enchâssé dans le mur gouttereau mais légèrement décalé sur la droite.
Entre les deux arcs trilobés des portes, un culot de statue malheureusement vide.
Sur
un rebord, des murs latéraux, 12 statues surmontés de dais et séparées
les unes des autres par des pilastres prismatiques formant ainsi comme
des niches. Cette disposition est courante dans l'entrée des porches
sud de nos églises, par contre, la qualité et la facture des statues ne
sont pas équivalentes et c'est cela qui fait tout le charme de nos
églises bretonnes.
Les
dais sont tous semblables, ce qui n'est pas toujours le cas (à Bulat
Pestivien, par exemple), mais finement sculptés. Ces dais sont pour les
sculpteurs une représentation du ciel sur la Terre, autrement dit, ils
ont voulu représenté ces personnages dans le ciel, auprès de Dieu le
Père, comme leur avait promis son fils : Jésus Christ. Ces 12 statues
représentent les apôtres, nommés également : le collège apostolique
(dans la bible, symbolise l'ensemble du peuple de Dieu que constituent
les 12 tribus d'Israël); Jésus les avait appelés, formés et envoyés
annoncer son message. Ils accueillent les fidèles et au passage leur
rappellent la foi de l'Eglise. Disciples ou apôtres ? Un disciple
est un élève qui reçoit un ensei¬gnement d'un maître et partage sa vie.
Un apôtre est un envoyé, aujourd'hui on dirait « un chargé de mission
». La tradition applique ce nom aux 12 hommes envoyés par Jésus prêcher
son message.
C'est sur le témoignage de ces hommes qui ont affirmé avoir vu Jésus vivant après sa mort, que s'est construit le christianisme.
Qui
sont-ils ? En partant de la droite. Il n'est pas très aisé, ici, de les
reconnaître car l'attribut qu'on leur donne (souvent l'instrument de
leur martyr) n'est pas toujours reconnaissable.
1.
Simon, que Jésus appellera Pierre. Il fut nommé le premier ainsi car il
était le fondement de l'église chrétienne. C'est lui que l'on trouve
toujours le premier et le plus près de la porte d'entrée, avec sa clé
qui symboliquement et effectivement, permet d'ouvrir la porte de la
maison de Dieu. Il était frère d'André (ces 2 frères étaient marins
pêcheurs à Capharnaüm). Il est considéré par la tradition romaine
comme le premier pape.. Il n'osera pas durant la passion du Christ
reconnaître son appartenance au groupe de disciples de Jésus (épisode
du reniement, Jésus lui dit : tu m'auras renié 3 fois avant le chant du
coq). Il évangélisa la Grèce et Rome. Il mourut au temps de Néron
crucifié la tête en bas vers 64.
2. Saint Paul, apôtre des nations. Ce pharisien,
persécuteur de l'église naissante en deviendra après sa conver¬sion le
disciple le plus intrépide. D'une main il tient l'épée qui fut, à Rome,
l'instrument de son martyr (il était citoyen romain). Il est l'auteur
de nombreuses lettres écrites aux communautés chrétiennes.
3. Saint Jean, le seul à ne pas porter de barbe, car
il était le plus jeune. Appelé l'Evangéliste, le disciple bien ai
mé, aurait évangélisé l'Asie Mineure. Exilé à Patmos(Grèce) mort à
Ephèse vers l'an 100, très âgé. Il est le seul à ne pas être mort
martyrisé. On remarquera, ici, qu'il porte son calice dans la main
droite (de même qu'à Suie). Partout ailleurs il le tient de la main
gauche, afin qu'il puisse bénir l'eau qui deviendra le sang du Christ
de sa main droite. D'autre part on portera son attention sur le haut du
calice pour voir une petite excroissance qui représente un « serpent »
qui lui symbolise le mauvais. En effet, lors de son évangélisation en
Asie mi¬neure, ses détracteurs avaient voulu l'empoisonner, ainsi le
reptile nous indique que le calice contient un breuvage malsain mais
comme Jean va le bénir, il n'aura aucun désagrément.
4.
Saint Jacques le Majeur, frère aîné de Jean (ils étaient fils de
Zébédé, Jésus les surnomma « fils du tonnerre » à cause de leur
caractère colérique). Il est le premier apôtre à subir le martyr,
décapité à Jérusalem vers 42. Il évangélisa l'Espagne.
5. Saint André, aurait évangélisé la Russie et les
Balkans ; mort à Patras crucifié sur une croix dite de saint An¬dré.
Deux pays se sont donnés comme patron national : la Russie et l'Ecosse
(qui s'honore de posséder la moi¬tié de son corps).
6. Saint Mathieu, portant un bâton qui pourrait
figurer la hallebarde dont on l'affuble normalement. Publicain (homme
d'affaire), collecteur d'impôts, auteur du premier Evangile, il
s'adresse à des chrétiens issus du ju¬daïsme ; il évangélisa la
Palestine et l'Ethiopie.
A gauche :
7. Saint Thomas, célèbre car il est celui qui ne
croit que ce qu'il voit ; il évangélisa les Perses, les Parthes et une
partie de l'Inde.
8. Saint Barthélémy, avec son couteau, car il mourut, dépecé vif. Il évangélisa des pays d'Orient.
9. Saint Jacques le Mineur, avec son bâton foulon avec lequel il fut assommé
10. Saint Simon, le Zélote mort en Perse. Il porte une scie car il fut coupé en morceaux
11. Saint Jude Thaddée tenant dans sa main une
massue, cousin de Jésus, frère de Jacques le Juste. Il aurait
évangélisé l'Arménie
12. Saint Philippe, portant une croix en tau, il évangélisa la Phrygie (Asie Mineure).
Ces statues sont de grandes factures, le sculpteur n'est pas resté dans
l'uniformité, tous les personnages sont différents aussi bien dans leur
visage que dans leur habillement. Leurs tuniques sont maniérées, la
plicature des vêtements est abondante, les chevelures et les barbes,
des uns et des autres, sont soignées. Certains apôtres (St Jacques,
André, Mathieu...) portent comme une sorte de phylactère sur lesquels
évidemment on ne lit plus rien. Mais à l'origine, sûrement que l'on
pouvait y lire le début d'une phrase qui rendait hommage à celui qui
les en
voyait (Jésus) par exemple : Credo in Deum D'autres portent un livre fermé (Saint Pierre, Paul et tous ceux de
gauche).
Remarquez également que tous les apôtres sont pieds nus, cela est un
signe distinctif. Ils sont porteurs de bonnes nouvelles. Qu'ils sont
beaux Les pieds de ceux qui [...] annoncent de bannes nouvelles. (Esaïe)
De part et d'autre du porche, deux bancs le longs des murs, sont là
pour nous rappeler que c'est à cet endroit que le conseil de fabrique
(celui qui régissait les affaires de la paroisse) se réunissait à
l'issu des vêpres.
Le meilleur moyen d'apprécier tous les détails de ce porche est de
marquer un arrêt lors de votre prochain passage dans le bourg de Saint
Servais. Vous ne regarderez plus ces statues de la même façon et peut
être que vous trouverez quelques petits détails qui m'ont échappé.
Jean Paul Rolland.
Mouez an Argoat-Bulletin Paroissial mensuel n° 12 de décembre 2014.
| | |