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Callac-de-Bretagne |
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La musique bretonne à Callac.
Histoire de la clarinette en Bretagne
Apparue à la fin du XVIIe siècle, la clarinette ne s’est véritablement
diffusée qu’à partir des années 1750. Aucun document, à notre
connaissance, ne mentionne son utilisation en Bretagne avant la
Révolution, et il est actuellement difficile de savoir si une pratique
populaire existait avant les années 1830.
Les érudits du XIXe siècle, surtout curieux de culture celtique, ont
rarement noté son emploi : ils voyaient probablement en elle un vecteur
de modernisme incapable de préserver le caractère spécifiquement
breton de la musique traditionnelle.
Si les formations de type « musique militaire » ont contribué à
l’introduction de l’instrument en Bretagne, la façon dont s’est
effectuée son intégration dans la musique traditionnelle reste
difficile à cerner à l’heure actuelle. Il semble que la plupart de ces
musiciens d’harmonies se soient tenus à l’écart des réjouissances
paysannes et ne soient pas devenus animateurs de noces.
Le succès populaire incontestable, dans la deuxième moitié du XIXe
siècle, de cet instrument « moderne » en haute Cornouaille est plus
surprenant ; l’isolement de cette région l’ayant amenée à conserver
plus longtemps que d’autres un fonds ancien de danses et de mélodies.
Preuve de l’intégration populaire de la clarinette à la fin du XIXe
siècle, on lui donne un nom dans les différents parlers locaux, tous
basés sur la même comparaison : treujenn-gaol (littéralement « tronc de
chou ») en haute Cornouaille, tronc d’chou dans le Mené et les pays de
Vitré et Fougères.
La clarinette.
Instrument à vent à anche simple a été inventé à la fin du 17ème siècle
par un luthier allemand, Johann Christopher DENNER (1655-1707). Il
améliore le chalumeau, instrument traditionnel répandu dans toute
l’Europe. Il en transforme le bec, donne à son extrémité la forme d’un
pavillon et place deux clefs sur le corps supérieur, dont la clef de 12
», caractéristique de la clarinette qui permet d’obtenir le douzième
degré et non l’octave de la note.
Ces modifications vont amener les compositeurs de l’époque à adopter
l’instrument : Jean Faber Antoine Vivaldi l’utilise dès la première
moitié du 18ème siècle ; il fera vite partie intégrante de l’orchestre
classique.
Une noce en 1906 avec 2 clarinettes et un tambour.
Un musicien réputé, « Pier an Dall » (1832-1908)
Pier an Dall avec sa fille Marie-Louise, photographiés à Nantes vers 1906. Il a alors plus de 70 ans.
Pierre l'aveugle, à l'état civil Pierre-Marie Sérandour , est le plus ancien des sonneurs de « Treujenn gaol « recensés.
Il habitait, au Haut-Corlay, une petite maison nommée « Kermusique ».
Pier an Dall effectue un voyage à Paris dans les années 1852-55, la
tradition orale va beaucoup broder sur cet événement. On dit aussi
qu'il aurait joué devant Napoléon III, lors du voyage de ce dernier en
Bretagne en 1958.
Il est bien difficile aujourd'hui de séparer la légende de la vérité,
en ce qui concerne la vie du plus célèbre des sonneurs de clarinette.
On dit qu'il a animé des milliers de noces et fêtes et il était connu
de Pontivy à Tréguier et de Carhaix à Saint-Brieuc.
Un sonneur prestigieux semble avoir suscité un important engouement en
faveur de la clarinette dans les Côtes‑d'Armor pendant la seconde
moitié du XIXe siècle : il s'appelle Pierre Sérandour, du Haut‑Corlay,
surnommé Pier an Dall (Pierre l'aveugle), ou Dall Korle (l'aveugle de
Corlay). C'est un des rares joueurs de clarinette à n'avoir vécu que de
son art. A l'égal d'autres virtuoses, comme son contemporain Matilin an
Dall l'illustre sonneur de bombarde, il a marqué la mémoire populaire.
Pier an Dall à Callac.
Pier An Dall appréciait la fête de la Sainte Barbe de Callac. La fête
qui dure une semaine entière s’effectue dans la dernière semaine du
mois de juillet, Pier estimait que son séjour était bien payé et son
travail peu pénible. Le jeudi, jour des prêtres, il n’y avait pas de
musique mais le sonneur recevait malgré tout son salaire. Dans les
années 30, le souvenir du passage du musicien était encore vif auprès
des anciens de Callac. Il faut dire qu’il n’hésitait pas quand cela le
méritait, à se donner la peine : pour aller au Mardi-Gras de Guingamp,
il se mettait en route le lundi à minuit, pour être à pied d’œuvre dès
6 heures du matin.
Pier an Dall eut ainsi une certaine influence dans la région et son art
de la clarinette fit bientôt faire apparaître d’autres musiciens de
talent à Callac : citons Jean-Marie Le Deuff et son compère plus jeune,
Jean-Marie Le Balch.
Le couple Jean-Marie Le Deuff et Jean-Marie Le Balc’h.
« Yan Maï Deuñv »
Au début du 20ème siècle, et peu avant 1900, se forme un tandem de
sonneurs réputés dans le canton de Callac. En premier, mentionnons
Jean-Marie Le Deuff, connu sous le nom breton de « Yan Maï Deuñv », il
est originaire de Poullaouën dans le Finistère, où il naît le 9 juillet
1879 au village de Kerdu, enfant naturel de Catherine Le Deuff. Il se
marie à Plounévézel le 8 octobre 1905 avec Jacquette Le
Bris.
Le couple arrive à Callac peut après leur mariage et s’installe au
village de Restguen, il est mentionné comme cultivateur, mais il est
surtout un musicien patenté qui, dans les années 1910 à 1930,
accompagne tous les mariages et fêtes de la région ; Jean-Marie Le
Deuff pouvait participer à 82 mariages dans une année, une vrai
profession ! Comme nous l’avons noté plus avant, les sonneurs de
clarinette jouaient régulièrement en duo et Jean Marie Le Deuff était
accompagné de Jean Marie Le Balch, son cadet de 9 ans, fils de Jean Le
Balc’h et de Marie Orvan du village de Questellic.
Les Le Deuff auront deux jeunes fils qui suivront la carrière de leur père : Jean-Baptiste et Jean ?
Le Cercle Celtique Callacois dans les années 1950 à1960.
Le Cercle sur la Place du Centre à Callac.
Le Cercle Celtique de Callac fondé en 1952 à l’initiative de M.
François Lallour et de l’abbé Siméon Le Jeanne, eut une vie
relativement brève et disparut en 1963. A la première sortie en ville
du Cercle, les costumes furent empruntés à un cercle finistérien,
coiffes diverses pour les femmes et grands chapeaux pour les hommes.
Nous le voyons ici défilant sur la Place du Centre à la hauteur de la
Maison de la Presse, emmené par Jean-Claude Le Lay à la bombarde «
talabarder » et Jean Le Guyader au biviou « biniaouer » . Après les
enfants en costume, notons le premier trio, Yves Le Diraison, ayant à
sa droite, Fernande Guillossou et à sa gauche, Yvonne Le Bon, puis
Ernest Guillossou, derrière. La désastreuse qualité de la photo
ne permet pas de reconnaître d’autres personnages, citons à tout hasard
: Marguerite Lancien, Jeannine Le Fur, Maryvonne Prigent, Hélène Le
Diraison, etc…
Jean-Claude Le Lay.
Jean-Claude Le Lay, un callacois d’origine, fils du boulanger de la rue
des Portes, joueur de clarinette (treujenn-gaol), et de bombarde fut un
sonneur du cercle dans les années 1950.
Il découvre la clarinette en écoutant le maître Iwan Thomas de
Glomel, dès lors en véritable précurseur il commence à recenser les
sonneurs de « treujenn-gaol », en contacte une dizaine, recueille leur
répertoire et se met à leur école pour apprendre la technique de jeu.
Il rencontra un peu plus tard Jean Baptiste Le Deuff, fils de Jean
Marie (Yan Maï Deuñv) et de Jacquette Le Bris, sonneur réputé de
Callac qui demeurait au village proche de Restguen en Callac et
s’inspira de ses œuvres.
Citons un air réputé du fils Jean Baptiste : une marche intitulée
en breton « Ton eured Baptist an Deunv » (Air de mariage de
Baptiste Le Deuff), qui fut joué de 1920 à 1928 dans bien des noces (82
par an).
Joseph Lohou (janvier 2016)
Sources.
D’après un article paru dans la revue « Ar Men » et obtenu de M. André Lohou de Poissy.
Notes.
[*]Jean-Michel Guilcher, né le 24 septembre 1914 à
Saint-Pierre-Quilbignon (commune de Brest, Finistère), est ethnologue
et maître de recherches honoraire au CNRS. Il est connu pour ses
recherches sur les danses traditionnelles en France, notamment ses
enquêtes de terrain en Basse-Bretagne, puis sur la quasi-totalité du
territoire français, qu'il réalise en compagnie de sa femme Hélène.
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