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Callac-de-Bretagne |
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LE LOUP
Il
y a quelques mois, l’Observatoire du loup annonçait le retour du Canis
lupus - le loup gris - dans la région à l’horizon 2020. Une information
qui a défrayé la chronique, comme en témoigne Marion Le Vée,
responsable du Musée du loup au Cloître-Saint-Thégonnec dans le
Finistère : « Les gens sont étonnés, mais pourtant la Bretagne a abrité
une population de loups assez importante pendant des siècles. Avec ses
landes et ses forêts, la région reste un territoire propice pour cet
animal.
D’après les scientifiques, il pourrait faire son retour permanent d’ici
une dizaine d’années ». En évoquant le loup, c’est la crainte qui
refait surface, une peur ancestrale qui s’explique par des relation
animal sacré chez les Celtes Pourtant, le loup n’a pas toujours été cet
animal honni. Dans l’Antiquité, il fait partie du monde divin. Lug, le
dieu suprême de la mythologie celtique, est représenté accompagné de
deux loups. Symbole de la puissance de la nature, l’animal fait
référence à la force et la fertilité. Les guerriers n’hésitent pas à le
porter en totem, en recouvrant leur casque d’une tête de loup, en
partant au combat. La bête est aussi synonyme de sagesse dans la
tradition celtique bretonne. Bleiz (loup en breton) est le nom de l’un
des derniers grands druides dans la mythologie arthurienne, il serait
l’instructeur de Merlin l’Enchanteur.
La légende raconte qu’il vivait comme un ermite dans la forêt,
entouré de loups, et qu’il soignait les animaux. Plus près de nous,
plusieurs Vitae de saints bretons comptent dans leur histoire des loups
comme protagonistes, et l’animal revient régulièrement parmi les
attributs d’hommes d’Église : Brieuc, Hervé, Envel, Thégonnec, Ronan… «
Les contes traditionnels, comme les récits vécus, vont dans le même
sens et permettent d’établir un palmarès où la première place se joue
entre le cheval et le mouton, suivis du cochon, de la vache, de la
chèvre et du chien, explique François de Beaulieu, dans un ouvrage
consacré au sujet. Les attaques sur le bétail étaient courantes et
pouvaient provoquer des pertes localement importantes, spécialement sur
le cheptel ovin, en dépit d’une surveillance constante […]. Mais comme
les hommes savaient défendre leur cheptel, la base de l’alimentation
des loups était constituée de petites proies et de charognes ».ns
compliquées qu’ont entretenues pendant longtemps l’homme et la bête. «
Encore aujourd’hui, quand les enfants viennent au musée, ils ont une
image très négative du loup », poursuit Marion Le Vée.
Un
animal sacré chez les Celtes Pourtant, le loup n’a pas toujours été cet
animal honni. Dans l’Antiquité, il fait partie du monde divin. Lug, le
dieu suprême de la mythologie celtique, est représenté accompagné de
deux loups. Symbole de la puissance de la nature, l’animal fait
référence à la force et la fertilité. Les guerriers n’hésitent pas à le
porter en totem, en recouvrant leur casque d’une tête de loup, en
partant au combat. La bête est aussi synonyme de sagesse dans la
tradition celtique bretonne. Bleiz (loup en breton) est le nom de l’un
des derniers grands druides dans la mythologie arthurienne, il serait
l’instructeur de Merlin l’Enchanteur.
La légende raconte qu’il vivait comme un ermite dans la forêt, entouré
de loups, et qu’il soignait les animaux. Plus près de nous, plusieurs
Vitae de saints bretons comptent dans leur histoire des loups comme
protagonistes, et l’animal revient régulièrement parmi les attributs
d’hommes d’Église : Brieuc, Hervé, Envel, Thégonnec, Ronan… « Les
contes traditionnels, comme les récits vécus, vont dans le même sens et
permettent d’établir un palmarès où la première place se joue entre le
cheval et le mouton, suivis du cochon, de la vache, de la chèvre et du
chien, explique François de Beaulieu, dans un ouvrage consacré au
sujet. Les attaques sur le bétail étaient courantes et pouvaient
provoquer des pertes localement importantes, spécialement sur le
cheptel ovin, en dépit d’une surveillance constante […]. Mais comme les
hommes savaient défendre leur cheptel, la base de l’alimentation des
loups était constituée de petites proies et de charognes ».
Un
animal diabolique La réputation du loup prend un coup à partir de la fin
du Moyen-Âge. On l’accuse de devenir anthropophage et de se délecter de
la chair humaine. « En effet, à cause des guerres secouant la région,
les cadavres sont laissés sur le champ de bataille, sans sépulture,
précise Marion Le Vée. Le loup en a profité pour se nourrir, par
facilité. À partir de ce moment-là, plusieurs histoires ont été
montées, notamment par l’Église, et on voit son image se dégrader ».
Les mémoires du Chanoine Jean Moreau, écrit après la Guerre de la Ligue
(1588-1598) en sont l’illustration. Il explique que les loups sont un
des fléaux de l’Apocalypse avec la guerre, la peste et la famine. « La
population commence à croire que les loups anthropophages sont des
morts ressuscités en forme de loups », note Pierre Le Buhan dans son
ouvrage « Le loup et l’homme » en Bretagne. Si certaines bêtes s’en
prennent à des êtres vivants et marquent durablement l’imaginaire
collectif régional, le phénomène reste cependant marginal. L’auteur
recense 81 victimes pour 89 attaques de loups entre 1590 et 1880, dont
plus d’un tiers se déroule juste après la fin de la Guerre de la Ligue.
Entre fantasme et réalité Ces quelques faits divers vont cependant faire la mauvaise réputation.
Ces
quelques faits divers vont cependant faire la mauvaise réputation du
loup, qui terrorise maintenant les campagnes bretonnes. « De nombreuses
superstitions sont nées autour de l’animal, poursuit Marion Le Vée. Il
existait plusieurs techniques pour le faire fuir : on faisait des feux
à l’entrée des villages toutes les nuits, on clouait des pattes de loup
sur les portes d’entrée des maisons, on évitait de prononcer son nom… »
Toute la société se met à vouloir l’éradiquer et on l’accuse maintenant
de propager la rage. Pourtant, « plus prudent que froussard, mangeur
d’homme si l’occasion lui en est donnée, le loup n’est qu’un prédateur
opportuniste cherchant à survivre », note François de Beaulieu.
Battues, empoisonnements et autres pièges vont se multiplier, d’autant
plus que la chasse au loup devient lucrative. À chaque bête tuée, le
chasseur reçoit une prime. Le coup de grâce est donné par la III
République qui, en 1880, décide de multiplier par huit ces primes.
En 1893, pour la prise d’un loup adulte, on recevait 100 francs, de
quoi acheter 55 kg de pain ! Avec quelque 300 bêtes recensées au début
du XIX siècle, le loup disparaît officiellement de Bretagne.
Ces
quelques faits divers vont cependant faire la mauvaise réputation du
loup, qui terrorise maintenant les campagnes bretonnes. « De nombreuses
superstitions sont nées autour de l’animal, poursuit Marion Le Vée. Il
existait plusieurs techniques pour le faire fuir : on faisait des feux
à l’entrée des villages toutes les nuits, on clouait des pattes de loup
sur les portes d’entrée des maisons, on évitait de prononcer son nom… »
Toute la société se met à vouloir l’éradiquer et on l’accuse maintenant
de propager la rage. Pourtant, « plus prudent que froussard, mangeur
d’homme si l’occasion lui en est donnée, le loup n’est qu’un prédateur
opportuniste cherchant à survivre », note François de Beaulieu.
Battues, empoisonnements et autres pièges vont se multiplier,
d’autant plus que la chasse au loup devient lucrative. À chaque bête
tuée, le chasseur reçoit une prime. Le coup de grâce est donné par la
III° République qui, en 1880, décide de multiplier par huit ces
primes. En 1893, pour la prise d’un loup adulte, on recevait 100
francs, de quoi acheter 55 kg de pain ! Avec quelque 300 bêtes
recensées au début du XIX siècle, le loup disparaît officiellement de
Bretagne en 1906.
Joseph Lohou (nov. 2018)
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