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Théodore
Hersart de LA VILLEMARQUÉ(1815-1895)
Théodore
Claude Henri Hersart de La Villemarqué naît le 7 juillet
1815 à Quimperlé, dans le Finistère. Il est le dernier né
d'une famille de huit enfants. Sous la Restauration, son père,
vicomte et membre de la Congrégation, est aussi député du
Finistère de 1815 à 1827. Sa mère, en aristocrate
soucieuse du bien-être de ses paysans, s'occupe à soulager
la misère autour d'elle. En sa compagnie, Théodore Hersart
de La Villemarqué apprend le breton. Dans son entourage
proche en effet, on ne s’exprime qu’en français. Après
avoir effectué des études au collège des Jésuites
d'Auray, ainsi qu’au petit séminaire de Guérande, le
jeune homme obtient son baccalauréat en 1833 à Rennes.
Ayant quitté sa Cornouaille natale, il monte ensuite à
Paris. L'étudiant fréquente alors l'École des Chartes, en
élève libre, ainsi que la faculté de droit.
Dans la capitale, il fréquente les salons de
l'aristocratie, celui d'Auguste Gourcuff notamment. Au
milieu d'autres gens d'esprit, La Villemarqué s'imprègne
de la culture bretonne. Au mois de février 1835, il
rencontre ainsi Jean-François Le Gonidec, lexicographe et
grammairien, qui l'aide à étudier l'écrit de la langue de
sa province natale. Depuis 1833, La Villemarqué parcoure
ainsi les campagnes de Cornouaille, prenant en note les
chants traditionnels des paysans et autres gens du peuple. A
ce travail de recensement, s'ajoute également l'étude et
l'annotation de ces textes. En 1837, le folkloriste publie
un ouvrage intitulé Essai sur l'histoire de la langue
bretonne. Il affirme dans cet ouvrage que le breton dérive
de l'ancien gaulois et est ainsi antérieur au français,
une thèse militante. Enfin, le 24 août 1839, paraît à
Paris la première édition du Barzaz-Breiz.
L'ouvrage connaît un succès immédiat, la presse se fait
l'écho du retentissement de la publication de ces Chants
populaires de la Bretagne auprès du public. Ainsi Les
journaux bretons et même parisiens publient ainsi des
articles de critique favorables aux textes exhumés par La
Villemarqué. Le Barzaz-Breiz est bientôt traduit à
l'étranger, notamment au Royaume-Uni. En France, c'est
aussi la langue bretonne que l'on découvre, ses qualités
poétiques et lyriques notamment. Ainsi l'écrivain George
Sand vante ces cinquante chants qu'elle place au " plus
haut niveau du génie des nations poétiques ". L'époque
est d'ailleurs à l'affirmation des identités régionales.
Au mois de septembre 1843, se créée une Association
bretonne sur le modèle de celle fondée par Arcisse de
Caumont en Normandie. Le folkloriste en est un des membres
les plus actifs.
En 1846, La Villemarqué épouse Clémence Tarbé. Le couple
aura quatre enfants. Peu de temps après, il se voit décerner
la Légion d'honneur et est élu en 1851 à l'Académie de
Berlin, avant d'entrer - suprême honneur - à l'Académie
des Inscriptions et Belles-Lettres en 1858. Au cours de ces
années, l'érudit poursuit ses
travaux de collecte des textes anciens, en Bretagne
et au-delà de la Manche. Il publie ainsi des
Poèmes des bardes bretons au VIème siècle en 1850,
La Légende celtique en Irlande, en Lambrie et en
Bretagne en 1859, ainsi que Myrdhinn ou l'enchanteur
Merlin en 1862.
En 1867 cependant, après la réédition du Barzaz-Breiz,
naît une intense polémique au sujet des cinquante textes
édités par le folkloriste. Déjà le contenu de l'ouvrage
avait suscité par le passé quelques réactions. Le vicomte
breton, qui s'était présenté en 1849 aux élections législatives
sur une liste républicaine, a choisit en effet une série
de chants à l'aspect militant. Voisines ainsi dans ces
chants populaires de la Bretagne les nobles, débauchés et
violents, et les paysans, soumis et profondément croyants.
A présent, on songe plutôt à la supercheries de l'Ossian
de James Macpherson, rédigé cent ans plus tôt. Les
premiers doutes sur l'authenticité des chants présentés
par La Villemarqué, jusqu'alors exprimés à mots couverts,
sont étalés publiquement. Celui-ci est accusé d'avoir écrit
de sa main ces chants populaires, ainsi que les mélodies
qui les accompagnent. Certains affirment même que
l'illustre membre de l'Institut, ne connaissant pas
suffisamment la langue bretonne, a écrit ses textes en français
puis les a fait traduire !
La Villemarqué se réfugie dans le silence et dédaigne de
participer aux débats. Plus tard en effet, ce sont les
qualités littéraires du Barzaz-Breiz que l'on apprécie,
davantage que le travail scientifique du compilateur. A la
mort de sa femme en 1870, il s'installe à Keransker, près
de Quimperlé, et décède le 8 décembre 1895. La polémique
ne s'arrête pas pour autant. Celle-ci trouve en 1964 un
ultime rebondissement. Donatien Laurent, ethnologue et
chercheur au C.N.R.S., découvre ainsi dans les archives
familiales, au manoir même de La Villemarqué, ses carnets
de notes. Ceux-ci permettent de reconstituer
le travail du folkloriste et de conclure à propos de leur
valeur. Certains chants bretons publiés en 1839 ont ainsi
été transformé par La Villemarqué, d'autres totalement
écrits de sa main. Il n'a de plus retenu du corpus réuni
par ses soins que les textes les moins grossiers, les
situant de manière arbitraire au Moyen Âge plutôt qu'à
l'époque moderne.
Sources
: Anovi-19° siècle(1815-1914)- Marc NADAUX