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Callac-de-Bretagne |
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Éoliennes : les riverains soufflent un vent contraire.
Six
à huit ans en moyenne, parfois plus : les projets des parcs éoliens
sont très longs à sortir de terre. Un sur deux est attaqué par les
voisins qui craignent le bruit ou un paysage défiguré.
Douze ans que
Sylvie Ritzentha-ler bataille .pour ne pas voir tourner des pales
d'éoliennes devant ses fenêtres. « Le problème, c'est le bruit, 24
heures sur 24, et les infrasons, qui se propagent sur 10 km, confie
cette sexagénaire. Des gens font des malaises cardiaques. » Elle craint
aussi que la maison qu'elle habite depuis trente ans perde « jusqu'à 30
% de sa valeur ».
Présidente
d'une association de riverains, elle connaît bien l'argumentaire de la
Fédération environnement durable, à laquelle elle est affiliée et qui
mène le combat partout en France, avec l'autre fédération, Vent de
colère. Pour ces opposants, organisés et déterminés, les éoliennes «
nuisibles », « inutiles », « non écologiques », « ne servent qu'à
enrichir, à notre détriment (impôts et surcoût de l'électricité), le
promoteur et une poignée de personnes intéressées ».
« Douze ans que ça dure... »
Le projet
veut implanter trois éoliennes à Chanteloup, près de Rennes. Après dix
ans de procès, les recours des opposants ont été rejetés. À présent, le
promoteur, VSB, veut le relancer. Quelque soixante-dix opposants ont
repris les réunions publiques et envisagent une nouvelle action en
justice. Sylvie Ritzenthaler ne cache pas sa lassitude. « Douze ans que
ça dure, douze ans d'anxiété. On est venu habiter ici pour être
tranquille. Maintenant, on se pose la question de déménager, mais la
maison sera difficile à vendre... »
Des vraies raisons cachées.
En 2006,
une étude de l'agence de sécurité sanitaire (Afsset devenue Anses)
avait conclu que « les émissions sonores des éoliennes ne génèrent pas
de conséquences sanitaires directes », mais qu'elles « peuvent être à
l'origine d'une gêne - souvent liée à une perception négative des
éoliennes - tant au niveau de l'appareil auditif que des effets liés à
l'exposition aux basses fréquences et aux infra-sons. »
Douze ans, c'est
aussi le temps qu'il a fallu à Jan Jürgens, développeur de sites
éoliens, pour mener à terme son dernier projet. Près de la forêt de
Lanouée, à Mohon (Morbihan), les dix machines de 150 m de haut ont été
mises en service en juin. Une installation de plus de 30 millions
d'euros financée par un fonds d'investissement allemand. Dans cette
campagne peu peuplée, les éoliennes poussent comme des champignons.
Convaincre
les élus de la commune et trouver des terres à louer n'a guère posé de
problème, raconte Jan Jürgens. Mais ça n'a pas empêché qu'il se heurte,
lui aussi, à un front d'opposants. Deux riverains ont contesté le
permis. Après avoir monté une soixantaine de projets, Jan Jürgens est
convaincu que les vraies raisons des réfractaires restent souvent
cachées : « II y a toujours deux camps, ceux qui vont en bénéficier et
ceux qui n'ont rien. C'est toujours chez ces derniers que se trouvent
les opposants... »
Dans ses
statistiques personnelles, « un projet sur 4 ou 5 aboutit ». Mais,
ajoute-t-il, « je n'en ai jamais vu échouer à cause des riverains.
Quand les dossiers sont bien montés, les recours ne font que les
retarder ». Damien Mathon, directeur du Syndicat des énergies
renouvelables (SER) abonde : « Un projet sur deux est attaqué. Dans 75
% des cas, les recours sont invalidés par les tribunaux administratifs.
» Mais, note-t-il, il faut en moyenne « six à huit ans » avant de
produire le premier kilowattheure.
Serge POIROT.-Ouest-France du 10 décembre 2016.
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