Callac-de-Bretagne

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L’École n’a pas été inventée par Jules Ferry


guizot

François Guizot

Avant lui, François Guizot, est nommé ministre de l'Instruction publique de la monarchie de Juillet en 1832. Toutes les réussites qu'on attribue à Jules Ferry sont dues aux réformes de Guizot. Ses lois distinguent deux types d’école, publique et privées, les premières financées par l'État, les secondes par des fonds privés, et elles obligent les communes de plus de 500 habitants à entretenir une école primaire. En 1881, avant la législation Ferry, 86% des hommes et 79% des femmes de 20 ans sont alphabétisées. Le protestant Guizot avait une haute idée de l'instituteur, sorte de saint laïque qui préfigure la figure des hussards noirs de la République : « C'est la gloire de l'instituteur de ne prétendre à rien au-delà de son obscure et laborieuse condition, de s'épuiser en sacrifices à peine comptés de ceux qui en profitent, de travailler enfin pour les hommes et de n'attendre sa récompense que de Dieu. » Il lance la réflexion sur la formation des enseignants. Les écoles normales d'instituteurs, inspirées du modèle allemand, seront créées dans les années 1850, non sans débats, car on craignait que cette formation uniforme n'induise un formatage intellectuel.

 Le souci d'instruire le peuple

Ne date donc pas d'il y a un siècle? Dès le VIe siècle, des écoles se mirent en place autour des monastères, des évêchés et des paroisses. Le concile de Vaison en 529 demanda par exemple aux prêtres d'ouvrir des écoles dans leur propre demeure, une mesure confirmée en 789 par un «capitulaire» de Charlemagne faisant obligation aux monastères et aux prêtres d'instruire gratuitement les enfants pauvres. Le concile de Mayence (813) puis celui du Latran (1179) rappellent que les églises locales doivent prendre en charge l'instruction du peuple. Il y a de beaux textes sur le souci que les religieux avaient de ces enfants. À propos des enfants abandonnés, on lit dans la règle des chevaliers de l'hôpital du Saint-Esprit cette belle instruction: «Vous aurez soin de leur donner pour maîtres les plus doctes d'entre vous, qui soient doux et qui les aiment. » C'était au XIIe siècle... On retrouve des textes de ce genre chez les maitres de Port-Royal et chez les Frères des écoles chrétiennes, fondés par saint Jean-Baptiste de La Salle au XVIIe, grand siècle pédagogue sait que le rôle de l'État était d'amener chaque individu au plus loin de ses capacités. Il inspirera Guizot.

Parmi les pédagogues qui ont inspiré les fondateurs de l'école républicaine, il y a aussi les maîtres jansénistes.

Étonnant ?

Le Nouveau Dictionnaire de pédagogie, supervisé par le très laïque Ferdinand Buisson, rend hommage aux expérimentations antérieures, et il y a un article très élogieux sur les écoles de Port-Royal : «Quelle hauteur de vues dans cette manière de concevoir l'éducation! Comment ne pas admirer ce respect profond de la personne humaine et de l'âme de l'enfant, ce saint tremblement en présence de cette énigme, l'enfant, qui peut devenir un saint ou un démon. » L'école républicaine avait une visée édifiante... Mais aussi un but politique. Elle était vue comme un moyen de souder la communauté nationale autour de l'idée de patrie, ce qui n'était pas le cas de l'enseignement de l'Église, universelle par essence. 