Callac-de-Bretagne

Page Retour 



- LA VERRIERE DE LA DORMITION[1]  de DUAULT -


Note de M. R. Couffon (Bulletin de la Société d'Emulation des C-du-N.) communiquée par M. Le chanoine B. Loyer, curé doyen de St Nicolas-du-Pélem (22 sept. 1943).
La verrière de la dormition de la Sainte Vierge date de 1534.
Si la verrière n'est datée ni signée, du moins porte-t-elle la précieuse inscription suivante en petites capitales :
"Messire Charles Moricze Bahezre, Conseiller du Roy, son lieutenant général à Kerahès, sieur de Quinquis Rosviliou a fait faire ces vitres".
Et au-dessous :
François Bahezre de Lanlay a fait restaurer cette verrière en 1876.
Or, c'est le 20 juin 1585 que Morice Bahezre fut nommé par le roi Henri IV son lieutenant général en la sénéchaussée de Carhaix à la place de feu Henri de Conaber.
Il prêta serment le 13 juillet suivant et fut installé le 19 juillet, après avoir payé son office de cinq cents écus d'or soleil et soixante-douze écus pour droit de serment. Il mourut sans hoirs en ligne directe avant le 13 septembre 1624, date d'un appointement entre héritiers.
Par acte du dimanche 11 mars 1594, son procureur indiquait au général de Duault qu'il avait l'intention, avec sa permission, de faire élever une tombe avec escabeau, ce qui lui fut accordé par les paroissiens à l'endroit où il lui plairait. Ils l'autorisèrent également à jouir et à disposer de l'une des places de vitres dudit lieu dans la chapelle St Yves de l'église, à la charge d'y mettre de nouveau une vitre contenant telles armoyries que bon lui semblera.
C'est cette verrière que nous admirons encore, verrière aussi parfaitement datée et qui fut exécutée selon toute vraisemblance à Carhaix où il existait un atelier.



La verrière de la Dormition.

Dans le tympan, la mouchette [2] supérieure est décorée des armes de Bahezre "D'argent au lion de gueules armé et lampassé de sable". Au-dessus, la mouchette gauche représente la sainte Trinité : Dieu le Père, en robe blanche et manteau rouge. Dieu le Fils, nu dans un manteau rouge et portant sa croix; au-dessus, la colombe du Saint Esprit sur un fond or rayonnant.
La mouchette droite représente le couronnement de la Vierge. Les précédents personnages sont semblables mais le Christ tient un sceptre : [3]; ils posent la couronne sur la tête de la Vierge, à genoux, les mains jointes, et vêtue d'une robe jaune en damas gismétiques et d'un manteau bleu.
La verrière proprement dite représente, répartie sur les trois lancettes [4], la dormition de la Vierge sur un lit à rideaux verts, la Vierge nimbée d'or et vêtue d'une robe jaune est étendue sous une couverture bleue et tient un cierge. Près d'elle, à la tête du lit, St Jean nimbé de bleu et portant une robe de damas jaune à collet rouge. Devant lui, au premier plan, deux apôtres lisent : l'un porte une robe violette bordée, une capuche et un manteau vert : il est nimbé d'or. Près de lui, à genoux, le second nimbé de violet rose porte une robe rouge et un manteau de damas jaune à agraphe verte.
A genoux, au milieu de la scène, un autre apôtre porte une robe verte et une casaque rouge à galons or et à dessins blancs.
(La tête et les pieds ont été refaits).
Au pied du lit, debout, un apôtre en robe rouge à ceinture rouge  et col bleu (la tête est moderne). A gauche, au pied du lit, un apôtre en robe jaune (tête moderne).
Derrière le lit, de droite à gauche, Saint Pierre (tête moderne), nimbé d'or en surplis, bénit la Vierge, puis un autre apôtre en manteau violet, autre à nimbe rose, autre en nimbe d'or et en manteau rouge; enfin, le dernier en robe verte à manche violette.
Le carton de cette verrière, de très bonne facture, appartient à l'école des Pays-Bas.
Dans la vitre, éclairant le pignon de l'aile nord, deux panneaux à peu près illisibles dont l'un paraît représenter un abbé tenant une crosse et l'autre Ste Hélène.

1er novembre 1945
Monsieur le Recteur,

Poursuivant mes recherches sur nos anciennes verrières, j'ai été assez heureux pour retrouver l'origine du carton de votre beau vitrail.
Le peintre verrier a copié à peu près intégralement une gravure anversoise d'Adrien Collaert exécutée d'après un dessin de Ian Van der Straet dit Ian Stradamus, né à Bruges en 1523 et décédé le 2 novembre 1605 à Florence.
Adrien Collaert, graveur célèbre, était né à Anvers vers 1560 et fut inscrit comme fils de maître à la Corporation de Saint Luc en 1580. Il épousa en 1586 Justa Galle, fille du célèbre graveur Philippe Galle.
Cette gravure célèbre semble avoir eu beaucoup de succès en Bretagne. Dans un manuscrit m'appartenant, je l'ai retrouvée employée comme modèle d'un tableau des Cordeliers de Quimper. J'ai fait à Rennes une conférence à ce sujet qui est à l'impression. Je vous l'enverrai dès qu'elle sera imprimée (elle est au tirage) et vous envoie en attendant de très mauvaises épreuves des planches uniquement pour que vous vous rendiez compte de l'identité de votre verrière et de la gravure.

Sources.
"Histoire de Duault" par le recteur Joseph Sérandour -1942-1945.

Notes.
[1] Dormition,
la mort de la Vierge Marie.
[2] Mouchette, découpure en forme d'ellispse, qui se combine avec les soufflets deans les fenestrages de style gothique..
[3] Sceptre, espèce de bâton de commandement, insigne de la royauté.
[4] Lancette, arc de forme allongée.




 


 

                

  

 

 
                                             
Joseph Lohou (avril 2012)
                                                          

 

© Tous Droits Réservés (Joseph Lohou)