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Le droit féodal
Cet héritage romain semble perdu pour plusieurs siècles. Ce
que l'on sait de l'époque carolingienne et du premier âge féodal, intéresse
essentiellement les rivières qui comme les chemins, sont sous le contrôle des
comtes. Ces derniers étaient tout à la fois chargés de les administrer et de
punir les délits qui pouvaient être commis. Ce pouvoir comtal était parfois
partagé avec les communautés d'habitants. On en arrivait ainsi, dans certains
cas, à concevoir un bien commun dont le souverain gardait le seul contrôle et
les particuliers l'usage.
Ces quelques règles ont été profondément bouleversées par la
féodalité. Le droit féodal se caractérise avant tout par la confusion de la
souveraineté et de la propriété. Le seigneur exerce sur les terres et sur les
hommes un pouvoir de contrôle et de juridiction. Il exerce la police et rend la
justice. Comme il exerce son pouvoir sur le pays, le seigneur va faire entrer
les rivières sous son autorité. Cette prérogative devient insensiblement proche
de la propriété. En fait, ce n'est pas de propriété qu'il faut parler mais de
justice : la justice que le seigneur impose sur la forêt, les ponts, sur les
chemins, s'exerce aussi sur les rivières. Le contrôle de la rivière s'exerce
alors sur tous les usages : le simple puisage, la navigation, le flottage du
bois et l'installation des moulins. Or les moulins sont essentiels, ils
participent à "la révolution technologique médiévale". Ils sont fort
nombreux dès le XIème siècle. Le droit du seigneur est très net. Il le fait
installer sur la rivière qui coule en son fief ; il impose aux habitants de la
seigneurie de venir moudre leurs grains en contre partie du paiement d'une
taxe. C'est le ban du moulin. Le seigneur peut aussi concéder le droit de
construire un moulin. Tout cela marque son pouvoir sur la rivière. On en
viendra à dire que la rivière qui coule dans le fief appartient au seigneur du
fief.
Toutefois, et c'est l'une des marques de la confusion
féodale, les riverains, les communautés d'habitants ne sont pas démunis : ils
revendiquent des franchises, des libertés et celles-ci sont rapportées dans les
coutumes. La résistance des communautés marque bien l'importance que le libre
accès à l'eau tient dans le groupe et combien son usurpation devient
intolérable. L'eau, en effet, comme l'herbe des pâturages et les forêts
appartient à tous. Ils sont les éléments de la vie : ils ont le caractère de
biens qui se renouvellent sans cesse et ne peuvent être la propriété d'un seul.
L'urbanisation impose d'autres contraintes : puits
privatifs, fontaines publiques. Ajoutons à la confusion féodale la grande
diversité régionale. Il est des pays où l'eau est rare, d'autres où il faut
lutter contre elle...
Joseph Lohou(25 janvier 2011)