La démocratie Athénienne
Dès
le 7ème siècle et surtout au 6ème siècle av. J.-C. les cités du monde
grec furent confrontées à une grave crise politique. Le commerce se
développe, notamment avec l'apparition de la monnaie au VIe siècle , en
provenance de la Lydie de Crésus. Ce développement extraordinaire du
commerce méditerranéen a deux conséquences : la première, c'est que les
agriculteurs grecs, peu compétitifs face à ceux de la Grande Grèce
(Péninsule Italienne + Sicile) dans la mesure où la Grèce est très
aride et peu fertile, n'arrivent plus à vendre leurs produits, et
s'endettent pour survivre, et ce en premier lieu concernant les paysans
non-propriétaires. Et pour rembourser leurs dettes, les paysans étaient
condamnés à l'esclavage. Ces esclaves forment une concurrence déloyale
pour les petits artisans et les urbains, engendrant chômage et
mécontentement chez les moins riches.
Par
ailleurs, une nouvelle bourgeoisie, composée d'artisans, d'armateurs se
développe dans les villes, grâce aux échanges commerciaux. Cette
bourgeoisie a dorénavant les moyens de s'acheter des équipements
d'hoplites, les soldats de la Grèce Antique, et revendiquent plus
d'accès au pouvoir et d'égalitarisme dans un monde politique dominé par
les nobles. Ces mécontents n'hésitent pas à faire appel à des
puissances extérieures, comme par exemple d'autres cités, pour
renverser les tyrans, ce qui engendre des troubles et des guerres. Pour
répondre à ces deux enjeux, les cités grecques durent revoir leur
conception du politique. Ces réformes prirent une voie inédite, dans le
cas de la cité Athénienne, qui aboutira au 5ème siècle avant JC à un
régime politique nouveau : la démocratie.
Fonctionnement de la démocratie athénienne
La
démocratie Athénienne repose sur le pouvoir des citoyens. Jusqu'en 451,
pour être citoyen athénien, il faut être un homme né de père athénien,
et avoir suivi l'éphébie (une formation militaire et civique) de 18 à
20 ans, c'est-à-dire être capable de défendre la cité. En 451 av.
J.-C., Périclès modifie la loi et accorde la citoyenneté à la seule
condition d'avoir un père citoyen et une mère fille de citoyen, en vue
de limiter l'essor du nombre de citoyens du à des mariages mixtes (un
citoyen et une métèque, ou encore un citoyen et une esclave).
La
démocratie Athénienne est très éloignée des démocraties actuelles : en
effet, les esclaves étaient considérés comme des biens, les femmes
comme des mineurs. Quant aux métèques (les étrangers à la cité, à
différencier des barbares, les non grecs), s'ils pouvaient à titre
exceptionnel avoir droit à la citoyenneté Athénienne, en remerciements
pour services rendus, une telle décision ne pouvait être prise qu'à la
suite d'un vote de l'Ecclésia réunissant 6000 citoyens. Ils étaient
donc de facto exclus de la citoyenneté Athénienne.
Au final,
les citoyens forment une classe limitée : pour être citoyen, il faut
avoir plus de 20 ans, être un homme, ne pas être métèque, ni esclave.
Démétrios de Phalère fait état de 21 000 citoyens, 10 000 métèques et
400 000 esclaves. Et pour un citoyen, il y a une femme plus les
enfants, soit si l'on considère 3 enfants par femme par exemple, 80 000
personnes non citoyennes faisant partie d'une famille dont le chef de
famille est citoyen. Au final, seuls 21 000 personnes sont citoyens sur
un total d'environ 500 000 habitants, soit une personne sur 25…
Les institutions politiques
La
démocratie athénienne n'a jamais eu de constitution écrite officielle,
mais ses différentes institutions étaient clairement reconnues de tous,
et évoluaient au gré des luttes politiques. Les principales
institutions étaient les suivantes : l'Ecclésia, la Boulê, Les
Magistrats, l'Aréopage, et l'Heliée.
L'Ecclésia
vote les lois en général avec la présence de 5000 citoyens, selon
Thucydide. Les votes se font à main levée, et à la majorité simple.
N'importe quel des citoyens peut prendre la parole en vue de proposer
une motion. Et, pour se préserver des risques inhérents à la démocratie
directe, l'Ecclésia peut voter une fois par an un bannissement d'un
citoyen : c'est l'ostracisme (mot provenant des ostrakon, tessons de
poterie où étaient inscrit les noms des personnes que l'on désire
expulser). Cette pratique perdurera jusqu'en -417 avant JC.
La Boulè
étaient les conseils des différents régimes grecs, à savoir cinquante
membre représentant chacun une tribu parmi les dix distinguées par
Clisthène. Les bouleutes, membres de la Boulè, sont choisis par tirage
au sort parmi les citoyens volontaire de plus de 30 ans
Les
magistrats quant à eux s'occupaient des affaires courantes et de la
bonne application des lois. Ils sont choisis après la dokimasia, qui
vérifie que les candidats à la magistrature remplissent toutes les
conditions requises (âge, citoyenneté, …) et qu'ils sont dignes de
devenir des magistrats. Les magistrats doivent exercer leur pouvoir de
manière collégiale et jamais de manière individuelle. Les magistrats et
les ambassadeurs sont contrôlés à la fin de leur mandat, afin d'éviter
toutes dérives tyranniques.
L'Aréopage
quant à elle est une institution politique, dont le but est avant tout
de conserver les lois, et de respecter la constitution. Constitué
d'anciens nobles, l'Aréopage est l'institution athénienne la moins
démocratique et la plus aristocratique
Enfin, l'Héliée
est un tribunal populaire, composé de 6000 citoyens, toujours âgé de
plus de 30 ans et répartis en dix classes de 500 citoyens. L'accusation
était l'initiative d'un citoyen, récompensé financièrement en cas de
condamnation et d'amende. Les verdicts de l'Héliée étaient sans appel
et immédiatement exécutoires, on comprend dès lors l'important rôle
politique que les tribunaux de l'Héliée prirent.
Le
problème constitutif de l'Heliée est le principe de la rémunération des
accusations, favorisant la délation professionnelle (sycophantes), ce
qui divisera la cité et provoquera une grave crise de la démocratie
Athénienne face aux Aristocrates.
Conclusion
La
démocratie Athénienne n'était qu'une solution parmi d'autres pour faire
face à la crise du 6ème siècle avant JC. Si celle-ci est très éloignée
des démocraties actuelles - 4% des Athéniens sont citoyens, les
esclaves n'ont aucun droits civiques -, la démocratie Athénienne est un
des précieux héritages que les civilisations européennes hériteront,
plus de 2000 ans plus tard. La démocratie, à l'époque simple curiosité
politique, deviendra de nos jours le ciment de l'identité européenne.
J.LOHOU (octobre 2018)