Callac-de-Bretagne

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Le Cheval de trait Breton

cheval breton

L'une des questions le plus à l'ordre du jour dans l'économie rurale de la Bretagne, c'est bien assurément celle du cheval. Elle y prime d'emblée dans l'ordre zootechnique. De longue date, elle y est l'objet constant de préoccupations particulières de tout un monde intéressé, soit personnellement, soit par simple goût, soit par un devoir de leur charge, aux choses de l'élevage. En réalité, le cheval constitue l'une des meilleures sources de revenus de l'industrie agricole du pays.


La population chevaline de la Bretagne comprend plusieurs variétés. Ici, c'est le gros limonier ; là, c'est le trait moyen, le trait léger, le bidet ; ailleurs, le postier ; dans quelques contrées la bête de sang ou de demi-sang, dont, la catégorie présente elle- même des sortes très diverses : type de selle, d'attelage, roadster, cob, poney, hunter. Les animaux de volume le plus important se rencontrent dans les régions où la terre est le plus riche et le ciel le plus clément ; les sujets intermédiaires, petits, dans celles de qualité géologique inférieure ou pauvre, dans les districts montagneux, d'accès difficile, moins privilégiés sous le rapport des circonstances atmosphériques. On peut dire ainsi de la Bretagne qu'elle est une véritable mosaïque hippique, ordonnée suivant les conditions du sol, du lieu, du climat, en parfaite harmonie avec les lois de la nature.
Nous ne saurions songer à parler, en un article de cette revue, de chacune des variétés que nous venons d'énumérer, renvoyant pour cela les amateurs aux Ouvrages où il en est traité, nous nous contenterons de donner un aperçu succinct sur l'espèce qui a le plus de recherche et de valeur commerciale, de nos jours, et qui est en train de conquérir une faveur exceptionnelle dans le domaine de l'élevage : nous avons nommé le trait.

Le trait breton moderne descend de l'étalon percheron, employé, vers 1840, comme améliorateur avec la jument du pays, mais itt etit surtout les progrès et la confirmation de sa race à une sélection judicieusement pratiquée dans l'accouplement entre mâles et femelles indigènes, qui lui a communiqué un cachet propre. Ses caractères principaux sont les suivants : tête moyenne carrée, expressive, oreilles petites, souvent piquées en avant ; yeux vifs ; encolure peu longue, légèrement rouée, avec crinière abondante ; dos large et court ; hanches prononcées ; croupe large, fendue, plus ou moins inclinée ; épaule plutôt courte ; poitrail large, descendu ; quartiers très musculeux aux avant-bras, aux cuisses et aux fesses ; genoux étendus ; canons et paturons forts et courts ; sabots ouverts. Complétons cette description sommaire par une mention spéciale à la rusticité et à la docilité de son caractère, double qualité qu'il tient en partage d'un héritage atavique, du régime de son existence, de son élevage et de son dressage.

Le type est un cheval de 1 m. 59 et 690 kilo environ, ramassé, trapu, près de terre, doué d'un certain influx nerveux, capable de remplir excellemment les fonctions de limonier, d'ouvrier de culture et de tracteur en mode de force ou d'allure accélérée.

Comme limonier, le trait breton défie n'importe quel autre de son poids. Franc de collier, mordant et tenace au démarrage, poussant de l'avant avec une énergie soutenue, parfait dans l'action de reculement, il réunit le maximum de qualités nécessaires à ce service. Chemins raboteux, boueux, pleins d'ornières, raidillons et côtes à monter ou à descendre, tout cela lui semble égal : il avance toujours d'un pas régulier, sans-à-coups, ainsi que sur le plat. C'est donc un cheval merveilleux pour les gros charrois.

L'exploitation agricole possède en lui l'animal à tout faire et peu exigeant comme nourriture. Commode à manier, à modérer ou à activer, il travaille comme on veut à la charrue et autres instruments de labour. Il s'adapte avec une pareille facilité aux machines à. grand rendement faneuse, moissonneuse, etc... Un enfant peut le conduire, un garçon, une jeune fille  en mènera trois ou quatre attelés ensemble, et si vous vous trouvez sur la route du marché, un jour, vous pourrez assister au passage de maintes voitures chargées d'hommes, de femmes, qu'emporteront au trot rapide les mêmes chevaux que vous aurez remarqués, la veille, près d'un village, transportant la pesante charre¬tée de fumier ou creusant patiemment le sillon.

Allez à la petite vitesse d'une gare, sur quelque réseau que ce soit : vous avez chance d'y voir aussi un trait breton, employé à la traction des lourds wagons, tirer sur eux à casser ses chaînes, ou attelé à un camion qui, tout à l'heure, fera en vitesse le tour de la ville pour livrer à domicile les colis, caisses et balles de marchandises.

L'exposé seul de ces aptitudes si variées indique que la race convient admirablement au service de l'artillerie. De fait, la remonte l'a tenue constamment en particulière estime et l'a prouvé largement par de très fréquents et très gros achats dans ses centres commerciaux, en temps de paix comme au cours de la guerre qui vient de bouleverser le monde. Mais, témoignage plus significatif encore : une note même de la direction de l'artillerie au Ministère de la Guerre a stipulé expressément, il y a quelques années, que le breton fourni par le dépôt de Guingamp est celui qui parait réunir le mieux les qualités du cheval d'artillerie. Ou sait que le dépôt de Guingamp se recrute en Bretagne, pour plus des  4/5ème dans !e département du Finistère, d'après une statis-tique parue.


(A suivre)    F.-M. BLÉAS- Paru dans le journal "Buhez Breizh" en mai 1919.

Joseph Lohou (mai 2016)