Le
Chemin de Croix de Callac.
Chemin
de croix-Petit Historique.
Le
chemin de croix est une dévotion très ancienne, dont
l’origine doit être située à Jérusalem.
Les moines franciscains avaient obtenu des Turcs, au
XIVème siècle,
la garde des Lieux Saints, notamment de la Via
Dolorosa qui allait, du temps de Jésus, du tribunal
de Pilate au Calvaire (le Golgotha).
Très
vite on transposa ailleurs, en plein air ou dans les
églises, cette Voie Douloureuse
empruntée
par le Christ lors de sa Passion. Pour la jalonner, on
marqua de croix ou de tableaux les étapes (ou stations)
parcourues par Jésus portant sa croix
vers
le Calvaire. On stationnait, devant chacune d’elles,
réparties dans l’église, pour méditer et prier.
L'ancien et le nouveau chemin de croix.
En 1873, à la construction de l'église Saint-Laurent, la
famille PHILIPPE-LE GARS
avait prit en charge les 14 stations
du chemin de croix et la commande passée à la
Maison VERRELOUET, 24,rue Bonaparte, 17° arrondissement
à Paris. Mis en place en 1882, le
chemin de croix, du style "Art
Saint-Sulpicien"[6] était
encore présent en 1947, un peu défraîchi, le plâtre
écorné et on parlait depuis quelques temps d'une
restauration ou d'un changement ; restait à trouver la
bonne âme assez généreuse pour le faire exécuter. Elle
vint de la part des derniers descendants de la famille
GUIOT encore présents à Callac, Madame Alice Marie
GUIOT, veuve de Frédéric LE HUÉROU-KERISEL et de sa
fille Alice, célibataire. Elles voulaient laisser à
l'église Saint-Laurent, une oeuvre qui serait
l'équivalence des fonts baptismaux, don que fit en 1884
la tante paternelle et marraine Alice Marie Julie GUIOT
et son mari, Édouard Pierre COIRRE, avoué près de
la Cour d'appel de Rennes.
En
1940, après le décès de son recteur Louis LE COZLER(°
1872), originaire de Trémargat, la paroisse de Callac
voit nommé à sa tête un nouveau recteur, moderne et
cultivé, mais d’un abord plus réservé que le précédent,
débonnaire et familier. Les
premiers contacts furent délicats avec les paroissiens et
les années de guerre et d’occupation n’arrangèrent
pas les relations.
Alice,
célibataire
originale, n’eut de cesse que de consacrer son
temps et une certaine somme à la conception et au
changement du chemin existant par un moderne chemin de croix
réalisé par une connaissance
brestoise, peintre connue, Monique CRAS[1) de Paris. Au
départ ce choix n'eut pas l'honneur de plaire au curé
comme nous le verrons dans sa lettre citée ci-dessous.
L'avis du curé Jean Marie LE DIOURON.
Voici
donc ce qu'écrivait le chanoine Jean Marie LE DiOURON,
curé, le 23 février 1947, dimanche de Carême:
«Bénédiction
solennelle d'un nouveau Chemin de Croix par son Excellence
Monseigneur COUPEL, évêque coadjuteur de Saint Brieuc,
C'est encore Mademoiselle Alice LE
HUÉROU-KÉRISEL
et sa mère Alice Marie GUIOT,
veuve LE HUEROU-KERISEL,
qui ont fait don de ce Chemin de Croix qui a été
fait par Mademoiselle Monique CRAS.
Chaque
panneau mesure 1,20m par 1,1Om. C'est de la
peinture sur bois (contre plaqué). Mademoiselle LE HOUÉROU-KÉRISEL
en avait passé commande, de sa propre initiative,
sans même me consulter. Quand j'ai été mis au
courant, je me suis rendu à Paris, à l'atelier de
Mademoiselle Monique CRAS, pour me rendre compte de
ce qu'elle était entrain de faire. J'avoue que
j'ai d'abord été effrayé par!e genre de son travail, en
pensant à la réaction de mes paroissiens moyens.
J'ai longuement discuté avec l'artiste pour essayer
d'obtenir qu'elle tienne compte du « consommateur »,
Peine perdue, Il faut reconnaître que l'œuvre n'était
pas sans caractère, et qu 'il faut bien admettre que
chaque artiste a son style et sa technique. »
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Tableaun°11
« Jésus est cloué sur la croix
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Tableau
n° 3 « Jésus tombe sous le poids de la croix »
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Détail
du tableau n° 3
Le personnage
situé à gauche de ce tableau, qui représente une
femme au costume très riche en couleurs,
très
représentatif
d’une femme berbère marocaine, témoigne
du style orientaliste du peintre Monique CRAS, qui
fut une des protectrices de la jeune peinture
marocaine et qui fréquenta avant guerre le Maroc et le désert
du Hoggar.
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Quelque mois après je suis retourné à Paris, Cette fois il
y a eu une expertise, faite du point de vue «
expression religieuse » par deux artistes,
un prêtre et un laïc, nettement favorable à
Mademoiselle CRAS, Je suis rentré sans avoir décidé
absolument si, oui ou non, je prendrais le chemin de
croix, Je devais une dernière fois après qu'il aurait été
complètement terminé, retourner le voir, pour me
prononcer définitivement,
Un beau jour, j'ai reçu un mot de Mademoiselle CRAS
m'avertissant que le chemin de croix était expédié à
mon adresse, Elle me le mettait d'autorité dans la main.
Après coup, j'avoue que je ne l'ai pas regretté. C'est
un artisan de Guingamp, Monsieur LE GRAET qui est venu se
charger de l'encadrement et de la mise en place.
Entre
temps, on avait entrepris une campagne de presse pour préparer
les paroissiens a accepter leur nouveau chemin de croix,
On prévoyait que pour certain, ce serait un peu dur à
digérer. L'ancien chemin de croix était en plus pur «
Saint Sulpice » en plâtre authentique ;
tout ce qu'il y avait de plus banal. de plus inintéressant.
Plusieurs stations étaient plus ou moins détériorées.
Il avait été offert par la famille PRIGENT-PHILIPPE.
Madame Madeleine Claire BODIN, veuve de Jules PRIGENT, dûment
prévenue et reconnaissant le peu de valeur de son
chemin de croix accepta de bonne grâce qu 'il fût
enlevé et remplacé par un autre, C'est Monsieur le
recteur de Goudelin qui s'est rendu acquéreur de ce
chemin de croix, Il l'a fait réparer et poser dans son église
paroissiale. Quand tout fut prêt, Monseigneur COUPEL répondit
avec empressement à la demande que je lui adressai de
venir à Callac procéder solennellement à la Bénédiction,
à l'Erection Canonique du nouveau chemin de croix.
Monsieur le Vicaire Général BROCHEN accepte de chanter
la grand 'messe. Ce fut une belle fête paroissiale,
quoique contrariée par un temps de neige et la paroisse a
gardé avec reconnaissance le souvenir de la première
visite que nous fit ainsi son
excellence Monseigneur COUPEL. qui gagna tout de suite la
sympathie de tous grâce à sa simplicité et à son
affabilité. Désormais, « le Chemin de Croix de
Callac » est en quelque sorte entré dans les mœurs.
On en a beaucoup parlé. On continue de le discuter. Ce
qui est certain, c'est qu'il n'est pas indifférent ;
il supporte d'être regardé, examiné. II est
expressif, quoique
toutes les stations ne se valent pas quand l'éclairage
est bon, il y a certaines stations qui sont vraiment
belles, dont les couleurs et les formes, les lignes
produisent, sur ceux qui loyalement essayent de se mettre
en sympathie avec elles, un profond sentiment de
convenance religieuse, Évidemment il en a qui n’y
comprendront jamais rien…
La dernière ligne de cette lettre de Jean
Marie LE DIOURON laisse à penser que les adversaires de
ce nouveau chemin de croix manquaient, suivant l’avis du
recteur, d’un brin de sens artistique…
Sources.
ROLLAND, Jean-Paul-
Monographie
de l’église Saint-Laurent de Kallag
(Callac-der-Bretagne)
AD22- GENEARMOR- CORAIL-NET- GENEABANK
Notes.
[1)
CRAS, Monique, (° Brest 1910- +12.2007
Paris-inhumée à Brest le 21 décembre 2007)- Artiste-Peintre , ancien premier
prix de l'Académie des Beaux-Arts, musicienne. Elle
expose au Salon des Artistes Français à partir de 1926,
puis au salon des Indépendants et au Tuileries. Elle
peint des paysages d'Espagne et d'Afrique du Nord.
Ses oeuvres sont exposées dans plusieurs galeries
européennes et son chemin de croix est depuis 1947 dans
l'église St Laurent de Callac.
Joseph
LOHOU (août 2007)
(mise à jour de février
2008)