Callac-de-Bretagne

Page Retour 



                
                                      Du calendrier Julien au calendrier Grégorien.

 

 

Petit Historique.

 

Le mot calendrier vient du latin « calendae », premier jour du mois chez les romains et désigne un système de division du temps en années, mois, semaines, jours…

Le calendrier actuel est dit « grégorien », du nom du pape Grégoire XIII[1] qui l’a mis en place en 1582. Le précédent calendrier dit « Julien », fut  introduit par Jules César en 48 avant Jésus-Christ, soit l’an 708 de la fondation de Rome.


Modification du calendrier Julien


Jules Ceasar.
 »Caius Julius Caesar, Imperator »

 

Le calendrier julien a une année-origine fixe, la fondation de Rome en 753 avant Jésus-Christ.  Jules César modifie le calendrier romain existant pour remédier au désordre lié à l’existence d’un mois intercalaire que les pontifes plaçaient librement . Il fonde sa réforme sur les travaux de l’astronome grec Sosigène qui estime la durée de l’année à 365 jours et 6 heures . Un cycle de 4 ans est mis en place, avec 365 jours pour les 3 premières années et 366 pour la quatrième année dite bissextile. Le jour supplémentaire est introduit en février.

Mais la durée de l’année julienne dépassait de presque 12 minutes l’année des saisons ou année tropique c’est à dire l’intervalle moyen de deux retours consécutifs du soleil à l’équinoxe de printemps . On assiste alors à une lente dérive de 3 jours en 400 ans, qui perturbe la date de Pâques, fête mobile. En effet, le concile de Nicée , en 325,après 3 siècles de conflits, a fixé une règle  "  Pâques est le dimanche qui suit le 14e jour de la Lune qui atteint cet âge au 21 mars ou immédiatement après " . Cette règle ne peut plus être appliquée au début du XVI e siècle car l’équinoxe de printemps tombe un 11 mars . Or, dans un monde profondément christianisé, il est fondamental de déterminer rigoureusement la date de Pâques, fête centrale dans le calendrier liturgique. La réforme du calendrier est donc confiée au pape Grégoire XIII par le Concile de Trente ( 1545-1562) .

Réforme de Grégoire XIII.


Grégoire XIII

Le pape fait construire au Vatican une tour d’observation et nomme une commission de savants . Comme l’équinoxe de printemps tombe le 11 mars en 1582, en avance de 10 jours sur la règle fixée à Nicée, on supprime les 10 jours qui empêchent d’appliquer la règle . Le samedi 24 février 1582, le pape signe à la villa Mondragone de Frascati(près de Rome, en Italie) la bulle pontificale «  Inter Gravissimas ».

Le calendrier grégorien garde le système des années bissextiles tous les 4 ans mais introduit une modification pour les années séculaires ( 1600, 1700, 1800 ...) .En effet, l’année tropique étant plus courte que l’année julienne qui sert de base au nouveau calendrier, on supprime le jour ajouté aux années séculaires sauf quand le millésime est divisible par 400 ( 1600, 2000) . Ainsi 1600 et 2000 ont été bissextiles, et pas 1700 , 1800, 1900 .

Mais ce calendrier comportait quelques défauts, la durée de l’année grégorienne n’est pas exacte scientifiquement. En prenant en compte la correction moyenne de trois jours tous les 400 ans, l’année grégorienne dure 365,2425 jours .Elle est plus longue que l’année tropique de 365,2422 jours .

Mais cette imprécision n’est nullement gênante pour la vie quotidienne. Par contre, la fête de Pâques est toujours mobile, la durée des mois est inégale et le jours de la semaine change à une date donnée.

Il y eut en France une tentative de calendrier révolutionnaire qui ne dura que du 5 octobre 1792 au 8 septembre 1805 mais qui ne s’est jamais imposé dans la vie quotidienne. Le calendrier grégorien, qui n’a jamais cessé d’ être utilisé, redevient le calendrier officiel le 9 septembre 1805 .


L’ordonnance du roi de France Henri III[2]


Henri III de France
 (1551Fontainebleau
-1589 St Cloud)

Trois pays ont accepté de suivre aveuglément le pape, les trois états très catholiques d'Europe, et leurs colonies. Tous les autres pays, les pays de rite orthodoxe, de rite protestant, et les pays mixtes comme la France n'ont pas suivi le souverain pontife. Pour eux le 4 octobre 1582 a bien été suivi du 5 et non du 15. Les clercs catholiques de France étaient bien embêtés, certes le Saint-Père leur demandait bien d'avancer le calendrier de 10 jours, mais non le roi de France, Henri III,  qui était leur supérieur hiérarchique direct en vertu du Concordat de Bologne en 1516.

Fort heureusement une ordonnance du roi de France Henri III du 3 novembre 1582 décida que le lendemain du lundi 9 décembre 1582 serait le mardi 20 décembre 1582. Cette année-là l'Avent n'eut donc que deux dimanches au lieu des quatre habituels et Noël fut célébré dès le 15 décembre, selon l'ancien calendrier. Avec le ralliement de la France la réforme grégorienne gagna du terrain, d'autres états s'y rallièrent peu à peu : aux Pays-Bas les provinces catholiques le firent le lendemain du 14 décembre 1582, où ils fêtèrent Noël ; en 1584 pour les provinces catholiques de Suisse et d'Allemagne ; en 1586 en Pologne et en 1587 en Hongrie. Les provinces protestantes d'Allemagne, des Pays-Bas et de Suisse n'adoptèrent le nouveau calendrier qu'en 1700, et enfin en 1752 ce fut le tour de la Suède et surtout de la Grande-Bretagne et ses colonies. Donc les États-Unis d'Amérique, indépendants depuis le 4 juillet 1776, n'ont toujours connu que le calendrier grégorien, dont ils sont un des plus ardents défenseurs. Ce n'est qu'entre 1918 et 1927 que les pays de rite orthodoxe (Bulgarie, Grèce, Russie, Turquie, Yougoslavie) ont adopté le calendrier grégorien, mais uniquement pour les usages civils. Pour les fêtes religieuses ils conservent leur vieux calendrier julien. Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, en 1945, les autres états du monde (les états asiatiques, africains, arabes et Israël) ont eux aussi adopté, plus ou moins officieusement, le calendrier grégorien pour leurs relations commerciales et diplomatiques.

 

L’ordonnance du roi atteint la Bretagne en décembre 1582 et une copie intégrale, dont le fac-similé ci-dessous,  est publié dans le registre paroissial de l’église Notre-Dame de Guingamp en 1582.( AD22-Registres paroissiaux- acte B-lot n°3 –vue 12)
La transcription de ce texte, relativement ardue, a été effectuée par M. Philippe Caron, adhérent n° 191 du CG22 et paléographe émérite du groupe de discussion.
Une mise en forme plus lisible a été réalisée par l’auteur.

 

1- Fac similé.


2- Version transcrite par les bons soins de M. Philippe Caron

 

"De par le roy

A n(ot)re amé et feal. Aiant n(ot)re sainct perre le pappe
Gregoire traezie(sme) ordonné ungn callendrier ecclesiastique lequel sa saincteté
nous envoye comme a tous aultres rois princes et potentaulz de la crestienté par
lequel elle a trouvé estre necessaire de retrancher dix jours enthiers en
la p(rese)nte année pour les raisons amplemment deduictes en icelluy et combien
qu'elle aict ordonné que led(ict) retranchement se ferroict dedans le mois d'octobre
dernier passé neanlmoins n'aurions peu le faire execcutter et ensuivre aud(ict)
mois et voullant que les sainctes ordonnances du sainct siege aient cours
et soient observez en n(ot)re roiaulme comme il convient mesmes en ce faict pour ne
nous desunier et separer des aultres princes qui ont ja recepv et faict oberver led(ict)
callendrier nous voullons et ordonnons qu'estant le neufiesme jour du mois
de decembre prochain expiré que le landemain que l'on comptera le dixiesme soict
tenu et nombré par tous les endroictz de n(ot)re roiaulme le vingtiesme jour du
mois le landemain le XXIe auquel se cellebrera la feste de Sainct Thomas le
jour d'appres sera le XXIIe le landemain le XXIIIe et le jour ensuitvant
XXIIIIe de sorte que le jour d'appres qui aultrement et sellon le premier callendrier
eusté (eu esté) le XVe soict compté le XXVe et en icelluy cellebrée et solempnissée
la feste de nouel et que l'année p(rese)nte finisse seix jours appres lad(icte) feste et
la prochaine que l'on comptera 1583 commance le septie(sme) jour appres la cellebra(ti)on
d'icelle feste de nouel laquelle année et aultres subsequantes auuront appres leur
cours enthier et complet comme devant, des quelle n(ot)re intention et ordonnance
avons bien voullu vous advertir afin q(ue) aies (ayez) a l'ensuivre faire et observer et
pourvoir au service que se doibt faire aux adventz de lad(icte) feste de nouel et a aultres
festes ordonnés par l'eglise esd(icts) jours retranchés et la faire proclammer et
lire aux prosnes des eglises de v(ot)re diocesse comme nous enjoignons p(rese)ntement
aucz courtz de parllement baillyz et sennechaulx faire en l'estendue de leur
resort et juridi(cti)on afin q(ue) nul ne puisse pretandre cause d'ignorance et a ce
fecter (?) faulte car tel est n(ot)re plaisir. Donné a Paris le troisiesme jour de
novembre mil Vctz (cincq centz) quatre vingtz deux. Ainsin signé en l'original Henry et
plus bas de Neuffville et en superscription y a : A n(ot)re amé et feal conseiller
l'evesque de Treguer ou a ses vicquaires.

Henry vicarius (dom Henry vicaire de Guingamp)

Par coppie collationnée a l'original. C'est la coppye
des l(ett)res du roy qui commande faire publica(ti)on
d'icelles par touttes les parrouesses de ce roiaulme
pour la fin q(ue) dessus. Ce premier de decembre 1582.
Ainsin signé du commandement dud(ict) sieur evesque.
P. Le Clere (?)"


3-Version aménagée par l’auteur.

 

« De par le Roy,

 

A notre Ami et Féal[3]. Ayant notre saint Père le Pape Grégoire treizième ordonné un calendrier ecclésiastique, lequel sa Sainteté nous envoie comme à tous les autres rois, princes et potentats de la Chrétienté par lequel elle a trouvé être nécessaire de retrancher dix jours entiers en la présente année pour les raisons amplement déduites en icelui et combien qu’elle ait ordonné que le dit retranchement se ferait dans le mois d’octobre dernier passé,  néanmoins n’aurions pu le faire exécuter  et ensuite au dit mois et voulant que les saintes ordonnances du Saint Siège aient cours et soient observées en notre royaume comme il convient même en ce fait pour ne nous désunir et séparer des autres princes qui ont déjà reçu et fait observer le dit calendrier.

Nous voulons et  ordonnons qu’étant le neuvième jour du mois de décembre prochain expiré que le lendemain que l’on comptera le dixième soit tenu et nombré par tous les endroits de notre royaume le vingtième jour du mois, le lendemain le XXI ème  auquel se célébrera la fête de saint Thomas, le jour d’après sera le XXII ème , le lendemain le XXIII ème et le jour ensuivant[4]  XXIIII ème, de sorte que le jour d’après qui autrement et selon le premier calendrier eu été le XV ème soit compté le XXV ème  et en icelui[5] célébré et solennisé la fête de Noël et que l’année présente finisse seize jours après la dite fête et la prochaine que l’on comptera 1583 commence le septième jour après la célébration d’icelle fête de Noël, laquelle année et autres subséquentes auront après leur cours entier et complet comme devant, desquelles notre intention et ordonnance avons bien voulu vous avertir afin que ayez à l’ensuivre, faire et observer et pouvoir au service que se doit faire aux  Avents de la dite fête de Noël et à autres fêtes ordonnés par l’Église édits jours retranchés et la faire proclamer et lire au prône des églises de votre diocèse comme nous enjoignons présentement aux cours de Parlement, Baillis[6] et Sénéchaussées[7] faire en l’étendue de leur ressort et juridiction afin que nul ne puisse prétendre cause d’ignorance et à ce fecter( ?) faute, car tel est notre plaisir.

Donné à Paris le troisième jour de novembre mil cinq cent quatre vingt deux.

 

Ainsi signé à l’original HENRY et plus bas de NEUVILLE et en superscription[8] y a : A notre Ami et Féal conseiller, l’évêque de Tréguier[9] ou à ses vicaires.

 

Henry vicarius (dom Henry, vicaire de Guingamp)

 

Par copie collationné à l’original. C’est la copie des lettres du Roi qui commande faire publication d’icelles par toutes les paroisses de ce royaume pour la fin que dessus. Ce premier décembre 1582.
Ainsi signé du commandement du seigneur Évêque.
P. Le Clere ( ?) »

 

 

 

Aujourd'hui notre bon vieux calendrier grégorien est donc devenu international, mais cela a pris plus de 425 ans. Cela explique pourquoi toutes les tentatives, depuis les années 1920, pour le réformer ont échoué : il n'est certes pas parfait, mais il a l'avantage d'être utilisé aujourd'hui quasi universellement.

 

 

 

                                                                  Joseph Lohou.(2008)

  Cet article est publié dans le bulletin de liaison du CG22
   N° 81 de janvier 2009.

 

Sources.

Archives Départementales des Côtes d’Armor
- Guingamp-Notre Dame- acte :B, Lot : 3, Vue n°12, page de droite.
http://sallevirtuelle.cotesdarmor.fr/EC/ecx/connexion.aspx
Chronologie, ères, calendriers.
http://www.imcce.fr/fr/ephemerides/astronomie/Promenade/pages2/277.html

 

 





[1] Grégoire XIII, Ugo BONCOMPAGNI(°Bologne 1502-Rome 1585), succéda au pape Pie V en 1572.

[2] Henri III de France, fils d’Henri II et de Catherine de Médicis, dernier roi de la dynastie des Valois. Baptisé Alexandre-Édouard, il prit plus tard le prénom de son père, Henri. Roi de Pologne en 1573, puis sacré à Reims le 13 février 1575 sous le nom d’Henri III. Il épouse Louise Vaudémont-Nomeny, princesse de Lorraine le 15 février 1575. Il meurt le 2 août 1589, poignardé par le moine Jacques Clément.

[3] Ami et Féal, formule de politesse royale, féal : qui est fidèle à une autorité supérieure.(TLF)

[4] Ensuivant, part.prés du verbe « ensuivre », suivant, consécutif.(TLF)

[5] Icelui, dans la langue de procédure, celui-ci

[6] Bailli, représentant du roi ou d'un seigneur

[7] Sénéchaussée, étendue de la juridiction d'un sénéchal

[8] Suscrire, verbe trans.  écrire au-dessus de la ligne

[9] LE GRAS, Jean Baptiste, évêque-comte de Tréguier de 1564 à 1583. (AD22-série A-art. 49-1514-1664)


  


  Addenda N° 1

CLAVIUS Christoforus, allemand, 1537-1612

De son vrai nom Christof Klau, ce jésuite allemand, élève de Nonius à l'université de Coïmbra (Portugal), s'installa à Rome où il enseigna les mathématiques et l'astronomie. En Italie, il fut ami de Galilée dont il soutint prudemment les idées (le Message Céleste, 1610) en restant officiellement du côté de Ptolémée plutôt que de Copernic... Il traduisit et commenta les Éléments d'Euclide (Euclidis elementorum, 1574) qui lui valut le surnom élogieux d'Euclide du 16è siècle.

Clavius réforma le calendrier (1582), à la demande du pape Grégoire XIII, suite aux travaux de l'astronome italien Lilio (Aloysius Lilius) : calendrier grégorien. Le calendrier julien, décidé par Jules César (à droite) et mis en place en 45 av. J.-C. d'après les études de l'astronome Sosigène, évaluait la durée de l'année à 365,25 jours (365 j. 1/4), selon un calcul hérité d'Eudoxe de Cnide.

Ce calendrier introduisait les années bissextiles (qui ont deux 6 : 366 jours) en ajoutant un 29è jour en février afin de corriger, tous les 4 ans, l'erreur commise en admettant 365 jours par défaut. Mais cette durée de 365,25 jours était très imprécise (trop longue), ce qui provoqua, au fil des années, un décalage important, 13 jours, avec le rythme des saisons. Toutefois, seuls 10 jours furent retenus : on compta le décalage à dater du concile de Nicée (325 ap. J.-C.) : la science et la religion doivent se faire des concessions...

Le calendrier grégorien est un calendrier solaire : il se base sur la révolution de la Terre autour du Soleil (ou plutôt, à l'époque, sur celle du Soleil autour de la Terre...). Le calendrier musulman est un calendrier lunaire : basé sur le mois lunaire (environ 29 jours). Il a débuté en 622 après J.-C., date correspondant au départ du prophète Mahomet vers Médine, quittant La Mecque.

http://serge.mehl.free.fr/chrono/Clavius.html

 

 


                                                                           Joseph Lohou (4 janvier 2010)

 




            


 

© Tous Droits Réservés (Joseph Lohou)