LA BELLE HÉLENE
La belle Hélène était originaire de Sparte. Les femmes de
cette cité surprennent, en premier lieu les Athéniens. D'abord parce qu'elles
passent pour très libres de mœurs. Aristote, dans Les Politiques, n'hésite pas
à leur attribuer un « dérèglement total » et, avant lui, Euripide, dans Andromaque,
fait dire au vieux Pelée : « Même si elle le voulait, une jeune fille ne
saurait rester chaste à Sparte », puisque ces jeunes personnes ne restent pas à
la maison, courent « cuisses nues » au
gymnase et luttent avec les hommes ! Le fait est qu'à la différence des autres
cités, les jeunes filles, à Sparte, suivent le même entraînement que les
guerriers, s'entraînent à la course, à la lutte, au lancer du disque, ainsi
qu'au chant et à la danse, et boivent même du vin, comme les hommes. Toutefois,
elles ne participent pas aux combats, et cette éducation physique semble avant
tout destinée à leur permettre d'enfanter une robuste progéniture
Quant au mariage, il commence par la simulation d'un rapt.
La jeune fille est rasée, habillée en homme et laissée seule sur une paillasse.
« Le jeune marié, rapporte Plutarque, se glissant furtivement à l'intérieur,
lui déliait la ceinture et, la soulevant, la transportait sur le lit. Après
avoir passé avec elle un temps restreint, il se retirait décemment pour aller
dormir là où il avait l'habitude, avec les autres jeunes gens. » La
cohabitation n'est pas la règle, du moins avant 30 ans, et il peut arriver
qu'une épouse ait un enfant d'un autre que son mari, s'il y consent. Si les
règles de la fidélité conjugale semblent avoir été plus souples à Sparte que
dans d'autres cités, celles de l'honneur militaire passent pour y avoir été
appliquées par les femmes plus implacablement que partout ailleurs. « Avec ou
dessus », voilà comment le fils devait revenir du combat. Entendez : « avec »
son bouclier, en vainqueur qui n'a rien lâché, ou « sur » son bouclier,
c'est-à-dire en héros mort au combat. Les mères n'auraient laissé à leur enfant
que le choix de tenir ou de périr. On leur attribue aussi d'aller sur le champ
de bataille examiner les corps et de refuser la sépulture familiale à ceux qui
sont blessés dans le dos, signe de fuite. Mais des témoignages font aussi état
de leur panique, ce qui semble rassurant...