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Le Parachutage des SAS à l'aube du 6 juin 1944 :
Insigne du 2ème REP
Nous
sommes le 5 juin 1944 entre 22 h et minuit. Sur tous les aérodromes
anglais, les parachutistes SAS (Spécial Air Force) s'engouffrent dans
les appareils dont le vrombissement fait vibrer l'air ambiant de la
campagne anglaise.
A
bord de ces avions Stirling, tête de l'armada aérienne, figurait le
premier Stick (équipe), commandé par le lieutenant Marienne, qui
atterrit à Plumelec, à l'ouest de Malestroit. Le second, dirigé par le
lieutenant Botella, quitta la chaleur du bombardier et se lança dans le
vide alors qu'on survolait Locarn. Il était environ 1 h 15. Un
troisième Stick, (le lieutenant Deschamp et ses 8 hommes) devait
quitter l'avion un quart d'heure plus tard.
La
mission des SAS est double. D'une part, il s'agit de mener des actions
de harcèlement sur les arrières de l'ennemi avec pour but de fixer ou
d'entraver le déplacement des 7 divisions allemandes identifiées en
Bretagne. D'autre part, le général Koening, chef des FFI depuis mars,
leur a verbalement recommandé d'essayer de provoquer une levée massive
de la Résistance et de constituer des unités organisées, encadrées et
armées.
Premiers Contacts avec la Résistance :
Après
s'être regroupés à l'ouest des gorges du Coron, les 18 parachutistes,
firent la connaissance d'un premier élément de la Résistance locale, en
l'occurrence, Georges Ollirault. Il était suivi comme son ombre par
Georges Niemann, parachutiste allemand de la division Kreta, déserteur,
dont le père avait été fusillé par la Gestapo.
Puis
ce fut la rencontre avec d'autres combattants FTP qui contrôlaient
pratiquement cette région Callac / Maël-Pestivien / Peumerit / Quintin,
et dont la population était totalement acquise à leur cause. Enfin, ils
reçurent la visite de responsables de la Résistance Locale.
L'affaire
se présentait donc beaucoup mieux que prévu : Il y avait bien une
Résistance en Bretagne ! Aussi, le radio de Botella, le capitaine
Devize put-il envoyer un message demandant de l'armement pour plus de 2
000 patriotes.
A
partir du 8 juin, deux nouveaux "Sticks" furent parachutés dans la nuit
du 9 au 10 : 45 hommes commandés par le capitaine Le Blond. Un dernier
renfort arriva dans la nuit du 10 au 11 juin comprenant 50 hommes.
115 Parachutistes :
Ce
11 juin, l'effectif de la base "Samwest" était de 115 parachutistes et
trois "Jedburgs" sous le commandement du capitaine Le Blond. Les 10 et
11 juin furent employés à organiser la défense de la base,
correspondant maintenant à la forêt de Duault.
Le
capitaine Le Blond, même avec le renfort d'une trentaine de FTP du
maquis "Tito" qu'il incorpora, ne disposait pas d'une force suffisante
pour constituer un point d'appui fermé.
Aussi
se résolut-il à faire contrôler les voies d'accés par de petits postes
de 8 à 10 hommes, gardant en réserve une force de 25 hommes prêts à
intervenir en tous points immédiatement.
Deux
parachutages d'armes et de matériels eurent lieu, et les paysans avec
leurs charrettes aidèrent au transport des lourds containers. Il fut
impossible d'imposer les ordres de discrétions et d'empêcher la visite
de nombreux curieux, encore moins des gestes de fraternité.
Rencontre Inopinée :
Le
11 juin vers 21 h, des militaires allemands égarés se présentèrent à la
ferme de Ker Hamon pour y demander un renseignement. Ils tombèrent nez
à nez avec des parachutistes et francs-tireurs venus au ravitaillement.
Ici deux versions des faits s'affrontent.
Selon
certains, les Allemands auraient essuyé des coups de feu déclenchés par
les Français et auraient eu un blessé, ce qui ne les empêcha pas de
s'enfuir en voiture.
D'après
un témoin oculaire, tout le monde aurait été surpris par cette
rencontre inopinée et personne n'aurait eu le temps matériel de faire
usage de son arme.
Le
fait est qu'aucune détonation ne fut entendue par les défenseurs de la
base, et que la ferme ne fut ni évacuée, ni mise en état de défense,
comme cela aurait été le cas s'il y avait eu un accrochage.
Vers
9 h le lendemain 12 juin, les Allemands revinrent en force (trois
camions chargés d'une quarantaine de fantassins). Après échange de
coups de feu au cours duquel un FTP et un parachutiste furent tués, les
assaillants firent prisonniers les fermiers qu'ils rouèrent de coups,
mirent le feu à la ferme et jetèrent dans le brasier, le parachutiste
Very, qui n'était que blessé.
Manifestement
, il s'agissait là d'une opération "classique" de représailles menée
par des troupes anti-maquis, qui ignorait l'existence à proximité,
d'une base de parachutistes SAS.
Des
Francs-tireurs et parachutistes assistèrent de loin à cette scène
d'horreur, n'attendant qu'un signal pour intervenir en force et venger
leurs camarades.
Le Combat du 12 juin :
Le
capitaine Le Blond, après des hésitations autorisa la riposte.
Parachutistes et FTP rencontrèrent les Allemands à proximité de la
lisière de la forêt et engagèrent le combat en bénéficiant de l'effet
de surprise. Une partie des Allemands remonta dans les véhicules en
tentant de regagner Saint-Servais avec leurs otages. Ils furent stoppés
par les maquisards qui mitraillèrent les camions et libérèrent les
prisonniers dont les fermiers.
Les
Allemands, forts de leur expérience des combats, ne tardèrent pas à se
reprendre et tentèrent une manœuvre d'encerclement par le sud. Quatre
fois les soldats allemands montèrent à l'assaut et furent à chaque fois
repoussés avec des pertes sensibles.
Le
combat se poursuivit vers saint-Servais. Des renforts arrivèrent du sud
et se heurtèrent aux postes placés aux entrées des chemins d'accès qui
les tinrent en respect. Mais à partir de midi, la pression de l'ennemi
s'accentua et les premières pertes, morts et blessés furent à déplorer.
Le
capitaine Le Blond, craignant l'encerclement, décida de disperser la
base par petits groupes vers 14 h. L'opération d'évacuation fut
déclenchée, avec comme rendez vous un point situé à 16 km au sud de
Sérent (Morbihan), d'où on pourrait rejoindre la base "Dingson".
Ils
y parvinrent le 18 juin, quelques heures seulement avant l'attaque
allemande du maquis de Saint-Marcel. Le combat de Duault se poursuivit
jusque vers 18 h .
A
ce moment, les Allemands décrochèrent, reconnaissant de fait leur
échec. Les FTP restèrent donc maître du terrain, ce qui constituait une
indéniable victoire. Ils se virent confier les 3 blessés SAS
intransportables et les 13 tonnes d'armes, de munitions et d'explosifs.
L'Armement des Maquis :
Le
Commandant Pichouron alerta aussitôt les responsables des maquis de la
région : Callac, Saint-Nicolas, Trébrivan, Bourbriac, Guingamp et
Squiffiec. Tout le monde accourut chercher à Duault les armes et les
munitions tant désirées, souvent en camions, malgré les risques de
mauvaises rencontres.
Ce
fut d'ailleurs le cas pour un véhicule, sur lequel une patrouille
allemande ouvrit le feu et qui explosa, tuant cinq des occupant du
maquis "Valmy". Seul le conducteur G. Jouan, grièvement blessé, parvint
miraculeusement à s'échapper.
Ce
n'est que le 18 juin, soit prés d'une semaine après le combat, que
l'armée allemande, échaudée, se décida à revenir sur les lieux.. Des
milliers de soldats ratissèrent consciencieusement la forêt, utilisant
même les lance-flammes.
Pour
la première fois, une unité de la Wehrmacht s'était trouvée aux prises
avec une troupe bien armée, bien entraînée et déterminée, formant en
quelque sorte un amalgame entre des éléments parachutistes SAS et, en
fer de lance, des FTP du maquis Tito extrêmement actifs dans cette zone
du département. Résultat : elle avait subi un échec cuisant.
Le combat de Duault fut donc la première victoire, sinon la seule, de la Résistance après le débarquement. (Botella)
La
rage des Allemands fut à la mesure de cette amère constatation. Ils se
vengèrent sur la population civile qui, ils le savaient, avait aidé
maquisards et parachutistes.
Cela
coûta la vie à 15 personnes tuées sur place, ou exécutées après
tortures au Bois de Boudan en Plestan, et dont les noms figurent à
juste titre, sur une stèle du monument de Duault, à côté de ceux des 4
parachutistes, des 5 FTP et des 4 du maquis "Valmy", morts au champ
d'honneur.
De Duault à Coat-Malouen :
Quelques
parachutistes restèrent sur place. Ils allaient jouer un rôle majeur,
dans la ligne de la mission stratégique qui leur avait été assignée, au
sein des différents maquis et centre de Résistance dans cette partie du
département. Leurs connaissances en firent de bons instructeurs pour
les maquisards en quête de cadres qualifiés.
Quand
aux trois résistants gravement blessés : André Botella, Jean Lasserre
et Eugène Faucheux, ils furent transportés dans l'ancien repère des
"Tito" à Kerchariou, transformé rapidement en infirmerie avec l'aide
des habitants de Maël-Pestivien.
Georges
Le Cun les confia aux soins des docteurs Renan puis Rivoalen chirurgien
de Guingamp, qui opéra Lasserre sur place, à même la terre battue. Leur
confrère Le Breton de Bourbriac, assura les soins journaliers aux
blessés qui se rétablirent. C'est à Kerchariou que Dathanat de l'armée
secrète (AS) demanda à Botella de donner l'ordre à Jean Robert de
prendre la commandement d'un maquis à l'Etang-Neuf-Coat-Mallouen en
Saint-Conan
Un
maquis connu sous le nom de "Maquis de Plésidy" qui, après avoir
résisté à une attaque allemande le 27 juillet, joua un rôle majeur dans
la libération de Guingamp, le 7 août 1944.
Extrait de l'histoire des SAS.(« Qui ose gagne », traduction de la devise des SAS anglais « Who Dares Wins »)
Joseph Lohou (Mai 2015)