Callac-de-Bretagne

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François ABGRALL, député du Finistère

De Bodilis et Plounéventer à Plusquellec, les ABGRALL  


Bodilis

Le village de Kerthomas en Plusquellec était au 16° siècle le siège d’un manoir appartenant à la famille de KEROUARTZ et dont il ne reste aucune trace visible à ce jour.

Vers 1685, un métayer, mis en place par les KEROUARTZ,  seigneur du lieu, arrive à Kerthomas, il s’appelle Sébastien ABGRALL, il est éduqué et signe les registres paroissiaux.  il est veuf, son épouse vient de décéder en 1683 à Plounéventer. Il arrive au manoir de Kerthomas accompagné de sa fille Marie et de son gendre Jean Tigréat, de son jeune fils François, ayant laissé ses fils Hervé et Olivier à Plounéventer.

Il marie son fils de 22 ans François avec la fille de François Le GALL de Rundunec le 2 mars 1699, l’année terrible de l’épidémie de peste qui décima en trois mois d’octobre en décembre le tiers de la population.

Sébastien avait un autre fils Yves, de trois ans plus âgé que François, celui-ci est placé à Nantes dans une maison noble dont nous ignorons le nom. Yves, dont le nom est écrit ABREGALLE,  se marie le 10 décembre 1705 dans la paroisse St Saturnin de Nantes avec Françoise TÉTRON, servante dans la même maison et un fils Yves leur naît le 18 février 1706, quatre mois après leur union, le père est absent et le parrain s’appelle Gervais Le BROC et il est dit gascon de marine de profession. Un autre enfant, une fille, naît le 6 avril 1708 et est baptisée le 8 du même mois sous le prénom d'Élisabeth, le père Yves, facteur de son état est encore absent ; ne signent l'acte que le parrain, Charles Vechard et la marraine Élizabeth Guérineau, cette denière personne était déjà présente au mariage du couple en 1705 et signe les deux actes. Ils quittent Nantes un peu plus tard et  s’établissent au manoir de Kerthomas, mais l’épouse  ne semble pas avoir suivi le père et les deux enfants. Élisabeth ou Isabelle se marie en 1727 à Plourach avec Yves Le Bonhomme, dont postérité.

         De François ABGRALL et Marie le GALL, on ne connaît qu’un seul fils Jean, qui naît le 26 décembre 1700 et se marie à 18 ans avec Marie Le FAUCHEUR de Carnoët le 16 janvier 1718.

De ce couple naîtront trois fils prêtres, François, Sébastien et Joseph qui ont exercé à Plusquellec  jusqu’à la Révolution, Yves, Jean-Yves et Barbe qui feront souche et dont je suis issu.

  Mais le personnage qui nous intéresse, n’est pas encore né. Il est totalement ignoré des habitants de Plusquellec et pourtant il marqua son époque en devenant député du Finistère au Conseil des Cinq-Cents le 25 germinal de l’An VI( 14 avril 1798) sous le Directoire ;

François ABGRALL naît le 4 octobre 1757 au manoir de Kerthomas, il est le fils de Charles Abgrall, petit-fils de Sébastien, le finistérien, et de Jacquette QUÉNECHDU.

Son oncle François, curé de Plusquellec sous le rectorat d’Eussaff d'OIXANT, lui inculque quelques notions de français et de latin et le destine à la prêtrise. Il rejoint le collège de Quimper en 1770 tenu jusqu’en 1767 par les Jésuites. Il est acquis aux idées nouvelles et abandonne la prêtrise pour la basoche et devient homme de Loi à Quimper dans les années 1785 à 1790.
Avocat au Présidial de Quimper en 1790, il fut l’un des rédacteurs des cahiers des avocats pour  la sénéchaussée de Quimper. Nommé administrateur du District de Quimper ; puis procureur syndic, remplaçant Claude LE COZ[1], nommé évêque d’Ille-et-Vilaine à l’époque où il rédigea le compte rendu de cette assemblée.

  Il quitta ces fonctions en 1792 pour s’engager dans le bataillon des 300 volontaires fédérés du Finistère, appelés par les Girondins sous le titre de Garde départementales contre les 48 sections de Paris.
C’est en sa qualité de 1er volontaire inscrit que François ABGRALL parut devant la Convention le 23 décembre 1792( 3 nivôse de l’An I) à la tête des nouveaux fédérés bretons. La délégation fit entendre à l’Assemblée un violent réquisitoire qui se terminait ainsi : »  que la ville de Paris soit notre sœur en amitié, notre égale en patriotisme ; mais non pas notre supérieur en droit ; nous ne le souffriront jamais. Nous savons nous battre, nous ne savons pas assassiner… »

             
          
Le député Bertrand BARERE de VIEUZAC en 1792

Bertrand BARERE[2], président de la Convention, répondit : « La Convention Nationale connaît ses forces, elle n’oubliera jamais ses devoirs. Les législateurs sont des hommes, les hommes ont des passions mais elle fera en sorte de les sacrifier toutes pour les immoler sur l’autel de la Patrie… »

    Les délégués ne furent point admis aux honneurs de la séance ; mais à la séance du 13 janvier 1793 sur la motion d’un représentant breton, Armand KERSAINT[3], les fédérés du Finistère furent assimilés aux gardes nationaux de la capitale pour faire, conjointement avec eux, le service de la Convention. Pierre VERGNIAUD[4], qui occupait alors le fauteuil, les félicita de leur empressement à se rallier autour des représentants du peuple pour les défendre.

Le Député Pierre VERGNIAUD en 1792.

  

François ABGRALL joua, pendant son séjour à Paris, un rôle prépondérant dans les agissements de ces volontaires. Chargé ensuite d’une mission en Vendée, il favorisa la fuite des Girondins qui réussirent à s’échapper au 31 mai 1793. Devenu suspect de ce chef, il fut arrêté en Bretagne[5] et incarcéré jusqu’au 9 Thermidor( 27 juillet 1794. A sa sortie de prison, il ne dispose d’aucune ressource, ses biens ayant été saisis. Un ami l’associe à ses affaires, en attendant qu’il soit indemnisé et chargé de nouvelle fonction publique. Nommé en l’An III et renommé en l’An IV et V, administrateur du Finistère, ses relations avec les familles royalistes le firent destituer le 30 brumaire de l’An VI (20 novembre 1797).

  Son département l’ayant néanmoins choisi en germinal de l’An VI(mars 1798) comme représentant au Conseil des Cinq-Cents, il vit son élection annulée et tenta de se justifier des accusations portées contre lui dans un curieux mémoire intitulé : « Observations du conseiller ABGRALL, élu en l’An VI au Conseil des Cinq-Cents par l’assemblée électorale du Finistère sur les causes de l’annullation(sic) de son élection… »

  Dans ce libelle, François ABGRALL prend à partie, personnellement, les signataires des protestations parvenues à la commission centrale du Conseil des Cinq-Cents et accuse surtout la mauvaise foi du citoyen GUEZNO[6], son principal adversaire. Il y parle longuement de son administration dans le Finistère et se vante d’avoir contribué à rétablir l’ordre dans les finances. Il fut réélu le 26 germinal de l’An VII(15 avril 1799) au Conseil des Cinq-Cents et ne figura pas au 18 Brumaire parmi les députés républicains exclus de la représentation Nationale, mais il ne fit point partie du Corps législatif.

François ABGRALL épousa en 1802 à Ergué-Armel, Joséphine Françoise Vincente MALIN, la fille de son ami et commerçant Joseph Pierre André MALIN, qui l’avait secouru à sa libération et en 1801 devint Directeur des Contributions Directes de Quimper.
Il mourut le 15 janvier 1805 à l’âge de 47 ans après une vie bien remplie,  à une époque riche en évènements extraordinaires, une transformation souvent très brutale, une réforme de régime politique et administrative, un monde en action.


                                               
 Joseph Lohou (mars 2006-novembre 2013)



Sources.
1- SAVINA, Jean- L’élection des Députés du Finistère à la Convention Nationale-
BN cote 4° Le 35-42
2-
A. Robert, G. Cougny et E. Bourloton, Dictionnaires des parlementaires..., Bourloton, 1889-1891, 5 vol. (qui concerne les parlementaires de 1789 à 1889) 
3- GUÉZENNEC, Marie & LOHOU, Joseph –« Deux oubliés de l’histoire » François ABGRALL et Claude QUÉNECHDU de Plusquellec – KAIER AR POHER- Cahier du Poher N° 5
- Décembre 2000.



[1] LE COZ, Claude (°Plonévez-Porzay 1740-1815)- évêque constitutionnel d’Ille-et-Vilaine de 1790 à 1802.

[2] BARERE de VIEUZAC, Bertrand –(Tarbes 1755-1841), avocat, président de la Convention en 1792.

[3] KERSAINT, Armand Guy Simon- (°Paris 1740- 1793),  député de l'assemblée législative, député de la convention nationale, ci-devant, gentilhomme breton, ancien officier de marine,  condamné à mort, le 14 frimaire an 2, par le tribunal révolutionnaire de Paris, comme conspirateur et fédéraliste.

 

[4] VERGNIAUD, Pierre Victorin, (° Limoges 1753-Paris 1793), député de la Convention nationale,  homme de loi condamné à mort le 9 brumaire an 2, par le tribunal révolutionnaire de Paris.  

 

[5] Lire toutes les tribulations de François ABGRALL et les détails de cette arrestation dans le Cahier du Poher n°5, cité dans les notes répertoriées ci-dessous..

[6] GUEZNO de BOTSEY, Mathieu Claude (°Audierne 1763- 1839), famille originaire du Poher. Son aïeul signa l’acte de naissance du célèbre La Tour d’Auvergne(Théophile Malo CORRET)

                   


 

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